Goodbye Diana - Goodbye Diana

Nouvelle sortie du label Head Records, dont on se régale encore du dernier Pneu, ce second album (après un premier EP déjà prometteur) confirme le talent de ce trio montpelliérain adepte d’un rock instrumental instruit, qui manie l’envolée lyrique exaltante pour mieux asséner, en douce, ses implacables coups de marteaux derrière le crâne ! Goodbye Diana, c’est un talent monstre au service d’une musique géniale.

1. Yvon de chalon
2. Moustache (34)
3. Le Chat noir
4. Gégé (28)
5. Poilus (72)
6. Robert Fripp en cagoule
7. Jean Pierre
8. Herbert d’autoroute
9. Alan Biquet
10. Chuck Norris is Fucked

date de sortie : 20-04-2015 Label : Head Records

Cette musique que l’on pouvait simplement qualifier de post-hardcore instrumental à ses débuts est désormais plus fidèlement circonscrite par les étiquettes "post-rock noisy" ou "math rock". En effet, on suppose qu’un esprit rigoureux doit être à l’origine de ces inventions alambiquées, écrites avec une lucidité de logicien. Des morceaux à l’évidence rock qui se colorent d’harmonies jazz à l’occasion de conclusions mélodiques ingénieuses. Goodbye Diana sait se faire percutant tout en s’ouvrant à des moments lumineux et poétiques (Moustache (34) ou Robert Fripp en cagoule, par exemple). C’est ce mixte savant et sensible qui fait la force et l’élégance des morceaux de cet album.


La musique de Goodbye Diana impressionne par sa richesse à la fois mélodique et rythmique. Elle repose sur de fines variations à partir de motifs mélodiques qui, peu à peu, s’allongent, menant vers des sentiers obliques, dont la luminosité nouvelle donne au morceau une teinte originale. C’est bien le registre de la lumière qui s’impose pour décrire ce rock instrumental rayonnant. La frappe saccadée du batteur, toute en syncopes, fait clignoter les feux puissants de son socle rythmique. Des farandoles d’arpèges de guitare éclairent les allées régulières dessinées par la basse. Ombres et lumières se déploient sous nos yeux rêveurs à l’écoute de cet album qui ne laisse pas de répit et stimule, à chaque début de morceau, une nouvelle partie de notre cerveau.




L’absurdité des titres contraste avec la complexité qui se dégage de l’écriture, appuyée par une maîtrise technique impressionnante. En concert, cette maîtrise se manifeste par le calme et la sobriété avec lesquels les membres de Goobye Diana interprètent leurs morceaux. Un groupe qui se donne à fond sans renfort de gestes inutiles pour être à la fois au plus près de l’écriture et de l’intensité nécessaire. Une musique qui rappelle souvent Don Caballero, les maîtres du genre, ou un Do Make Say Think viril, avec ses harmonies romantiques, lorsqu’elle s’évade vers des contrées plus nettement post-rock. C’est un papa à la fois sévère et tendre, qui te met gratuitement une grande torgnole pour mieux te consoler avec un affectueux câlin...


Par rapport à son prédécesseur, ce nouvel album a un son plus rond, moins rêche, ce qui met en relief la virtuosité du jeu des musiciens, notamment celui du guitariste, qui tricote ses gracieux chandails avec une facilité déconcertante. La structure de l’album est à peu près identique. Avec sa dizaine de morceaux, ici un peu plus longs (à l’image du supplément d’intelligence suscité pour l’invention de ces structures à tiroirs et à double fond) et son dernier morceau bien plus long que les autres, ici nettement plus progressif, témoignant ainsi d’une intention post-rock plus évidente.




Certaines mélodies sont à tomber. Comme ce moment sur Chuck Norris is Fucked où la mélodie et le rythme, entremêlés dans un motif répété, ouvrent une brèche de mélancolie. Ce moment, suivi d’une série de riffs, tous aussi bien amenés, conduit l’auditeur dans un univers rempli d’espoir, avant de l’entraîner dans une chute mystique, faite de paroles obscures psalmodiées sur un fond de delay de guitare hypnotisant, traversé de grincements et de vrombissements.


C’est sur cette note sombre que se conclut cet album éponyme qui constitue une carte d’identité idéale pour ce trio au sommet de son art.

Chroniques - 28.04.2015 par Le Crapaud