The Go ! Team - Proof Of Youth

Il y a trois ans, The Go ! Team s’imposait déjà comme la révélation des années 2000 avec Thunder, Lightning, Strike , premier album réalisé par le seul Ian Parton dans la cuisine de ses parents (!), et qui rappelait beaucoup de choses mais ne ressemblait à rien de connu.

1. Grip Like A Vice
2. Doing It Right
3. My World
4. Titanic Vandalism
5. Fake ID
6. Universal Speech
7. Keys To The City
8. The Wrath Of Marcie
9. I Never Needed It Now So Much
10. Flashlight Fight
11. Patricia’s Moving Picture

date de sortie : 10-09-2007 Label : Memphis Industries

Empruntant à la pop psychédélique et aux girls bands des années 60, aux sonorités soul, funk et dance, aux guitares de Sonic Youth et au hip-hop old school des années 80, à la country et à la folk, à Morricone et John Barry comme aux BO de blaxploitation 70’s signées Bobby Womack ou Isaac Hayes, le sextet de Brighton livrait paradoxalement une fusion totalement inédite, joyeusement foutraque et pourtant parfaitement homogène, d’une grandiloquence naturelle pleinement assumée, vibrante et lyrique, prônant sur album comme sur scène l’amour et le partage avec une candeur magique et communicative. Ouvert et généreux, Thunder, Lightning, Strike allait même s’étoffer un an plus tard de trois morceaux additionnels en parfaite harmonie avec les originaux (en partie réenregistrés pour l’occasion avec le groupe nouvellement formé, pour cause de refus d’autorisation pour certains des nombreux samples utilisés par Parton sur la version originale), gagnant encore en richesse et en profondeur de construction. Relativement proches, dans l’esprit, de leurs compatriotes des Avalanches, également ouverts à de multiples influences toujours mises au service de l’inventivité la plus follement personnelle qui soit, The Go ! Team avait même largement dépassé leur chef-d’oeuvre inaugural et toujours sans suite, Since I Left You , en ne laissant jamais l’ensemble, pourtant construit comme un véritable film, prendre le dessus sur les chansons, faisant de chacune d’elle et même de chaque instrumental (la transition Air Raid GTR mise à part, bien sûr) un single potentiel, un morceau de bravoure capable de se suffire à lui-même.

La vidéo de Grip Like A Vice, premier single extrait de Proof Of Youth

Les fans de la première heure attendaient donc fébrilement la suite, le premier album toujours au plus près du coeur et de la platine. Nous étions quelques-uns dans ce cas à la rédaction d’Indie Rock Mag, et heureusement une interview du groupe en juin dernier nous avait permis de ronger un peu notre frein et d’en apprendre davantage sur ce Proof Of Youth si souvent fantasmé, en particulier par les chanceux spectateurs du groupe en concert où une bonne partie des nouveaux morceaux avaient déjà été joués.

La seconde vidéo de Ladyflash, single qui a fait connaître le groupe en 2004

Aujourd’hui 10 septembre, jour duquel je vous écris, le moment est enfin arrivé. L’album est sur le mange-disques, 11 chansons pour 36 minutes (en attendant la version 2.0 ?), la touche "repeat all" enclenchée machinalement. Bien sûr j’aurais pu attendre une semaine, un mois, un an peut-être d’écoutes passionnées dans des circonstances diverses et variées - dans le métro, à la campagne, en voiture, avec ma fiancée, entre amis pendant une soirée bien arrosée, tout seul avec mon casque hi-fi vissé sur la tête, le coeur lourd ou l’esprit léger - mais le résultat aurait été le même. Car après une matinée seulement d’un passage en boucle presque épuisant, mais de la meilleure des fatigues, de celles que l’on ressent après avoir couru cent mètres et rattrapé le bus qui doit nous ramener auprès de celle qu’on aime après le dernier jour de boulot qui nous séparait des congés d’été (oui j’aurais aussi pu dire "après avoir fait l’amour" mais voilà, j’avais promis de ne pas me laisser emporter), je peux d’ores et déjà affirmer que cet album me rendra heureux en toutes circonstances, et pour longtemps.

