Fire ! Orchestra + We Use Cookies + Tumulus - L’International (Paris)

le 15/11/2018

Feu marche avec moi

C’était avant-hier soir à L’International et on ne va pas faire durer le suspense plus longtemps, le collectif Coax nous conviait dans le sous-sol du bar du 11e arrondissement à l’un des plus beaux concerts parisiens de l’année.

La soirée s’est ouverte à même le sol, en plein milieu de la petite salle, sur une performance solo au saxo électrique d’un certain Tumulus affilié au sus-nommé Coax, pour une impro atmosphérique à la fois menaçante et tourmentée, émaillée de déflagrations saturées. Plus drone que jazz, une entame prenante pour les curieux encore peu nombreux arrivés sur le coup de 20h.


Puis ce fut au tour de We Use Cookies, autre pensionnaire du collectif/label orienté jazz dans ses versants expérimental, punk et/ou bruitiste. Pas encore de sortie studio pour ce projet électro/noise semi-improvisé à coups de machines modulaires qui m’a mis une belle claque avec ses progressions dystopiques à la croisée du drone, du harsh noise, de l’indus pour certains passages aux rythmiques martelées, de l’électro analogique déstructurée, etc. Vivement l’album !


Enfin, les Suédois du Fire ! Orchestra, dont les 14 membres du line-up actuel avaient bien du mal à tenir ensemble sur la petite scène de l’International, nous ont offert une pièce inédite en trois longs mouvements, intitulée Arrival.


Une performance fabuleuse même pour l’admirateur de leurs albums studio que je suis, tant cette incarnation chorale de Fire !, le fameux trio jazz/noise du saxophoniste Mats Gustafsson et des bassiste et batteur Johan Berthling et Andreas Werliin (discrets ce soir en fond de scène par la force des choses) témoigne d’un équilibre encore plus impressionnant entre chaleur et dissonance, schizophrénie et mélancolie, science et spontanéité, gravité et plaisir de jouer, avec une densité et un sens du contraste que leurs disques (lire nos chroniques dExit !, Enter ! ou encore Ritual) ont encore un peu de mal capter dans toute sa splendeur malade.


Les stridences des violons, les feulements des cuivres, les digressions névrotiques entre deux montées plus feutrées du génial Gustafsson - affublé d’un t-shirt "I hate musicians" - en chef-d’orchestre expressif et bienveillant, une fonction qu’il a même mise en scène avec humour pendant quelques minutes, postures de conduite à l’appui...


... les vocalises des deux chanteuses Mariam Wallentin (Wildbirds & Peacedrums) et Sofia Jernberg, capables des duos les plus harmonieux comme des braillements les plus désinhibés, évoluant souvent en crescendo de mélodies introspectives en déchaînements libertaires, la première assurant discrètement le spectacle avec ses gestuelles parfois proches du rap...


...une réappropriation simplement merveilleuse du At Last I Am Free de Chic (déjà magnifiquement repris par Robert Wyatt et Liz Fraser des Cocteau Twins) par la même Mariam, bouleversante d’espoir et de spleen mêlés, en guise de final parfait...


... et même quelques passages au groove plus affirmé sous l’impulsion de la contrebasse et de la batterie, plus tout y était. Ne manquent que les mots pour décrire les frissons procurés par une telle montagne russe de sensations et d’émotions... et il n’y a plus qu’à croiser les doigts pour qu’un nouvel opus arrive dans la foulée et parvienne à rendre justice à cette œuvre ensorcelante et habitée.


Quelques photos supplémentaires :










( RabbitInYourHeadlights )

 


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