Cela faisait bien longtemps que l’on n’avait plus de nouvelles de Chris Greer aka DJ Mayonnaise. Membre il y a un quart de siècle du collectif 1200 Hobos avec notamment Jel et Doseone (Themselves), Sixtoo, Buck 65 ou Skratch Bastid, co-metteur en son du génial et unique album de Sole et feu Alias sous le nom So-Called Artists, cet ancien pilier d’Anticon avait produit des titres pour le supergroupe Deep Puddle Dynamics du label à la fourmi, pour le fameux manifeste Anticon Presents : Music For The Advancement Of Hip Hop ou encore pour Sage Francis, puis livré deux albums solo, terminant sa course il y a 16 ans tout juste sur l’éclaté (et très bon) Still Alive avant de disparaitre de nos radars.

Autant dire que l’on est plus que ravi de retrouver le beatmaker culte de l’immense 55 Stories, sorti de sa préretraite pour le premier EP d’un tout nouveau projet qui l’associe à un autre vieux de la vieille, un certain Mat Young aka DJ RPM dont j’avoue ne jamais avoir entendu parler et qu avait semble-t-il collaboré à une époque avec Maker de l’excellent duo Qwell & Maker ainsi qu’avec les chouettes et méconnus Lone Wolf & Kub. Au programme de cet éponyme Waxfed, 10 titres d’abstract hip-hop baroques qui font feu de tout bois (d’emblée d’étranges choeurs ethniques sur Late Delivery puis d’irrésistibles samples vocaux hachés menus sur When We Were Young), de cette épure atmosphérique et jazzy typique des productions de Mayonnaise à la grande époque (Waxfed) à la funk minimaliste de Chucket et The Button, en passant par le groove mélodique et syncopé de Trust No One, Terrible Terrific ou Clappers, et même une incursion rappée plus emphatique et néanmoins assez imparable avec le compère Jesse the Tree au micro (Frank Zamboni).

Une chouette collection de vignettes aux contrastes parfois un peu trop marqués et qui à première écoute pourrait tout de même sembler un brin inconsistante pour un retour aussi longuement attendu. Cependant, il suffira d’un titre pour inverser la tendance : ce luxuriant Time’s Up Part II final dont les drums organiques, le sampling soulful, le break cinématographique et autres cuts virtuoses d’érudit du hip-hop 90s évoquent rien de moins que le DJ Shadow de The Private Press ou le Jel de Soft Money  : un titre ultra-concis et non moins remarquable qui nous fait espérer à lui seul un long format pour cette association somme toute des plus rafraîchissantes dans le contexte actuel.