On reparle de Tenshun et Bonzo quelques mois après le déjà fabuleux Odious, le duo de beatmakers ricains étant bien parti pour nous faire une année à la hauteur de la précédente sur son label fétiche I Had An Accident. Miasme : émanation provenant de matières organiques en décomposition et considérée, avant la découverte des micro-organismes pathogènes, comme l’agent des maladies infectieuses et épidémiques ; odeur fétide qui s’en dégage ; album oppressant, sulfureux et malsain de deux génies de l’abstract noisy.

Déjà, ça commence avec une étonnante retenue du côté d’un Tenshun que l’on connaissait généralement plus abrasif et belliqueux. Tel un DJ Shadow de purgatoire, il empile beats équilibristes, samples de films insidieux et distos perturbantes dans une ambiance plus inquiétante qu’apocalyptique, avec juste ce qu’il faut de décadrage et de bizarrerie pour éviter que le confort du groove ne s’installe de trop. Le drumming en roue libre auquel on s’attendait ne démarre donc qu’à mi-chemin de ce bien-nommé Throne of Blood et encore, pour mieux alterner beatmaking organique et fantasmagories ambient sur une seconde partie qui explore notamment par samples interposés le côté obscur du ciné japonais.

C’est ainsi chez Bonzo qu’il faudra aller chercher le soupçon de bruitisme lo-fi mis de côté par son compère, drums implosifs et massifs aux textures craquelantes et atmosphères cauchemardées de séries B horrifiques aux fréquences assourdies constituant le plus gros de ce Sorehead tout aussi inconfortable et captivant dont l’esprit malfaisant ne relâche jamais son emprise 20 minutes durant, même quand les rythmiques mettent la pédale douce pour laisser la part belle aux échantillons de soundtracks sataniques, pianotages désarticulés, distorsions saturées et autres cordes de damnés. La bande originale de l’enfer sur terre circa 2025 que nous autres occidentaux embourgeoisés ne connaîtrons sûrement que par le biais de médias moribonds.