Le streaming du jour #1947 en exclu : Genghis Khan - ’Her Absence Is My AntiChrist’ (ressortie Atypeek)

Il avait disparu des internets et pour cause, le troisième opus du Carolinien Genghis Khan ressortait le 29 juin chez Atypeek Music... et on n’est pas peu fier de dire que c’est un peu grâce à IRM, et en particulier notre compil IRMxTP Part XI à laquelle Eric Sigerseth avait offert le délicieusement lugubre Murder Matrimony, instru au piano sépulcral et samples de chœurs éthérés produit avec son compère du duo de beatmakers The Gemini Lounge.

Après l’avoir découvert par ce biais, le label tête chercheuse que le monde entier nous envie s’est en effet emballé pour la discographie de ce rappeur et producteur ricain à l’univers aussi ténébreux que mélangeur, et en particulier pour son petit dernier Her Absence Is My AntiChrist dont nous vantions 2016, à sa première sortie autoproduite, "le minimalisme urbain des bas-fonds, cinématographique, oppressant, angoissant voire carrément horrifique en vidéo, du genre qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus, un peu comme ce malaise qui vous étreint lorsque vos certitudes les plus vertueuses vous trahissent pour laisser place au ressentiment, à la dépression voire à la haine, de l’Autre d’abord, puis de soi."

"Cette crasse de l’âme post-rupture", écrivions-nous alors, "l’Américain l’embrasse, de méditations sur les abîmes de la nature humaine - tirées du noir profond par un halo de voix féminine forcément plus spectral que salvateur (le bien-nommé Human Nature) - en ruminations rampantes comme un bon vieux Tricky malaisant des 90s (Larva, chef-d’œuvre de l’album - avec le sinistre Impurity - à l’atmosphère très Rosemary’s Baby ou giallo italien toute en chœurs hantés et cordes baroques) en passant par des clins d’œil au sadique du ciné nippon Takashi Miike (bourrasques abrasives façon Dälek à l’appui) ou au trip-hop ténébreux des Sneaker Pimps (Maybe There’s Hope Afterall). Et de son flow ou des beats boom-bap qui claquent et résonnent sur les os comme un tabassage à coups de batte au fond d’une ruelle sombre, on ne saurait dire ce qui fait le plus de dégâts sur le dense et impitoyable Hard Boiled."

L’essentiel était dit mais puisqu’on en a l’occasion et après deux ans d’écoutes ferventes et répétées, comment ne pas ajouter quelques mots sur le dark ambient organique et flippant de la surprenante intro The Embryo, le post-apocalyptique 100,000 People aux irrésistibles envolées gothiques, le trip-hop clair-obscur de Rooted Deep Inside You, la soul plombée de The Killing Kind, les arrangements morriconiens du désespéré Deviance (A Million Different Ways), ou même les frontaux Decay, Lucifer et - surtout - Road Rage, redoutables d’efficacité ?

- Écouter l’album en intégralité

Des blessures et des maux qui peuvent mener au nihilisme le plus macabre comme à l’humanisme le plus improbable, là est le déchirement de l’univers de Genghis Khan, qui rend Her Absence Is My AntiChrist presque touchant par-delà sa noirceur radicale. Et partir en flammes avec un monde dont la grâce décline face à la violence ou s’accrocher à ces instants de beauté qui n’attendent que de rendre l’âme, c’est justement toute la question de ce Hellbound or Heavensent sur lequel on vous quitte, final - à l’exception d’un remix de Larva - au clip plein d’obscénité, de sang et de luxure, mais aussi d’espoirs éphémères, d’un disque à ne décidément pas laisser traîner à la portée des enfants :


Streaming du jour - 03.07.2018 par RabbitInYourHeadlights
... et plus si affinités ...
Genghis Khan (Caroline) sur IRM - Bandcamp