The Marigold - Tajga
Avec Tajga, son deuxième long format, The Marigold revisite les années 80 en injectant des guitares shoegaze élégantes dans son post-punk glacial et sombre.
1. Exemple De Violence
2. Tundra
3. Swallow
4. Eleven Years
5. Sin
6. Tajga
7. Degrees
8. Novole
9. Alone
On n’est pas ici pour faire du prosélytisme, mais quand même il faut bien le dire, il se passe des choses vraiment intéressantes du côté d’Acid Cobra, le label créé, rappelons-le, par Amaury Cambuzat d’Ulan Bator. On ne reviendra pas sur les raisons qui l’ont mené à se lancer dans l’aventure (voire le sacerdoce) de la gestion d’un label, mais il est quand même bon de rappeler que son catalogue est des plus cohérents et qu’il devrait attirer à lui tous les amateurs de musiques racées. Car outre la noise protéiforme de Sexy Rexy, on y trouve le post-punk élégant de leurs compatriotes The Marigold. Le disque n’est certes pas nouveau, il est même sorti fin 2009 mais c’est qu’il retrouve assez régulièrement une place à proximité de la platine. Car après un Erotomania encore trop dominé par l’ombre écrasante de The Cure, le groupe a su faire évoluer son style. Sur Tajga, bien que l’on devine encore très fortement les fantômes chers à Robert Smith, The Marigold trouve une voie ténue (mais qui existe bel et bien) entre la pop arachnéenne caractéristique du groupe précité et une inspiration shoegaze très affirmée.
C’est que les guitares sont à l’honneur sur Tajga et qu’elles adoptent un grain particulier ainsi qu’un certain lyrisme noir qui fit les beaux jours des ‘80s agonisantes et du début des ‘90s. Pour autant, il ne s’agit pas là d’un exercice de style : derrière chaque morceau, on sent clairement à la fois la sincérité et le talent de composition bien réel du groupe. Et même si cette musique tendue et sombre a déjà été entendue par ailleurs, The Marigold possède une personnalité qui lui est propre : leur cocktail cold wave riche en guitares et harmonies noisy montre des éléments très contemporains, en témoignent les quelques passages presque ambient en fin d’album et ce piano fantomatique qui apparaît par intermittence sur le disque.
Derrière The Marigold se cachent la voix grave et solennelle de Marco Campitelli (guitare, claviers et violon), les doigts agiles de Stefano Micolucci (basse) et les muscles de Giovanni Lanci (batterie et percussions), parfois épaulés (une fois n’est pas coutume) par le savoir-faire instrumental d’Amaury Cambuzat et le piano grave et mélancolique de Daniele Carretti. On trouve sur Tajga beaucoup de beaux morceaux portés par des arrangements idoines, des guitares carillonnantes et délicates de Tundra aux chœurs singuliers qui accompagnent la progression rampante de Sin et même un Swallow qui convoque crânement les ondes de My Bloody Valentine. Le tempo est lent, la mélancolie acerbe et l’ensemble très homogène.
Tajga n’est bien sûr pas exempt de maladresses, il faudra notamment que le groupe se défasse des ombres tutélaires qui sont les siennes, d’autant plus qu’il possède un réel talent pour trousser des mélodies qui restent en tête, toutefois (et pour peu que l’on goûte au style développé sur l’album) la formule est assez maîtrisée pour que chacun puisse y trouver facilement son bonheur. Ainsi, comment ne pas succomber au charme d’un morceau comme Degrees qui débute par quelques notes martelées de piano et se meut progressivement en mur de guitares noise ou encore à Un Exemple De Violence, seul titre chanté en français qui évoque de loin la tension d’un Ulan Bator squelettique. Sans oublier ces chœurs polyphoniques parsemés ici ou là, ces lignes de basse efficaces et élégantes un peu partout et puis toujours cette voix étranglée : incontestablement, The Marigold possède de vrais arguments.
Souhaitons à Acid Cobra de continuer ainsi à creuser son sillon et au groupe de parfaire les ombres glacées qui, souvent sur Tajga, n’appartiennent finalement qu’à lui.
Élégant et froid, sombre et habité.
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