De discrets beats résolument downtempo, des nappes synthétiques lumineuses et luxuriantes, des voix souvent féminines hésitant entre plainte et mélancolie. Le tableau n’invite pas franchement à l’optimisme et pourtant, quelque chose de radieux émane de Floating Away From The World.

Le cinquième disque de Gregory Pappas sous l’alias OKADA évoque la fuite et la migration. A commencer par la sienne, lui qui a choisi de quitter l’Alabama pour s’établir à Seattle. Mais également celle de ces individus condamnés à fuir leur terre originelle pour des contrées qui ne les désirent pas toujours.

Un tel départ constitue bien souvent une nouvelle phase dans une vie. A la crainte de l’inconnu se mêle parfois - lorsque, comme pour Gregory Pappas, la migration n’est pas imposée par un horrible contexte - l’excitation propre à ces nouveaux départs objets de tous les fantasmes.

La noirceur côtoie donc l’allégresse sur cette troisième sortie d’OKADA adoubée par l’excellent label n5md. En intégrant quelques drones à des plages ambient teintées de voix féminines désenchantées (Shredded Remains of Hope) ou autres field recordings (Don’t Come Any Closer), l’Américain propose quatre pistes au long cours (les trois premières approchent le quart d’heure quand la dernière s’étend sur vingt-deux minutes) hantées par des nappes élégiaques et quelques accords délicats de piano.

La spiritualité et la recherche de l’apaisement semblent correspondre aux questions qui animent l’artiste et elles trouvent un profond écho dans les compositions qu’il décline. A l’image de cette jeune femme en gros plan sur la pochette à laquelle il est bien difficile de donner un âge et qui se cache derrière une chevelure abondante, Floating Away From The World évolue sur la paradoxale quête d’exposition de ceux qui ont pris l’habitude de faire preuve de retenue. Un disque à la dimension narrative évidente qui invite l’auditeur à prendre son temps et, dans un relatif isolement, à s’intéresser davantage à lui-même.