La sortie la plus convaincante de Nadja cette année est également la plus OVNIesque dans tous les sens du terme, collaboration aux allures de supernova en éruption avec les Italiens Matteo "Napo" Palma et Riccardo "Rico" Gamondi aka Uochi Toki, coutumiers d’une électronique radicale et déstructurée d’où surgit un spoken word surréaliste et habité.

Sur ces jams enregistrés live l’an dernier par le quatuor dans un studio du Piémont, les drums lo-fi et downtempo de Rico passent au second plan des flux de drones magnétiques agencés par les Canadiens que le bidouilleur transalpin manipule en direct, tandis que son compère Napo déclame avec fébrilité dans un télescopage de langues difficile à cerner. Son histoire prend place dans un futur où, un peu comme sur l’album, humains et machines ont appris à cohabiter sans hiérarchie. C’est pourtant une créature humanoïde du troisième type en pleine migration spatiale, une ningen, qui se voit raconter par l’AI en charge du vaisseau, dans ce même puzzle de sonorités recomposé d’après les vestiges linguistiques de nos anciens réseaux informatiques, l’histoire du système solaire et la quête de cette nouvelle cyberhumanité pour l’origine de toute matière.

Sorti chez Corpoc, studio sérigraphique devenu label à ses heures, Cystema Solari trouve ainsi sa pleine dimension en vinyle, matériau-source de l’enregistrement moderne mais surtout médium idéal pour véhiculer l’imagerie SF cosmogonique du graphiste Lapis Niger accompagnant sur un livret de 8 pages cette odyssée ambient/noise/rap, qui culmine sur les 17 minutes d’une véritable tempête solaire où les guitare et basse d’Aidan Baker et Leah Buckareff épousent peu à peu la pesanteur des beats industriels pour mieux les engloutir et construire sur leurs ruines un mur de saturations infini. Impressionnant !