21 enregistrements pour 2021 (1/3)

Trois volets composés de sept cartouches pour illustrer cette année 2021, cela fait vingt-et-un albums, sortis en physique ou en numérique, pour des labels affirmés ou autoproduits, et brassant des horizons variés. Le premier de ces trois articles se centre sur les EPs et autres sorties atypiques, et les deux suivants, sur les quatorze longs-formats qui auront fait mon année 2021.


Top EPs


5. Konejo - Some Light EP


Il enchaîne les disques comme il écrivait auparavant les chroniques dans ces mêmes colonnes : avec passion, efficacité et à un rythme effréné. Konejo accumule les sorties comme autant d’expérimentations, que ce soit en solo ou auprès de ses compères Eddie Palmer, OTRO SLVANI, B-Maltais ou Valgidrà. Sur Some Light, paru au mois d’avril, le Français trouvait un bel équilibre entre expérimentations minimalistes (Celestial Puppets) et mélodies limpides (Time To Find Each Other Again). Efficace, nous disions, et toujours audacieux.

4. Leonis - Leonis x Jonwayne EP


N’ayons pas peur des mots, Leonis est un génie (trop) méconnu. Deux ans après avoir réinventé le I’ll Sleep When You’re Dead de El-P en créant une nouvelle instrumentation pour chacun des titres en soutien du flow du rappeur, le voici qui récidive avec un EP répétant la même démarche en compilant, cette fois, quatre morceaux partagés en 2016 par le rappeur américain Jonwayne. Chacun d’entre eux étant publié avec des versions a capella, Leonis a pu bénéficier d’une matière première intéressante pour transcender des productions initialement minimalistes en d’évidentes et puissantes missives (Jump Shot et Winks) ou des titres mélancoliques néanmoins métamorphosés (That’s Ok et Wonka). Brillant travail qui va au-delà de l’exercice de style pour proposer un contenu profond et hypnagogique.

3. Abraham Fogg - Metamorphosis EP


Si le long-format sorti plus tard dans l’année nous a laissés de marbre, l’EP Metamorphosis sorti par Abraham Fogg figure parmi les plus belles sorties de 2021. En seulement deux titres, cet ovni mêlant des instruments baroques à une construction qui pourrait plutôt lorgner du côté de l’IDM n’est pas sans rappeler certaines des fulgurances de Chapelier Fou. Du haut niveau, particulièrement sur Le Vol Des Sorcières, l’un des titres les plus enthousiasmants et stimulants de l’année.

2. Christophe Bailleau & Friends - Persistance EP


Il n’est jamais simple de parler d’un disque soutenu par le netlabel affilié à notre webzine. Néanmoins, si nous avons fait le choix de défendre le dernier EP de Christophe Bailleau, c’est bien parce que nous étions convaincus de ses immenses qualités. Dès la première écoute, les poils se hérissent, les frissons apparaissent et les textures subtilement arrangées sauront satisfaire l’auditeur habitué aux abstractions ambient cristallines. Le concept de l’EP consiste à inviter un partenaire sur chacun des titres, et l’on se délectera tour à tour de l’irruption inattendue mais jouissive des arpeggiators sur 77 Affairs avec Paradise Now, des circonvolutions électroniques de Jules Nerbard sur Perhaps ou de celles, plus rythmiques et hantées, de A Limb sur 11H60. Mais c’est évidemment à l’habileté et à l’élégance de Christophe Bailleau que Persistance doit son caractère envoûtant, le Français basé en Belgique ouvrant les vannes en grand au point de faire le grand écart entre Tangerine Dream et Aphex Twin sans jamais perdre son à-propos. La virtuosité au sens large.

1. DJ Abilities - Phonograph Phoenix EP


EP mélangeur au possible, Phonograph Phoenix ne réinvente pas les codes d’un hip-hop à tendance abstract bien ancré dans les années 90 puisque les basses lourdes, le scratching, les beats lancinants et un flow virevoltant sont au programme, passant de The Wild Bunch aux Beastie Boys s’agissant des influences, dans une veine profondément incandescente, à la fois survoltée et appliquée. Un bien bel EP qui s’approprie les codes du hip-hop des années 90 sans en copier la mise en oeuvre, l’artiste jouant avec les déstructurations pour imprimer un rythme extrêmement resserré.


Disque de reprises


Nell & The Flaming Lips - Where The Viaduc Looms


Si les Flaming Lips n’ont pas toujours été à l’aise avec l’exercice de l’hommage (repensons à With a Little Help from My Fwends s’agissant des Beatles), ils ont cette fois trouvé une jolie formule là où ils n’avaient rien sorti d’enthousiasmant depuis 2013 et l’excellent The Terror. Avec Nell Smith, adolescente rencontrée en marge d’un concert des Lips il y a déjà trois ans, Wayne Coyne et ses acolytes donnent une seconde vie à neuf chansons du répertoire de Nick Cave. Le crooner dira lui-même que Nell Smith parvient à quitter les chansons d’une manière dont il en serait lui-même incapable. L’épure qui en résulte est poignante, au point de parfois glacer le sang. Lorsque la candeur adolescente rencontre le talent de compositeur d’un Nick Cave et les qualités de producteur de Wayne Coyne, le résultat est, sans surprise, renversant.


Autopromotion


Valgidrà - Watched Watchers


J’ai sorti plusieurs albums cette année, que ce soit en solo ou avec Konejo ou Alex De La Pampa dans le cadre du projet Saajevo, mais ce Watched Watchers constitue mon premier véritable album solo - en dehors de la série Warplush - et je ne résiste pas à l’envie de lui donner un nouveau coup de projecteur, sa sortie fin novembre coïncidant avec une période où la presse ne parle plus de nouveautés mais pense déjà à ses tops de fin d’année. Je recopie donc le communiqué édité pour IRM Netlabel.
"Quatrième sortie déjà pour Valgidrà sur IRM Netlabel, après deux EPs avec Konejo et un premier album, Warplush Vol 1, paru il y a tout juste un an. Aux influences électroniques warpiennes de ce dernier, influencé notamment par Boards of Canada ou les Selected Ambient Works d’Aphex Twin, le Rennais a préféré pour Watched Watchers, composé sur près de deux ans, une approche plus éclatée qui fait feu de tout bois, une narration plus dynamique aux contrepieds fréquents et aux respirations d’autant plus captivantes. L’album télescope ainsi à la manière d’un Psyence Fiction sampling baroque et beats abstract (David II), trip-hop lynchien et spoken word (Hypnik Jerk), nappes électroniques déstructurées et mélodies acoustiques (le single Golden Trap), ambient cinématographiques et spleen cristallin (Yellow Kalaw), orchestrations malmenées et rythmique en roue libre (Strings Interlude), synthés saturés et groove hip-hop (Queried, peut-être le sommet du disque), évoluant d’un downtempo capiteux (Moaïs) à une électronique plus froide et malaisante (le morceau-titre), de syncopations mélancoliques (Mood) en pulsations techno étouffées (Sampling Life). Comme chez UNKLE à l’époque où DJ Shadow tenait encore les rênes, l’humeur est plutôt sombre voire légèrement paranoïaque, à la mesure du thème qui sous-tend ce deuxième opus aussi cohérent que contrasté : observateur, n’est-on pas soi-même observé ? Est-on le sujet ou l’objet, a-t-on réellement le rôle que l’on pense jouer ?".


Articles - 29.12.2021 par Elnorton
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