12 labels à suivre en 2012 - Tympanik Audio
On a vécu ce cru 2011 au rythme de leurs sorties aussi attachantes qu’exigeantes, et on les suivra assurément de près l’an prochain : petit tour d’horizon, mené jour après jour par leurs patrons eux-mêmes, de ces labels singuliers qui ont marqué notre année musicale et qu’il ne faudra plus lâcher d’une oreille, si ce n’était déjà le cas.
Impossible en 2011, et à plus forte raison en 2012, d’apprécier l’électro cérébrale sans être familier de Tympanik Audio. Véritable rouleau-compresseur aplanissant les barrières élitistes de l’IDM depuis 2007 à coup de sorties aussi exigeantes qu’accessibles (plus d’une quinzaine rien que pour l’année écoulée), l’écurie de Chicago n’en finit plus d’inspirer des vocations, citons notamment Raumklang Music ou plus récemment Tapeface dont les fondateurs respectifs, Dirk Geiger et Tapage, comptent également parmi les beatmakers les plus créatifs du label. Quant à Paul Nielsen, tête pensante d’une structure dont le rayonnement doit beaucoup à la réputation d’artistes tels que Stendeck ou Access ou Arasaka, génies discrets qui ont échoué à naviguer sous le radar là où d’autres tels que Zeller ou Undermathic mériteraient peut-être davantage d’exposition, il a décidément tout compris à ce que devait être l’édition musicale dans le contexte socio-économique actuel comme en témoigne cette courte mais clairvoyante interview.
L’interview
Si vous deviez nous présenter le label en quelques mots, quels seraient-ils ?
De la musique électronique pour le reste d’entre nous. L’idée de Tympanik Audio consiste à brouiller les lignes entre les genres en mêlant beats, atmosphères, accessibilité et expérimentation en un seul et même savoureux ragoût sonique. Nous sommes une famille de musiciens et d’artistes dont le seul but est d’apporter de nouveaux sons innovants aux oreilles des non-initiés.
Comment le contexte économique, technologique et/ou culturel a-t-il influencé votre façon de concevoir l’édition musicale ces dernières années ?
Il est plutôt évident que l’industrie musicale s’est engagée dans l’ère du numérique ces dernières années. Cela a certainement ses bons et ses mauvais côtés. Je trouve ça formidable que tout musicien puisse diffuser sa musique après d’une multitude d’auditeurs sans trop d’effort ni de financement. Mais d’autre part, cela a conduit à un marché excessivement saturé, où ironiquement il semble souvent difficile de se démarquer dans l’océan des bricoleurs numériques.
C’est pourquoi je crois que les formats physiques comme les disques compacts continuent de jouer un rôle important dans la promotion de la musique. Là où un fichier de musique téléchargé est abandonné sur un disque dur avec des dizaines de milliers d’autres fichiers, un CD témoigne au contraire d’une certaine substance et d’un certain mérite dans une collection de musique et c’est quelque chose qu’un auditeur pourra être fier de posséder pour les années à venir. Rappelez-vous quand vos amis débarquaient chez vous et que vous leur montriez vos derniers CDs - je me demande comment ça se traduit ces temps-ci ? "Hé, regarde le fichier informatique que je viens d’acheter - c’est pas génial ?" Pour moi comme pour beaucoup de nos auditeurs, avoir quelque chose de tangible dans nos mains à examiner, apprécier et admirer, ça reste infiniment plus cool que de posséder un autre dossier de fichiers numériques.
J’ai grandi en collectionnant des cassettes, des vinyles, des minidisques et des CDs de sorte qu’il était important pour moi de maintenir Tympanik fermement implanté dans les formats physiques à mesure que le label se développait. Mais le fait demeure : ces jours-ci il semble que beaucoup de nos auditeurs préfèrent la musique digitale, qu’il s’agisse réellement d’achat ou pas, donc j’ai essayé d’être plus ouvert à la promotion de notre musique au format numérique que par le passé, ainsi que d’offrir beaucoup de matériel en libre téléchargement via notre site. Après tout, notre mission première est de présenter la musique de nos artistes au plus grand nombre d’auditeurs possible. Nous allons donc continuer à répondre à la demande digitale, tout en proposant la plupart de nos sorties au format CD - j’ai le sentiment que nous avons atteint un bon équilibre avec ça jusqu’ici. Heureusement, nous avons suffisamment d’auditeurs qui apprécient toujours le packaging CD, donc aussi longtemps que la demande demeure et que les moyens sont là, je continuerai à diffuser nos artistes sur CD tout en m’accommodant de nos auditeurs numérique.
