Le streaming du jour #1349 : Trivo - ’Marthas Halle Original Soundtrack’
En 2012, alors qu’il participait au volet Clashes de notre compilation, nous avions promis d’être plus réactifs pour relayer la prochaine sortie de Trivo. Pour autant, alors que près de trois ans avaient été nécessaires pour que nous encensions le chef-d’œuvre Emoterapia, c’est avec un nouveau décalage que nous célébrons le nouvel effort de l’italien.
Pour notre défense, le Magnitudo annoncé comme imminent par Rocco Triventi n’a toujours pas fait l’objet d’une sortie effective. C’est avec une très courte - treize minutes - bande originale que l’on retrouve le natif de Foggia.
Celle-ci a constitué l’un des supports musicaux d’un projet initié par le photographe Savino Ficco et baptisé Marthas Halle du nom de la tueur en série du film italien Profondo Rosso (Deep Red). Spectacle polyvalent, l’idée consistait à conjuguer pendant près de dix jours l’itinérance en exposant à Rome, Turin, Bologne ainsi qu’Athènes, et la pluridisciplinarité. En effet, durant les représentations, chaque photographie de Ficco est associée à une composition musicale (assurées, en plus de Trivo, par Giovanni Mastrangelo et Andyustrial) ainsi qu’un monologue signé Donatella Damato ou tiré de l’œuvre de Lautréamont, Shakespeare ou Sade.
Revenons à la contribution de Trivo. Celle-ci est particulièrement déroutante en ce sens que l’Italien s’éloigne ici de l’univers lo-fi de Daniel Johnston ou Sparklehorse, prégnant sur Emoterapia, pour explorer des contrées aux sonorités bien distinctes.
Schatten débute ainsi par une boîte à musique sur laquelle se greffe rapidement de manière dissonante une seconde mélodie qui, bientôt accompagnée par une boîte à rythmes, prend le dessus de telle manière que l’influence de Boards of Canada devient perceptible.
C’est ensuite une kosmische musik hantée, évoquant l’éponyme de Last Ex, side project de deux membres de Timber Timbre, qui est proposée sur un Martha qui admet quelques accents Warpiens dans ses sonorités électroniques adjacentes.
L’Italien ne s’arrête pas en si bon chemin puisque Toys In The Attick, probablement le titre le plus expérimental et déroutant, s’appuie sur des gémissements torturés et massacrés pour faire résonner à merveille une atmosphère d’épouvante. Trivo achève ce disque (et nous par la même occasion) avec un Knife Edge sur lequel errent conjointement un couteau qui s’aiguise et un train qui ne cesse de défiler. Est-ce réellement de cela qu’il s’agit, ou l’artiste nous plonge-t-il dans une illusion ? Sans avoir le temps d’y penser, les drones apparaissent et envahissent l’espace avant d’être relégués en arrière-plan par une nuée d’effets circulaires.
Si Trivo, autant que nous pour relayer ses compositions, aime prendre son temps, c’est sans doute parce qu’il refuse de se répéter et de tourner en rond. Cela ne fait que renforcer notre attente concernant un successeur d’Emoterapia qui commence à prendre des allures d’arlésienne.
Les photographies ayant inspirées les compositions sont également disponibles ici.
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