Mendelson - s/t

CD 1 :

1. La force quotidienne du mal
2. D’un coup
3. Une seconde vie
4. Avant la fin
5. Il n’y a pas d’autre rêve

CD 2 :

1. Les heures

CD 3 :

1. Ville nouvelle
2. Une autre histoire
3. Le jour où
4. L’échelle sociale
5. Je serais absent

2013 - Ici D’Ailleurs

Sortie le : 6 mai 2013

Mendelson

Un nouvel album de Mendelson reste toujours un événement, puisqu’il s’est écoulé 5 ans entre Personne Ne Le Fera Pour Nous et cet éponyme. La formation de Pascal Bouaziz, de par sa rareté et la radicalité de son propos, dernier bastion du feu label Lithium, nous a déjà offert une discographie exigeante et unique dans nos contrées.
Mais avec cet album, le groupe pose une marque indélébile dans le paysage français, avec l’impression rare d’avoir entendu une musique neuve et novatrice. Bien qu’à travers ses portraits glacials esquissés depuis plus de 15 ans, Mendelson n’a jamais recherché à enjoliver la réalité ou arrondir les angles, on ne s’attendait pas à une œuvre d’une noirceur pareille, cathartique jusqu’au-boutisme.

Les motifs habituels du chanteur, bien qu’il s’en défende (exclusion sociale ou affective, la médiocrité des relations humaines, etc.), sont appuyés par une musique qui se veut à la fois anti-mélodique et prégnante sur l’interprétation des textes, proche par moment de la noise, la musique contemporaine, le free jazz ou encore Pornography de The Cure (surtout sur Une Seconde Vie).
On est proche de la poésie sonore, un procédé qu’avait déjà expérimenté Mendelson sur un texte d’Olivia Rosenthal sur la compilation Fantaisie Littéraire. Pour autant, la musique ne sert jamais d’habillage ou de faire-valoir aux textes de Bouaziz, et bien qu’il est difficile par moments de savoir si on est encore vraiment dans de la « chanson », notamment sur le dantesque Les Heures (1h !), il est évident que l’expérience n’a pas du tout pour but l’hybridation, à la manière d’un Burgalat avec Houellebecq.

Mais la plus grande force de cet album, c’est que malgré sa noirceur et son approche musicale peu engageante, il dégage une humanité troublante et rassurante. Cet album raconte quelque chose sur ce que nous sommes devenus, sur la société, sur notre rapport et notre façon d’interpréter le monde. Une aura difficile à décrire sans utiliser un oxymore, une noirceur étincelante.
Son caractère brut lui confère une pureté, une véracité qu’un traitement plus lisse aurait atténuée. Bouaziz est peut-être l’inventeur du documentaire sonore, une vision, une interprétation du monde basée directement sur le réel. On n’a jamais mieux raconté la tristesse de vivre en périphérie que lui, au sens propre comme au figuré. Olivier Adam à d’ailleurs dit qu’il était le plus grand écrivain français, sans n’avoir jamais pourtant écrit un seul livre.

A cet effet, le morceau qui ouvre l’album, La Force Quotidienne Du Mal, est assez révélateur de cette humanité larvée au sein d’un pessimiste seulement apparent. Dès que le piano se déploie, Bouaziz arrive, avec quelques mots, une simple énumération, à toucher du doigt une vérité d’une justesse désarmante. C’est cette alchimie, indéfinissable, qui fait du dernier Mendelson une œuvre unique.
Mais heureusement, entre les plongés en apnée et les climats anxiogènes de morceaux comme L’Echelle Sociale ou Avant La Fin, on retrouve des morceaux plus « classiques » aux compostions plus ouvertes, rappelant les grands espaces chers à Bashung (Un Coup, Il n’y a pas d’autre rêve) ou encore le rêveur Je Serais Absent.

Radical et ambitieux, le dernier Mendelson se hisse à la hauteur des plus grands, et comme l’un des meilleurs albums jamais sortis en France. A la fois en tant que proposition esthétique majeure et innovante, mais surtout de la façon dont il nous interroge et interroge le monde. Il y aura un avant et un après...


( John Trent )

Disques - 09.05.2013 par RabbitInYourHeadlights
 


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