Sur quels aspects voyez-vous le label évoluer en 2012 ?
Développer, affiner et perfectionner sont mes résolutions pour Tympanik cette année. Chaque année, j’essaie d’élever la barre avec les sélections de sorties, l’artwork, la qualité du son, et d’élargir notre base d’auditeurs. Malheureusement, une part de ça équivaut à dire "non" à beaucoup de gens (ce qui est la partie de ce travail que je déteste le plus). Je reçois tellement de bonne musique sur une base cohérente ; beaucoup d’artistes talentueux qui méritent d’être entendus, il n’y a tout simplement pas assez de temps ou de ressources à ma disposition pour sortir tout ça. Donc je vais me concentrer sur l’expansion de ce que nous avons déjà créé et sur l’objectif de toucher davantage d’auditeurs avec nos artistes actuels et leurs sorties.
Quel artiste du label vous a le plus impressionné cette année, et pourquoi ?
Question difficile - à peu près tous nos artistes ont réalisé des choses incroyables en 2011, cependant si je devais en choisir un, j’opterais pour c.db.sn. Ce type est sorti de nulle part ou presque avec un album qui peut à mon avis facilement se mesurer à certains des vétérans du label. Erode est un autre nouvel artiste qui m’a vraiment impressionné. Je dois dire que je suis plutôt fier de tout ce nous avons publié en 2011 en tant qu’ensemble et que je suis impatient que nos auditeurs entendent ce que nous leur réservons en 2012.
Un nom à surveiller de près sur le label l’année prochaine ?
Gardez un œil sur Erode. Attendez-vous également à voir Dirk Geiger atteindre son apogée avec son nouvel album Elf Morgen. Enfin, surveillez les nouvelles sorties d’Autoclav1.1, Disharmony, ESA, Anklebiter, plus quelques surprises cette année aussi.
Un dernier disque à écouter avant la fin du monde ?
Si la fin du monde arrive, je me précipiterai sur l’album de Snog le plus proche à ma portée.
Tympanik Audio en 2011
Un disque : Tapage - Overgrown
Pour sa troisième excursion solo en quatre ans chez Tympanik Audio, Tapage apparaît effectivement grandi, par l’ambition dont fait preuve cet album à tiroirs dans sa progression quasi narrative au chapitrage contrasté mais également par la richesse proprement inouïe des atmosphères et assemblages sonores brassés par le beatmaker néerlandais tout au long d’un dédale sonique qui tient autant de la BO imaginaire que du voyage onirique, à la croisée d’une IDM massive et d’un soundscaping délicat.
Un morceau : Nebulo - Abslog
Pas facile de choisir parmi les 29 inédits et versions alternatives de la gargantuesque compilation Emerging Organisms Vol. 4 venue clore en beauté le cru 2011 de l’écurie de Chicago. Hecq, Architect, Frank Riggio, Displacer, c.db.sn, Anklebiter... les concurrents étaient sérieux et nombreux mais notre choix s’est finalement porté sur le Français Nebulo, pensionnaire du label allemand Hymen Records pour lequel il signait encore l’an dernier en compagnie d’un certain Druc Drac le superbe Urbatectures, inspiré du récit ésotérique et dystopien de La Fièvre d’Urbicande, second tome des Cités Obscures des bédéastes belges Schuiten et Peeters. Un petit chef-d’œuvre d’ambient cinématique et inquiétante dont on vous reparlera sûrement mais en attendant c’est bien ce fantasme de post-dubstep cérébral et labyrinthique digne des plus troublantes abstractions glitchy d’Autechre qui retient toute notre attention et laisse augurer du meilleur quant à la véritable suite du génial Artefact de 2010, d’ores et déjà en chantier.
Une vidéo : Access To Arasaka - Lysithea (feat. Jamie Blacker)
Qui eut cru qu’en laissant éclater l’humanité de ses machines à l’agonie, le New-Yorkais Robert Lioy leur ouvrirait la porte d’une ultime tentative de fusion contre-nature entre la chair triste et le silicone en fusion ? Un expérience vouée à l’échec dont Jamie Blacker (aka ESA) se fait le porte-parole résigné, tragédie flamboyante qu’on aurait aimé voir éclabousser davantage de son génie mutant un Geosynchron certes complexe et ambitieux mais pas toujours aussi brillant que ses prédécesseurs :
Un streaming (du jour) : Erode - Horizon
Car à condition de faire abstraction d’un remix final aux vocalises eurodance plus que dispensables, ce premier opus du guitariste des métalleux allemands Heaven Shall Burn parfaitement représentatif de l’esthétique post-industrielle du label chicagoan, s’il ne fait pas dans la demi-mesure, n’en révèle pas moins autant d’ambition mélodique que de talent pour les progressions lyriques aux confins d’une IDM en clair-obscur et d’un post-rock épique.
