L’histoire est un peu folle. Peu de temps après avoir créé le label Pale Figure, Nathan Leproust se rend aux Etats-Unis juste après avoir pris contact avec Scott Leitch, dont il apprécie particulièrement les compositions. Le batteur d’Alex G évolue également en solitaire sous l’alias Shelf Life avec lequel il a produit le disque Everyone Make Happy en 2015. Ils ne se sont jamais rencontrés et conviennent de partager un verre.

Deux semaines après, en plus d’avoir établi une amitié sincère, ils ont composé dix chansons qu’ils rassemblent pour former un disque. Immédiate, cette production explore les contours d’une pop lo-fi aussi aventureuse qu’évidente. Les guitares ne sont pas toujours accordées parfaitement, le son peut être granuleux, les voix sont imparfaites, mais cette esthétique est recherchée et cohérente avec un processus de composition ayant conduit les artistes à alterner improvisations, récréations au bar du coin et enregistrement dans le studio situé dans la cave de Scott Leitch.

Cohérent sans être uniforme, ce disque n’en est pas moins profondément attachant. Plus psychédélique, l’entame de Better prend ses distances avec les guitares et percussions qui constituent de forts points d’ancrage dans cet univers, tandis que Poconos est bâti autour d’accords de piano qui se cherchent tout en empêchant l’auditeur de rester sur le bas-côté.

Attachant car imparfait, donc. Et ces petits défauts, comme cette voix en français semblant peu assurée sur Rendezvous, finissent par faire la force de ce disque au gré des écoutes. S’il a été composé de manière immédiate, Shelf Life x Teenage Bed pourrait durer sur nos platines. Car comme le dit le Nantais, les accords ne pourront jamais être révolutionnés, mais "il y aura toujours des moyens nouveaux de s’exprimer dans le grain de son". Et même si c’est de manière régressive, avec une esthétique lo-fi totalement assumée et décomplexée, lorsque les mélodies sont inspirées, le résultat sera toujours largement digne d’intérêt...