Le streaming du jour #1384 : Russian Circles - ’Guidance’
La catharsis mise au service de la dramaturgie instrumentale, Russian Circles perpétue ses épopées de déchéance, de soulèvement et de rédemption sur un sixième opus qui confirme le retour en forme de Memorial il y a trois ans.
A trop vouloir déjouer les clichés du post-metal, le trio de Chicago avait en effet perdu sur Empros tout ce qui faisait l’essence de sa musique. Ces crescendos cyclothymiques et orageux tributaires des grandes heures de GY !BE bien plus que de Cult Of Luna se retrouvaient troqués au profit d’une approche nettement plus rentre-dedans sous perfusion sludge et heavy/psyché, pour un résultat ultra-efficace mais paradoxalement moins viscéral que sur le génial Geneva en dépit d’une énorme densité sonique.
Heureusement, Memorial avait corrigé le tir en 2013, prenant le temps de laisser planer la menace de ses déluges d’apocalypse en marche avant de véritablement lâcher le feu du ciel sur nos tympans, conservant néanmoins du précédent opus quelques pilonnages de riffs saturés et de toms martiaux du plus bel effet (Deficit, Burial). On y retrouvait également cette mélancolie de fin des temps, une atmosphère désespérée sourdant des drones de guitare menaçants de 1777 avant de laisser place aux trémolos poignants de Cheyenne, et ces envolées lyriques propres au post-rock (Ethel) que le trio a le bon goût de ne jamais laisser verser dans la grandiloquence au contraire d’un Mono notamment.
C’est ce Russian Circles-là que l’on retrouve avec Guidance. La quiétude acoustique d’Asa, à peine voilée par quelques trémolos lointains annonciateurs de frénésie météorologique et autres reflux de cymbales assourdis, laisse poindre au détour d’un discret ronflement électrique la tempête à venir... et sur Vorel c’est l’emballement, il pleut des cavalcades de fûts et des chapes de riffs black metal. Plus belle initiative du trio sur ce début de disque, jamais le mouvement des fronts nuageux ne s’arrête et les arpèges de synthé dynamiques au début de Moto acceptent la fatalité d’une averse d’obus qui débutera à mi-morceau, massive et monolithique comme à l’époque d’Enter en moins démonstratif, ou de Malko sur Geneva.
Avec ses changements d’humeur saillants, tour à tour méditatif et presque résigné sous la tension des roulements de fûts puis combatif dans l’énergie du désespoir d’un déferlement de riffs plombés jusqu’à la bravoure d’un final aux élans retrouvés, Afrika fait justement honneur à l’esprit de ce climax discographique daté de 2009, avant de laisser retomber la pression du baromètre sur un Overboard spleenétique à souhait. L’album aurait presque pu se terminer sur cette touche introspective fidèle aux conclusions planantes des deux précédents disques, autant dire que le sludge cyclonique et fuzzy de Calla et la lente combustion post-metal exaltante de Lisboa, bien que plus classiques, sont la cerise sur le gâteau d’un sixième opus éminemment satisfaisant.
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