BNQT - s/t

A première vue, BNQT cumule deux handicaps. Le premier réside dans l’idée, rarement géniale à l’exception du Minor Victories de l’an passé, de former un super-groupe. La seconde est liée à cette insupportable mode qui pousse les artistes à se débarrasser des voyelles de leur patronyme. Plus rondes, elles sont pourtant indispensables.

1. Restart Voir la vidéo BNQT - Restart
2. Unlikely Force
3. 100 Million Miles
4. Mind Of A Man
5. Hey Banana
6. Real Love
7. Failing at Feeling
8. L.A. On My Mind
9. Tara
10. Fighting The World

date de sortie : 28-04-2017 Label : Bella Union

Là encore il existe une exception – celle de MGMT qui fut plutôt précurseur que suiveur dans cette mode – mais les formations qui y recourent ont tendance, au sein même de leurs compositions, à mettre de côté l’émotion pour privilégier la technique. De là à dire que les consonnes peuvent être assimilées aux bases structurelles et que les voyelles incarnent cet indescriptible plus-value que l’on résume souvent par le terme d’émotion, il n’y a qu’un pas.

BNQT pour Banquet donc. Là encore, le signal envoyé n’est pas très positif. Mais contrairement aux deux premiers, cet indicateur négatif peut parfois se justifier. Le banquet évoque la profusion et le débordement, sensations qui peuvent parfois poindre – heureusement de manière très subreptice – sur Volume 1.

Articulé autour de Ben Bridwell (Band of Horses), Jason Lytle (Grandaddy), Alex Kapranos (Franz Ferdinand), Fran Healey (Travis) et Eric Pulido (Midlake), BNQT s’appuie sur un mode opératoire assez singulier puisque chacun des artistes était chargé de composer deux titres que les musiciens de Midlake se sont chargés de mettre en musique.

C’est d’ailleurs le leader du combo américain qui se charge d’ouvrir les hostilités avec un Restart électrique qui aurait tout à fait eu sa place sur The Courage of Others, classique injustement boudé dont le seul tort est finalement d’avoir succédé à l’inégalable The Trials of Van Occupanther.

Sur Volume 1 plane le spectre des Beatles à plusieurs reprises, et cette similitude pouvant être repérée sur des titres composés par différents membres du super-groupe, les musiciens et surtout le chant d’Eric Pulido n’y sont définitivement pas pour rien.


En effet, le jeu des Texans est plus que jamais ancré dans les années 70, du piano de Unlikely Force bientôt rejoint par les six cordes, au Real Love composé par Eric Pulido dont les cuivres transcendent la métronomie initiale, en passant par le piano, la batterie et les cordes frottées d’un Failing At Feeling produisant un lyrisme touchant.

Cette piste dont on doit l’écriture à Jason Lytle rattrape les excès électriques presque prog de la dernière partie d’un 100 Million Miles à la limite du supportable. Comme sur Last Place, le leader de Grandaddy alterne le très bon et le quelconque, voire l’insipide. Les contributions les plus abouties ne sont pas celles que nous aurions pu soupçonner puisque, après la déception du dernier Travis et le manque d’intérêt des derniers Franz Ferdinand, ce sont bien les titres de Fran Healy et surtout d’Alex Kapranos qui sont les plus réussis.


Avec le sommet L.A. On My Mind et un Mind of A Man dont les chœurs enchantés, la batterie martiale, le chant aérien et les cordes frottées luxuriantes rappellent même Sufjan Stevens, le premier convoque une majesté loin d’être mièvre, alors que le second crée une tension de tous les instants sur un Hey Banana cinématique à souhait pour peu que les images, à l’instar des carillonnements lugubres que l’on décèle, relèvent de l’épouvante, puis sur le Fighting The World final, formidable conclusion à la fois downtempo et dotée d’une incontestable charge émotionnelle.

Malgré quelques excès – toujours difficiles à éviter lorsque l’on se rapproche de l’univers des BeatlesBNQT parvient curieusement, non pas à surprendre l’auditeur avec l’album de l’année, mais au moins à associer puissance et légèreté sans trop privilégier la technique et les postures souvent trop ouvertement affirmées lorsqu’il s’agit d’un super-groupe. La country-folk aux allures de road-movie constitue donc une bonne surprise et l’on ne bouderait pas notre plaisir si un successeur à ce Volume 1 était amené à voir le jour.

Chroniques - 28.09.2017 par Elnorton