Débarrassé des quelques dérives chansonnières qui sans nuire à l’univers déjà très personnel de son premier album éponyme sorti en 2004, auraient tout de même pu faire douter d’une réelle originalité sur le plan musical, le québecois Pierre Lapointe s’affranchit avec La forêt des mal-aimés de toute comparaison génante avec une certaine "nouvelle chanson française" habituée des prime-time du service public pour dévoiler un talent assez exceptionnel de compositeur et d’arrangeur, comparable dans un registre différent à celui de Benjamin Biolay.

En effet, sur ce nouvel opus, distribué dans l’hexagone six mois après sa sortie au Québec où le jeune chanteur de 25 ans à peine jouit d’ores et déjà d’un beau succès populaire, s’affirment un même mélange de mélancolie, de désespoir et de frustration, et surtout un même goût pour l’hybridation musicale. Résultat : un album totalement inclassable, entre chanson hantée, comptines morbides, rock 60’s, envolées lyriques, habillage électro inventif et racé, piano néo-classique, orchestrations symphoniques à tomber par terre, choeurs majestueux ou même choeurs d’enfants, le tout construit en trois mouvements autour d’une paire d’instrumentaux poignants.

Ainsi, l’univers de Pierre Lapointe, s’il rappelle par moments Serge Gainsbourg (et ses chansons pour Françoise Hardy), Jean-Louis Murat voire Emilie Simon d’un côté, et de l’autre Ennio Morricone ou Danny Elfman, n’en demeure pas moins tout à fait singulier. Et si l’on pourrait regretter une certaine propension aux tournures littéraires empesées, elle est amplement compensée par des métaphores aussi originales que touchantes.

Pour découvrir deux extraits de chacun des albums de Pierre Lapointe ainsi que trois clips décalés et vous faire une idée, ce myspace de fan compensera aisément l’absence de page officielle.