Enthroned + Panchrysia + Cult Of Erinyes - Magasin4 (Bruxelles)

le 23/03/2012

Enthroned + Panchrysia + Cult Of Erinyes - Magasin4 (Bruxelles)

Depuis le début des années 90, une vague de crimes sans précédent a déferlé sur la surface du globe tout entier. Phénomènes initialement circonscrits à la Norvège seule, des cas similaires se retrouvent aujourd’hui un peu partout dans le monde. Sur ces faits, dans le but d’endiguer cette menace persistante, une équipe d’enquêteurs chevronnés a été mise sur pied. Elle s’est vue attribuer la dangereuse tâche de surveiller étroitement les agissements des présumés instigateurs.

Ces troubles majeurs n’ont évidemment pas épargné notre cher pays. Selon certaines sources confidentielles, Enthroned serait un des principaux meneurs. Mais il n’est pas le seul mis en cause, les noms de Cult Of Erinyes et Panchrysia sont également avancés. En cet instant même, une enquête est d’ailleurs menée à leur encontre.

Pour conduire l’instruction, j’ai personnellement dépêché un collègue inspecteur (que nous nommerons ici Morholt afin de préserver son identité secrète). Celui-ci suit leurs faits et gestes à la trace depuis un temps déjà et a donc une solide connaissance du dossier présent, davantage que moi en somme. Par conséquent, il a toute ma confiance pour le cas qui nous occupe.

Au terme de son investigation, voici les conclusions que son œil expert et alerte m’a rapportées :

« Soirée 100% black metal belge ce vendredi 23 mars au Magasin4. Enthroned, tête de gondole de la scène belge depuis près de vingt ans, fêtait la sortie de son neuvième album, Obsidium, paru officiellement trois jours plus tôt.

Fan du groupe depuis Towards The Skullthrone Of Satan (1997), album qui avait marqué l’arrivée de Nornagest, aujourd’hui leader de la formation, j’avais, je l’avoue, un peu boudé Enthroned dès le départ de Sabathan. Qui pouvait en effet valablement reprendre le flambeau du vocaliste / bassiste, seul membre-fondateur restant ? Mais bon, le concert ayant lieu près de chez moi, je me suis dit que j’en profiterais pour faire la chasse aux préjugés…

Deux groupes assuraient la première partie de la soirée. Cult Of Erinyes est une mystérieuse formation bruxelloise dont le premier album, A Place To Call My Unknown, est sorti il y a tout juste un an.

Pas de lumière, quelques images sombres projetées sur un écran, Corvus, Baal et Mastema, les trois membres du groupe, montent sur scène le visage caché par la capuche de leur robe de bure. Belle tentative pour installer une ambiance mystique mais… pas très originale. Un peu à l’image de leur musique, un black froid mais banal et répétitif, déjà entendu mille fois. Seul le chanteur tire son épingle du jeu, avec une voix puissante et prenante. Dommage qu’il ne nous ait pas fait bénéficier de sa voix claire, que l’on peut entendre sur certains passages de l’album et qui apporte un plus.

Arrive ensuite Panchrysia, groupe plus confirmé celui-là, selon moi le meilleur moment de la soirée. Un black qui, sans atteindre le même niveau, nous rappelle les heures glorieuses de Satyricon et du regretté Emperor. Des musiciens bien en place, un son correct, ce dont les deux autres groupes n’auront malheureusement pas bénéficié.

Fait étonnant, la prestation de Zahrim, le chanteur, m’a fait remarquer que, parfois, la frontière entre le charisme et le ridicule peut être ténue, je ne sais toujours pas de quel côté de la ligne le situer. Mais peu importe, même si ses expressions grimaçantes et ses poses, dont quelques-unes m’ont fait penser à certains personnages des fresques de l’Egypte ancienne (vous savez, ces poses figées, de profil, les bras ouverts), peuvent prêter à sourire, il assure le show et fait finalement tout l’intérêt visuel du groupe. Bref, dans l’ensemble, une bonne prestation.

Les candélabres sont posés de part et d’autre de la scène, un drapeau avec un pentacle recouvre l’avant du podium sur lequel la batterie est installée, un bol rempli de (faux ?) sang est posé sur le symbole du Diable, l’odeur capiteuse de l’encens parvient à nos narines. Il y a comme une ambiance de messe noire lorsque les musiciens d’Enthroned montent sur scène.

Pour que ce genre de mise en scène éculée ait encore son effet, il faut qu’elle soit impressionnante, que les musiciens aient du charisme et parviennent à installer une atmosphère. Et là où les Suédois de Watain m’avaient impressionné malgré que, peu attiré par leur musique sur album, j’avais été voir leur show par simple curiosité, j’ai trouvé Enthroned assez ennuyeux. Le groupe a troqué l’ambiance sauvage et puissante, "evil", des concerts avec Sabathan contre une atmosphère mystique qui fait flop aux yeux du vieux métalleux que je suis, sans doute blasé, au bout de vingt ans, par le folklore satanico-grand-guignolesque. Même si je sais que Nornagest prend les sciences occultes très ou trop au sérieux, il en faut plus pour m’impressionner.

Ce concert, dix ans après avoir vu Enthroned sur scène pour la dernière fois, est pour moi la confirmation que Sabathan, dont la voix, aiguë et criarde, résonnait dans la salle comme une âme maudite du fin fond des Enfers, était l’énergie du groupe. Et l’on sait que la nostalgie est souvent l’essence même du fan de metal…

Musicalement, il était difficile de se faire une idée des nouveaux titres, que nous ne connaissions pas encore, car, comme je l’ai déjà dit, la qualité du son, brouillon, ne fut pas au rendez-vous. Les mélodies de guitares étaient quasi inaudibles, il m’a même fallu quelques secondes pour reconnaître certains classiques. Pourtant, maintenant que je l’écoute (j’aime, pendant que j’écris une chronique de concert, me remettre dans l’ambiance du groupe en me mettant sa musique dans les oreilles), le dernier album ne me semble pas si mal, meilleur que les deux derniers, je dirais. Mais là, ce concert fut une mauvaise pub pour le lancement d’ Obsidium.

Cette soirée a donc été pour moi la preuve que certains préjugés sont tenaces, que certains sont infondés et d’autres… justifiés. »

Voilà donc les conclusions de Morholt. Je m’en vais de ce pas les rapporter à mes supérieurs. A eux de décider si les mises en accusation à l’encontre de ces groupuscules doivent être maintenues ou abandonnées.


( L’Oxymore et Morholt )

 


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