Mercury Rev - Born Horses
1. Mood Swings
2. Ancient Love
3. Your Hammer, My Heart
4. Patterns
5. A Bird Of No Address
6. Born Horses
7. Everything I Thought I Had Lost
8. There’s Always Been A Bird In Me
Sortie le : 6 septembre 2024
Les cyniques vont probablement s’en donner à coeur-joie des deux côtés de l’Atlantique et pourtant, bonne chance pour dégotter album plus décent que ce Born Horses parmi les purges racoleuses qui constitueront très probablement comme à l’accoutumée l’essentiel des listes de fin d’année de ces blogs ricains que vous continuez probablement à lire, non sans un soupçon de culpabilité, pour vous tenir au courant des sorties dont tout le monde va parler. Non pas que ce 11e long-format de la bande à Jonathan Donahue soit un grand disque d’ailleurs, loin de là, mais il a quelque chose de précieux que les soi-disant "meilleurs albums de l’année" des faiseurs de mode en carton n’auront pas : une sincérité dans le romantisme et la féérie, qui s’est perdue au point de passer aujourd’hui pour de la mièvrerie auprès des mêmes, souvent, qui apprécient pourtant dans sourciller l’une ou l’autre de ces tendances pop "défendues" par les publications en question, autrement plus dégoulinantes, surproduites et chantées sans coeur ni conviction par des cash machines dévitalisées.
Mercury Rev donc, soit aujourd’hui le noyau dur Donahue / Grasshopper rejoints par le pianiste Jesse Chandler, déjà contributeur aux deux précédents opus de la formation, et par la claviériste d’origine autrichienne Marion Genser, parle plus que jamais d’amour au premier degré (ce qui ne sera déjà pas du goût des amateurs de cette pose ironique devenue la norme dans la pop indépendante depuis une grosse quinzaine d’années, rien n’a changé depuis l’époque de Snowflake Midnight en somme), et continue de se mouvoir sur le fil d’un kitsch depuis toujours assumé (il suffit de réécouter Tonite It Shows sur Deserter’s Songs pour s’en convaincre). Il serait ainsi facile de s’arrêter à l’aspect un peu daté du spoken word qui remplace ici les envolées éraillées du chant sur l’essentiel du disque, évoquant les méditations spirituelles de certains des derniers enregistrements d’Anne Clarke, de tiquer sur la production d’une "grandeur" parfois douteuse, ou encore d’abhorrer les cuivres anachroniques flirtant avec le cheap (cf. le morceau-titre, où l’on s’en serait bien passé) qui émaillent ce Born Horses, néanmoins infiniment plus réussi que le décevant Bobbie Gentry’s The Delta Sweete Revisited d’il y a 5 ans, avec ses ballades country-pop aussi fades que sirupeuses même pas sauvées par un casting de voix féminines meilleur sur papier que sur sillons.
Des atmosphères luxuriantes et jazzy particulièrement immersives de l’introductif Mood Swings à la cavalcade rétro-futuriste There’s Always Been A Bird In Me avec ses élans d’hymne à la stratosphère, en passant par A Bird Of No Address et ses beaux restes de Deserter’s Songs justement (probablement le morceau le plus classiquement Mercury-Revien du disque) ou ce Patterns dont la dynamique impressionniste n’est pas sans évoquer le trop sous-estimé Snowflake Midnight dont on parlait plus haut, Born Horses renoue en effet avec l’étrange beauté de ce dernier, à la lisière de la ringardise et d’une magie désarmante de candeur qui finit toujours par emporter le morceau. C’est d’ailleurs le cas de manière encore plus évidente avec Ancient Love, superbe d’onirisme bucolique en flux tendu, avec le psyché-blues symphonique et baroque de Everything I Thought I Had Lost, ou même sur Your Hammer, My Heart, ballade mi-lyrique mi-feutrée qui emballerait assurément son monde si cette crapule de Dan Bejar aka Destroyer aux deux derniers opus archi-ratés l’avait enregistrée du temps de Kaputt - la musique des Américains étant ceci dit beaucoup plus idiosyncratique que nostalgique, et désormais débarrassée, en parlant de mauvais goût revivaliste, de tout atome crochu avec leurs ex-cousins Flaming Lips devenus chantres d’un psychédélisme poussif et surchargé, aux effets boursoufflés si ce n’est vieux avant l’heure.
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