Le streaming du jour #1414 : Oval - ’Popp’
A l’image de cette photo sur la pochette dont on ne saurait affirmer avec certitude ce qu’elle représente (une hache ensanglantée dans un sac en plastique ?) sans pour autant qu’elle ne nous frappe vraiment par son étrangeté, le nouvel album d’Oval est de ces OVNIs familiers, inhabituellement familier même de la part de l’Allemand qui de ses séminales expérimentations glitch à ses récents métissages brésiliens en passant par les instantanés synthétiques en liberté du visionnaire O, n’a jamais cessé de repousser les frontières de l’électronique.
Présenté comme un album "club" né de l’ambition de Markus Popp de déconstruire ses propres classiques des 90s, on se doutait que Popp, avec son titre symbolique d’une idée très personnelle de l’électro "pop", n’en aurait ni la facilité, ni l’évidence. Mais finalement rythmé de façon plus orthodoxe et moins free qu’à l’accoutumée et vrillé de bidouillages vocaux glitchés évoquant les samples euphoriques d’une chillwave que l’auteur de Wohnton n’a pas manqué d’influencer (cf. entre autres le "gazouillant" Sa), la caractéristique la plus inhabituelle de cette collection de morceaux - à l’exception peut-être des très IDM et hymniques Mo et Ve dont l’édification rythmique se fait plus progressive - est leur façon d’entrer d’emblée dans le vif du sujet, hérésie à n’en pas douter pour les amateurs de bangers tant ces instrumentaux n’ont pas le moindre sens des montées hédonistes nécessaires à électriser les pistes de danse.
Pour autant, en dépit de quelques passages dont les itérations tapent légèrement sur le système (le chaotique Id ou surtout le fatigant Re, sorte de BO de jeu vidéo schizoïde dont le titre laisse à penser qu’il s’agissait bien néanmoins de l’intention du musicien), la transe maximaliste de ces instrus aux pulsations glitchées fait son petit effet, de l’implosif Ku dont l’élan régressif se double d’un background de percus cristallines plus délicat qu’il n’y paraît, aux réminiscences drum’n’bass du syncopé Ca en passant par l’hyper-efficace Lo dont les scintillements oniriques au second plan évoquent une ambient martelée au démolisseur pneumatique. Dès le cybernétique Ai le beatmaking est ainsi plus central que jamais chez Oval, et depuis les premiers battements de cette entame acid house saturée ou du bizarrement groovesque Fu qui lui fait suite, le successeur de Voa fait preuve d’une pesanteur inédite dans la disco du Berlinois, heureusement contrebalancée par une luxuriance plus spacieuse de blips virevoltants dans les interstices de ces polyrythmies exaltées.
Album au son très dense et dru, tout aussi singulier voire aussi savant qu’un Ovalcommers mais certainement moins audacieux, d’autant moins facile à digérer d’une traite que la version Bandcamp présente pour un temps limité trois bonus inédits (mention au jam rouleau-compresseur Fi) mais assurément stimulant du début à la fin, Popp ne fera danser que les plus dérangés d’entre nous et ça finalement c’est tant mieux.
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