Le streaming du jour #1966 : Ian Hawgood - ’光’

Associé en début d’année sur son propre label Home Normal à l’Italien Giulio Aldinucci pour un Consequence Shadows aux longs instrus ambient immersifs et abstraits où son piano, comme sur cette collaboration non moins contemplative et réussie avec Wil Bolton l’an passé, ne surnageait que par intermittence, l’Anglais Ian Hawgood renoue ici en solitaire avec l’intimité de son instrument de prédilection, dans la continuité du très beau Love Retained de 2016.

Au contraire de ce dernier toutefois, qui était un recueil d’ébauches laissées en l’état pour partager avec ses proches, après des années d’incommunicabilité, le regard intérieur de ses périodes de dépression à Tokyo, ("lumière" en japonais) est la première œuvre en 6 ans véritablement pensée comme un album solo par un musicien qui semble enfin voir le bout du tunnel. Moins fondamentalement dépouillée que Love Retained, cette sortie estampillée Eilean Rec. s’appuie également sur les récents travaux d’Hawgood sur de vieux enregistreurs cassette et avec des synthés vintage collectionnés pendant 20 ans, un background de hiss et de nappes oniriques soutenant la plupart des morceaux, de la "préface" avec ses field recordings bucoliques, au délicat Hurt Whispers On où le piano, à mi-chemin, semble reprendre le dessus en dépit de discrètes distorsions de l’enregistrement évoquant le ravage des années, comme sur le final A Light That Never Dims dont les sonorités passées empreintes de nostalgie véhiculent l’espoir certain d’un retour à des temps plus sereins.

Bien que les 5 premiers titres aient des noms japonais, le climat engourdi par le froid de sa Pologne d’adoption semble inspirer Hawgood autant que les notions d’impressions éphémères et d’impermanence chères à la culture nippone. Temps suspendu sur ("vague"), reflets d’enfance avec 屈折 ("réfraction"), clarté du chemin que l’on suit en espérant se retrouver (旅路, "un voyage"), lâcher-prise d’un passé qui ne nous a que trop hantés (消滅, "extinction") ou persistance de ces moments que l’on embrasse avec un mélange de tendresse et de mélancolie pour avoir fait de nous ce que l’on est (But Such Arcs Remain), les morceaux finissent souvent dans l’éther des synthés, comme si le fil de la pensée se perdait dans le spleen de l’introspection.

Mais si Every Ending Is A Little Sadder Now You’re Gone, dixit le morceau le plus angoissé de l’album aux cascades de piano lo-fi et embrumées, c’est finalement la ferveur qui domine et l’idée, relayée par ces drones vaporeux, que rien ne s’éteint jamais vraiment, surtout pas notre foi en la vie. Modeste et touchant, comme son auteur, est de ces disques qui vous guérissent l’esprit en toute humilité.


Streaming du jour - 22.07.2018 par RabbitInYourHeadlights
... et plus si affinités ...
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