Dälek + Dead - L’Antipode (Rennes)

le 28/09/2019

Dälek + Dead - L’Antipode (Rennes)

Pour fêter les dix ans du label KDB Records, rendez-vous était pris à Rennes, dans la salle de L’Antipode, avec une programmation aussi alléchante que cohérente, puisque les Rennais de Dead précédaient Dälek, (déjà) mythique combo du New Jersey.

Prenez une dose de cold-noise, laissez-la infuser dans un récipient de trip-hop et arrosez l’ensemble de quelques vapeurs de shoegaze. Vous pourrez alors avoir une idée de ce à quoi les compositions de Dead ressemblent. Au niveau instrumental, on n’est d’ailleurs pas si éloigné de l’univers de Dälek, tant les deux groupes du soir évolueront avec des formations similaires : un frontman au micro, un guitariste à sa droite et un autre musicien aux machines de l’autre côté.

Chez Dead, dont on sera curieux de découvrir la totalité d’un EP prometteur intitulé Dreams, les voix sont néanmoins utilisées dans un autre registre que celui des Américains, privilégiant une mélodie austère sans doute influencée par Joy Division. Sublime, le titre Disappear parviendra à hypnotiser un public qui, avouons-le, attendait surtout l’apparition de Dälek. Dans l’intervalle, le spectateur aura été ensorcelé par ces vapeurs qui sentent le goudron tant c’est sa propre tête qui semble heurter le bitume à chacun des beats sortant des machines du combo.

Après cette belle prestation, et avec dix minutes d’avance sur l’horaire indiqué, les Américains prennent place sur la scène. Assister à un concert de Dälek est une expérience intense et il est extrêmement difficile de sortir un morceau plus qu’un autre, le groupe - rejoint sur cette date par le Rennais Olivier Mellano à la guitare - prenant le soin de ne marquer que très peu de pauses entre ses morceaux, ne laissant bien souvent pas le temps au public d’applaudir.


Il convient néanmoins de repérer quelques moments plus intenses, comme cette introduction étirée sur un Seek Harbor aux faux-airs de drone, ainsi que Paragraphs Relentless et son beat puissant sentant l’ammoniac ou le savamment austère - et plus que jamais d’actualité - Asylum (Permanent Underclass) pourtant issu du sommet Absence il y a déjà plus de dix ans, à une époque où KDB Records n’avait pas encore vu le jour, donc.

L’immersion est totale et MC Dälek, casquette vissée sur le crâne, barbe fournie, tête souvent baissée vers ses contrôleurs et micro empoigné vivement, crève l’écran. Will Brooks alterne uppercuts et caresses (adressées avec une poigne de fer, n’exagérons rien non plus). Le charisme de l’Américain recèle même une dimension magnétique, si bien que l’on se situe tout simplement hors du temps, happé, presque médusé et interdit. Pas le meilleur moyen d’accumuler de l’information pour effectuer un live report digne de ce nom.


Il clôturera sa prestation avec un leitmotiv tout simple : "buy records", samplé à l’envi sur ses machines pendant qu’il salue le public, le photographie et quitte la scène. Hors du temps, nous disions, cette prestation peut sembler avoir duré quinze minutes ou deux heures, au choix. La vérité se trouve au milieu, évidemment, mais si la révolte qu’il appelle de ses vœux, brandissant parfois le poing pendant le show, se concrétise, il faudra assurément compter sur MC Dälek pour aller au combat...


( Elnorton )

 


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Ces dernières années, certains considéraient que l’inspiration de Dälek empruntait une pente descendante continue. Il faut bien avouer que Gutter Tactics, très bon disque au demeurant, n’atteignait pas les cimes ténébreuses des sommets Absence et Abandoned Language.