Tympanik Audio sur Facebook - Site Officiel - Bandcamp
English version :
If you would have to indroduce the label in a few words, what would they be ?
Electronic music for the rest of us. Tympanik Audio is about blurring the genre lines while blending beats, atmospheres, accessibility, and experimentation into one tasty sonic stew. We’re a family of musicians and artists whose sole purpose is to bring innovative new sounds to the ears of the uninitiated.
How did the economic, technological and/or cultural environment influence your way of thinking about music publishing in the past few years ?
It’s pretty obvious that the music industry has moved into the digital age in recent years. That certainly has its good and bad points. I think it’s great that any musician can get his or her music out to countless listeners with little effort or money. On the other hand, this has led to an exceedingly saturated market where ironically it often seems difficult to stand out amongst the sea of digital DIY-ers.
This is why I believe that physical formats such as compact discs still play an important role in music promotion. Where a downloaded music file gets dropped onto a hard drive with tens of thousands of other files, a CD demonstrates a certain substance and merit in a music collection and something a listener can be proud of owning for years to come. Remember when your friends use to come over and you’d show them your newest CDs - I wonder how that would play out these days ? "Hey, check out this computer file I have - isn’t it awesome !?" For myself and many of our listeners, having something tangible in our hands to examine, enjoy, and admire, is far cooler than owning another folder of computer files.
I grew up collecting tapes, vinyl, minidiscs, and compact discs so it was important for me to keep Tympanik planted firmly in physical media formats as the label developed. But the fact remains : these days it seems that many of our listeners prefer digital music, whether they actually purchase it or not, so I’ve tried to be more open to promoting our music digitally than before, as well as offer a lot of free digital material through our website. Our primary mission is, after all, to present our artist’s music to as many listeners as possible. So we will continue to meet the digital demand while still offering most of our releases in compact disc format - I feel we’ve achieved a good balance with this so far. Fortunately we have enough listeners who still appreciate the compact disc package, so as long as the demand remains and the means are present, I’ll continue to release our artists on CD while accommodating our digital listeners.
In which ways could the label evolve in 2012 ?
Expand, refine, and perfect are my resolutions for Tympanik this year. Each year I set out to raise the bar with the release selections, artwork, sound quality, and expanding our listener base. Unfortunately part of that means saying "no" to a lot of people (which is the part of this job I hate the most). I receive so much good music on a consistent basis ; a lot of talented artists who deserve to be heard, there just isn’t enough time or resources at my disposal to release it all. So, I’m going to concentrate on expanding what we’ve already created and focus on reaching more listeners with our existing artist roster and releases.
Which artist from the label impressed you the most in 2011, and why ?
Tough question - just about every artist on our roster did some amazing things in 2011, however if I had to pick one I’d go with c.db.sn. This guy pretty much came out of nowhere with an album that can easily stack up to even some of the veterans in our roster in my opinion. Erode was another new artist that really impressed me. I have to say that I’m rather proud of everything we released in 2011 overall and I’m anxious for our listeners to hear what we have in store for them in 2012.
A name to watch closely on the label next year ?
Keep an eye on Erode. Also expect Dirk Geiger to really hit his stride this year with his new album Elf Morgen. Watch for new releases by Autoclav1.1, Disharmony, ESA, Anklebiter, and quite a few surprises this year as well.
A final record to listen to before the world ends ?
If it’s the end of the world, I’ll be reaching for the nearest Snog CD.
Access To Arasaka sur IRM - Myspace - Site Officiel
Dirk Geiger sur IRM - Myspace - Site Officiel - Bandcamp
Tapage sur IRM - Myspace - Bandcamp - Site Officiel
Nebulo sur IRM - Myspace - Bandcamp
Erode sur IRM
c.db.sn sur IRM
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- Sulfure Session #2 : The Eye of Time (France) - Le Vent Se Lève, 3/02/2019
- Aidan Baker + The Eye of Time (concert IRM / Dcalc - intro du Sulfure Festival) - Le Vent Se Lève (Paris)
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- Senyawa - Vajranala
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