The Go ! Team : Doing It Right (live @ Coachella, 30-04-2006 ; extrait de Proof Of Youth )

Certes sans doute pas autant que Thunder, Lightning, Strike , dont Proof Of Youth perpétue la recette musicale idéale, la puissance et la formidable densité sonore mais sans en retrouver tout à fait la spontanéité, les vibrations bouleversantes et le génie de construction. La plupart des chansons, c’est vrai, sonnent un peu trop par moments comme des équivalents plus cadrés des précédentes, et surtout toutes ne parviennent pas imposer leurs différences pourtant indéniables, à se démarquer par cette singularité et cette beauté propres qui faisaient de chaque morceau de ce premier album quasi-féérique un compagnon intime capable de s’imprimer durablement sur l’écran en cinémascope de notre imaginaire et même de notre vécu le plus personnel. Mais voilà, le souffle de la musique de The Go ! Team demeure intact, et l’inspiration des anglais toujours aussi fraîche, brillante et débridée.

Ainsi, au rayon des nouveautés, la petite troupe - toujours emmenée par Ian Parton (guitare, harmonica et batterie), et composée de Sam Dook (guitare, banjo et batterie), Ky (alias Chi Fukami Taylor, à la batterie et au chant), Jamie Bell (à la basse), Kaori Tsuchida (qui remplace depuis fin 2006 Silke Steidinger à la guitare, au mélodica et aux claviers) et la charismatique rappeuse Ninja, dont l’énergie et l’enthousiasme communicatifs font pour beaucoup dans la réputation scénique assez extraordinaire forgée par le groupe en tout juste trois ans - s’est faite plaisir en invitant ses amies des Double Duch Divas, collectif de chanteuses et performeuses de jumping selon la technique artistique du "double dutch" (en gros du saut à la corde avec deux cordes, hérité de la culture hip-hop des années 80 et stylisé à l’extrême ; des chants de danseuses de double dutch avaient d’ailleurs été samplés sur Thunder, Lightning, Strike ) à apporter leur contribution vocale à ce nouvel opus aux côtés de Marina Ribatski, chanteuse du groupe électro-funk brésilien Bonde Do Role, de la musicienne néerlandaise Solex et de la chorale prépubère du Rapper’s Delight Club, déjà débauchée de temps à autre par le groupe en concert. Davantage de chant sur Proof Of Youth donc (l’album ne compte même que deux instrumentaux, les lumineux My World et Patricia’s Moving Picture, si l’on fait exception des samples de voix du second), mais surtout les anglais ont sans doute réalisé un vieux rêve en demandant à Chuck D, leader de Public Enemy, de poser son flow sur le formidable Flashlight Fight, ce qu’il a fait totalement en roue libre et avec une classe, une verve et une intensité qu’on ne lui connaissait plus au moins depuis Fear Of A Black Planet . Peut-être le sommet de l’album - juste devant Keys To The City et ses cuivres à la Junior Kickstart qui collent le grand frisson - mais plus encore le morceau qui parvient le mieux à se démarquer, notamment grâce à ce featuring prestigieux, des sonorités de l’album précédent.

The Go ! Team : Junior Kickstart (live @ Coachella, 30-04-2006 ; extrait de Thunder, Lightning, Strike )

Pour le reste, entre hymnes groovy sous amphés et ballades folky plus posées, toujours riches de cette instrumentation métissée et saturée où chaque instrument trouve pourtant sa place comme dans un puzzle parfaitement pensé et où les percus les plus légères côtoient les cuivres les plus grandiloquents, on retrouve The Go ! Team exactement là où on les attendait, ce qui néanmoins devrait suffire à faire de ce Proof Of Youth LA bombe discographique d’une rentrée qui s’annonce pourtant particulièrement riche en surprises comme en réussites attendues.


Pour découvrir Proof Of Youth , rendez-vous sur myspace, l’album y est en ce moment-même en écoute intégrale.

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