Un an et demi après le "chamanisme de chambre" d’un Unfold quelque peu en retrait, les génies australiens du jazz freeform sont de retour au top avec un disque toujours aussi atmosphérique et mouvant mais particulièrement percussif et hypnotique cette fois, si bien que ce Body a finalement autant à voir avec le krautrock ou les serpentins post-ambient d’un Oren Ambarchi.

Après un premier mouvement où pianotages impressionnistes et percussions martiales évoluent de concert sur fond de basses profondes, guitare transcendantale et orgue psychotrope font ainsi leur apparition et surgie de nulle part une batterie incandescente fait basculer ce titre unique de près d’une heure dans un grand bain de rock psychédélique entêtant. Décomposé en quatre mouvements que le trio décrit comme suit : "Episodic, Driving, Dynamic, Layered, Celebratory, Soaring, Rocking out, Buoyant, Sustained, Perfectly paced", Body doit beaucoup à l’omniprésent Tony Buck en charge des fûts et de la 6-cordes, les interventions au piano plus ou moins discrètes de Chris Abrahams assurant tout de même la signature du groupe dans les moments les plus atypiques de ce 20e opus en 30 ans.

Presque hymnique, ce long passage ardent et habité couvre tout le milieu d’album, s’étoffant peu à peu au second plan d’arrangements très denses de guitare dissonante et de piano rythmique, puis mue en ce que le trio sait faire de mieux, cet ambient jazz solennel et mystique où accords de piano sépulcraux, idiophones ballotés par le vent, nappes de drones évanescents et tension feutrée des percussions convoquent un univers cinématographique aussi mélancolique qu’inquiétant, renouant avec l’excellence et l’expressionnisme saisissant du récent Vertigo via une progression finale hallucinée.

L’un des grands albums de l’été, voire de l’année.