Quatrième long format du trio japonais et premier pour le "gros" label indé californien Topshelf après une poignée d’EPs et de splits remarqués, Tres est une bonne porte d’entrée sur l’improbable mixture light d’un groupe qui est un peu au jazz ce que leur compatriote World’s End Girlfriend est à l’électronique et aux bandes originales de films, en moins échevelé et grandiloquent : un shaker aux mélanges parfois douteux mais le plus souvent frais et stimulant qui ne sacrifie pas son héritage nippon sans pour autant lui donner une importance démesurée (cf. les mélodies des polyrythmiques Phases et Shapeless Man).

Dans le cas d’Akira Kawasaki (batterie, piano), Atsushi Kiyota (piano, synthés) et Daisuke Niitome (piano, claviers, trompette), il s’agit donc de jazz fusion mâtiné de trip-hop voire d’électronica (le baroque Clarity avec ses chœurs de liturgie synthétique), d’un soupçon de post-rock (One Hundred Twenty), de pianotages néoclassique et d’invités vocaux à la croisée de la pop et du r’n’b (Stars Down), tant et si bien que l’on pense parfois au GusGus circa This Is Normal, sur Pulse notamment avec la chanteuse soul montréalaise Dominique Fils-Aimé au micro, un easy listening hautement mélangeur avec juste ce qu’il faut d’hédonisme pour ne pas avoir à craindre l’indigestion.

Certes il y a parfois une pincée de saxo dégueulasse (Pulse toujours), des solos de guitare à 12 doigts (qui passent quand même plutôt bien sur l’alambiqué Time quelque part entre Aufgang et Cougar), quelques claviers funkysants un peu trop prog pour être honnêtes (l’interlude Golconda) mais aussi de vrais moments de grâce comme The Prophecy, instru ambient en suspension au piano digne des meilleurs Air d’antan, ou Dark Lights où lyrisme nu-jazz du piano, trémolos de guitare et trompette spleenétique dialoguent sur fond de drums profonds aux élans contrôlés.

Bref, un petit plaisir à ne pas bouder en libre écoute sur le Bandcamp du label de San Diego :