Marvin + Zëro + Micah Gaugh + Three Second Kiss - Le Point Ephémère (Paris)

le 18/05/2013

Marvin + Zëro + Micah Gaugh + Three Second Kiss - Le Point Ephémère (Paris)

Moins de bla-bla, plus de photos, telle est la logique de ce nouveau live report. Son objet ? "Mind Your Head", onzième du nom. Ces soirées immanquables que Mowno organise dans les meilleurs lieux de la capitale et d’ailleurs. La dernière était particulière. Elle rassemblait deux événements, liés par la vie et la force des choses. La sortie du nouveau Marvin et les 5 ans du label Africantape. Du beau monde pour l’occasion. Marvin, évidemment et d’autres membres illustres de la famille. Au programme, quatre groupes. Du lourd.
Compte rendu :

Three Second Kiss
On voit tout de suite que les mecs de Three Second Kiss ont déjà connu un certain nombre de rades. Y a du métier. Mais toujours une spontanéité nécessaire dans leur jeu. Ça a beau être un noise pur et dure, TSK sait faire un bien joli bruit.

Sur album, leur musique est dépouillée de tout effet. Tantôt confiée à Bob Weston, tantôt à Steve Albini, la musique âpre et froide du trio italien y est présente à l’état brut. On entend le groupe tel quel, comme une matière première, encore pure. Lorsqu’ils se branchent sur une scène, tout est là, l’urgence en plus.

Le live permet de mieux apprécier la richesse rythmique et harmonique de leur musique.
Les accords inédits égrainés à la guitare. Le quelque chose jazz de leurs intervalles. Le groove indomptable du batteur, efficace sans être tapageur. Les claques de la basse. La voix déclamée, monocorde.

La soirée commence par une grosse tatane...

Micah Gaugh
Quand il s’installe, le batteur de Micah Gaugh en impose. Une tête de méchant dans un film catastrophe derrière une paire de lunettes à verres fumés. Veste en velours beige sur pantalon de flanelle jaune à motifs écossais. L’homme a un style. Musicalement, il a un filon. Il ne cesse de le suivre durant l’intégralité du set. On lui a dit « soit free », il l’a été.
Il faut dire que le trio défend un album fou qu’on doit au courage de quelques névrosés d’Africantape qui ont fouiné dans quatorze heures d’enregistrements pour en extraire douze titres compilés sous le nom The Blue Fairy Mermaid Princess (sorti en mars). C’est une musique improvisée dont s’échappent ponctuellement des esquisses de chansons. L’ensemble est chaotique et surprenant, obstiné et patchwork.

Micah Gaugh est, au départ, un saxophoniste. Mais il passe le plus clair de son temps à chanter, perchant parfois sa voix dans les aigus, la promenant, sans laisse, sur des airs un peu soul. Il s’accompagne au synthé, tout en modalités. Quand il prend son sax, un alto ou un mini, la formation lâche toute prise et donne un free jazz ardent.

Quand il prend les deux sax en même temps, ça devient vraiment spectaculaire. Deux improvisations interprétées simultanément, par une même bouche, avec une différence de timbre et d’octave déconcertante... étourdissant !

Le contrebassiste alterne entre accompagnement des airs à la voix et roue libre avec la batterie. Il est très concentré, il sue.
Une parenthèse étrange et rafraîchissante au milieu de cette coulée brutale.

Zëro
Ca fait drôle de se retrouver devant des mecs dont on a entendu parler à travers les noms de groupes essentiels de la scène noise rock et expérimentale française. Après Deity Guns, Bästard et Narcophony, Zëro est la dernière incarnation d’un phénix incontournable. Ces types sont pourtant d’une élégante simplicité. À l’aise, naturellement, et familiers.

Éric Aldéa joue de la guitare, de la basse, du clavier et chante. Il est gaucher mais tous ses instruments sont montés à droite. Sûr que cette particularité, qui manifeste une dextérité originale, a influencé la créativité de son jeu.

François Cuilleron fait à peu près pareil qu’Éric Aldéa, mais il ne chante pas. Il est celui qui trouve et interprète ces riffs si bien troussés sur les albums. Continuellement rivé sur sa guitare, il fait de "Shoegaze" un terme efficace.

Ivan Chiossone fait pareil que François Cuilleron, mais il ne joue pas de basse. Il est le maître des claviers, cultive la part électronique, assure la modernité.

Ils échangent régulièrement leur place et leurs instruments. Sauf le batteur, c’est évident.
Franck Laurino joue posé, dans la retenue, en mouvements amples et réfléchis. Beaucoup de percussions sur les toms, pour un battement tribal.
Zëro s’amuse à brouiller les pistes et à mixer les influences, pour perdre l’auditeur dans son univers fait de blues, de rockabilly, d’électro, de post, noise et math rock.

Penser à cocher en face de leur nom sur la liste des groupes qu’il fallait voir avant d’être vieux.

Marvin
On a déjà eu l’occasion de dire le bien que l’on pensait du trio montpelliérain.

En live, la dimension dansante de leur musique prend tout son sens. La batterie maintient une pulse élevée, et une haute intensité sonore. Les orgues permettent une ligne de basse simple et répétitive. La guitare garantit la puissance. Le public exulte, libère sa liesse.

Le set est expédié pied au plancher. Les trois albums sont mobilisés et au sein desquels on a préféré les morceaux les plus musclés.

Quand on n’a pas la mouvance de guincher au milieu des bêtes, et après trois prestations fiévreuses, l’attention se fait moins parfaite, surtout pour une musique aussi physique.
Je ne suis d’ailleurs pas complètement convaincu par les lignes de basse disco de Marvin (jouées au clavier) et leur binarité insistante. Je reste en attente d’une éventuelle nuance.

Au rappel, Éric Aldéa viendra tenir le micro, pour une reprise de Devo, plus punk que jamais.

On sort de cette soirée intense, satisfait et vidé.


( Le Crapaud )

 


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