Kelli Ali - Rocking Horse

Un album lumineux, pastoral et d’une beauté époustouflante pour accompagner les beaux jours qui reviennent.

1. Dancing Bears
2. One Day at a Time
3. The Savages
4. Heavens Door
5. Urique
6. Rocking Horse
7. September Sky
8. A Storm in a Teacup
9. The Kiss
10. Flowers
11. Water under the Bridge
12. What to Do
13. The Kiss Epilogue

date de sortie : 24-11-2008 Label : One Little Indian

Le moins qu’on puisse dire de Kelli Ali, c’est qu’elle est éclectique et qu’elle arrive là où on ne l’attend pas. Tout le long d’une carrière discrète et peu prolixe mais toujours de qualité, elle aura su naviguer de la trip-hop adolescente et punky (avec le premier album des Sneaker Pimps que sa voix enluminait) à la funk un peu has-been le temps d’un single avec Bootsy Collins, puis à la pop flirtant avec le mainstream et au rock indé sur ses deux albums suivants, qui contenaient également quelques perles.

Mais c’est dans un tout autre registre qu’elle a choisi de revenir à la fin de l’année passée (2008). En effet, c’est à un voyage calme et champêtre que nous sommes conviés cette fois-ci. L’ouverture du disque, le très beau Dancing Bears, nous refamiliarise avec la jolie voix de Kelli, mais sur un registre jusque là inédit. Comment, en effet, à l’écoute de ce morceau, ne pas penser aux Gentle Waves emmenés par Isobel Campbell il y a quelques années ? On y retrouve les mêmes cordes gracieuses, la même guitare sèche qui mène le bal, la même atmosphère à la fois intemporelle et surannée, teintée de mélancolie aux petites flûtes traîtresses (Le titre phare, Rocking Horse, en est un très bon exemple).

Car c’est bien dans le registre de ce qu’on pourrait nommer la folk de chambre que nous emmène Kelli. Pas ou peu de percussions, des arrangements de cordes somptueux sur un tapis de guitares acoustiques, et sa voix posée sur cet écrin à sa mesure. La deuxième chanson, One Day at a Time, avec son orgue tout droit sorti des morceaux les plus printaniers du More de Pink Floyd, évoque à nos oreilles également les charmes de Cyann & Ben, qui avaient su sur leur premier album nous charmer avec de pareilles sonorités. L’ambiance générale du disque tend d’ailleurs nettement dans la même direction que ces morceaux champêtres que David Gilmour se plaisait à composer vers 1969... La voix de Kelli oscille entre le registre qu’on lui connaît et des passages plus aigus jusqu’alors inconnus chez elle (The Savages et ses superbes cuivres) ou presque sussurés dans un ton plus familier (Heavens Door et son banjo magique) avec une voix toujours au bord de la rupture (Urique). September Sky, quant à lui, réveille à la fois le spectre du Velvet Underground et les ombres de Six Organs of Admittance avec son orage de violons et de roulements de grosse caisse.


Photo : Lara Jade

C’est donc un magnifique virage à presque 180° qui a été opéré avec ce disque, inattendu, d’une beauté inversement proportionnelle à cette non-attente (j’avoue que c’est complètement par hasard que j’ai été voir le site de Kelli Ali et que j’ai dit : "Ho tiens, un nouvel album.") La pochette, représentant un cheval à bascule sous un pentacle, dans des entrelacs de feuilles et un lettrage western, n’est d’ailleurs pas trompeuse. On peut légitimement rapprocher ce projet et cette tendance du disque que sa compatriote Katie Jane Garside vient de sortir avec Ruby Throat : le changement de ton, radical, est le même (en un peu moins brutal chez Kelli tout de même), la volonté d’apaisement identique.

Ce n’est donc absolument pas un disque révolutionnaire, ce n’est donc absolument pas un disque rock, il n’y a donc absolument pas de rythmes endiablés dessus, ou peut-être juste un peu sur l’inquiétant (mais tout est relatif) September Sky, on n’entend presque pas la musique si on essaie de l’écouter dans une fonderie par exemple, tant tout y est doux et calme. Mais, dites-moi, ce disque, vous ne comptiez quand même pas l’écouter à l’usine, tout de même ?

Non, seul un après-midi ensoleillé au bord de la rivière peut convenir. Mais attention, tout de même, toute écoute dans un état mélancolique peut provoquer les effets inverses...

Alors, quand on pense qu’un album acoustique, Butterfly, doit déjà sortir en Avril 2009, on se dit que le monde est formidable parfois.

Chroniques - 19.03.2009 par lloyd_cf