L’Etrangleuse - Memories To Come

1. Do I
2. Then I Try
3. Doesn’t Matter
4. Coincidence
5. L’Un Languit
6. Noise/Silence
7. Drifting Around
8. Ed
9. Who We Are
10. Caged Bird

2015 - L’Autre Distribution

Sortie le : 11 décembre 2015

L’Etrangleuse

La strangulation consiste à serrer le cou pour comprimer les artères carotides ou la trachée, ceci ayant pour effet, avant même d’engendrer un éventuel évanouissement voire la mort, de réduire à néant l’action des cordes vocales.

Les cordes, sur Memories To Come, sont omniprésentes. Déjà auteur d’un premier album éponyme en 2012, L’Etrangleuse se compose de la harpiste Mélanie Virot et du guitariste électrique Maël Salètes, ancien membre d’Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp.

Sur ce nouvel opus, le duo privilégie la langue de Shakespeare. Un choix pas tout à fait dénué de sens lorsque l’on s’intéresse aux conditions d’enregistrement de l’album, puisque les Lyonnais ont fait appel à l’Anglo-Saxon John Parish, à qui l’on doit la production de certains opus de PJ Harvey, Eels ou Sparklehorse. Le natif de Yeovil officie même en tant que musicien sur huit des dix morceaux de Memories To Come, essentiellement derrière les fûts, mais également à la basse ou au piano, apportant ainsi une diversité à l’éventail des cordes utilisées.

Il serait néanmoins regrettable de réduire l’intérêt de ce disque à la présence de l’illustre Anglais. En effet, le duo hexagonal garde la mainmise sur le contenu musical, sans qu’aucun des deux artistes ne prenne le dessus sur l’autre. A l’image du Do I introductif, harpe et guitare électrique marient habilement leurs efforts, affichant une complémentarité évidente qui ne masque pas pour autant la singularité de chacun des instruments.

L’utilisation de la harpe évoque les travaux de Joanna Newsom ou de Lidwine. Le mariage de l’univers plutôt classique de Mélanie Virot – elle a suivi un cursus au conservatoire – et du rock brut de Maël Salètes permet néanmoins d’accoucher d’ambiances variées, mêlant différents courants allant de la world au rock, en passant par la folk et le post-rock. Des réminiscences de Tinariwen apparaîtront ainsi ici et là (Doesn’t Matter), au milieu de chœurs que ne renieraient probablement pas A Silver Mt Zion Memorial Orchestra (Who We Are). L’utilisation occasionnelle d’un timbre rappelant celui de Nick Cave est également privilégiée sur le Caged Bird final, alors que l’on assiste à un bel exemple de fusion aboutie sur Noise/SilenceL’Etrangleuse ressuscite le Esbjörn Svensson Trio dans une veine plus brute.

L’Etrangleuse sait donc brillamment s’entourer – pour mieux nous enlacer ? – et évoque ici et là de glorieux aînés. Mais la plus grande réussite du disque réside probablement dans l’harmonie qui se dégage de chacun des instruments, et de la maîtrise des (du ?) temps. La gestion de ceux-ci touche au sublime, si bien que les silences constitueraient presque une piste instrumentale à part entière.


( Elnorton )

Disques - 27.10.2015 par Elnorton