Air - Pocket Symphony

Après leur collaboration de rêve avec Charlotte Gainsbourg l’an dernier, Air continuent dans une direction parallèle avec Pocket Symphony , nouvel album dont la composante pop "ligne claire" tranche radicalement avec les compositions panoramiques aventureuses de 10 000 Hz Legend ou les ballades éthérées de Talkie Walkie . Un pas en arrière ou un pas supplémentaire vers l’épure ?

1. Pace Maker
2. Once Upon A Time
3. One Hell Of A Party (feat. Jarvis Cocker)
4. Napalm Love
5. Mayfair Song
6. Left Bank
7. Photograph
8. Mer Du Japon
9. Lost Message
10. Somewhere Between Walking And Sleeping (feat. Neil Hannon)
11. Redhead Girl
12. Night Sight

date de sortie : 05-03-2007 Label : EMI

Un pas un arrière ? Certes. Mais qu’est-ce qu’un petit pas pour un groupe aussi gargantuesque que Air, capable en trois albums et une bande originale (sans parler des side projects 5:55 et Darkel ) de nous faire partager ce que ressentiraient sûrement un gamin extra-terrestre et sa copine jouant aux cosmonautes dans le cocon de leur salon en s’imaginant découvrir la Terre, monde inconnu fascinant d’étrangeté et de proximité mêlées ? Alors c’est vrai qu’ici par moments le cosmonaute se sent comme dans une bulle, quelque peu déçu de ne pouvoir toucher ce qu’il voit... mais qui dit épure dit "pur" donc irréel, intangible, un peu distant... non ?

Car c’est bien d’épure qu’il s’agit avec Pocket Symphony , continuation directe, marquée par un piano toujours omniprésent dès l’ouverture sur l’impressionnant Pace Maker, du virage pop à l’élégance classique entamé par Air avec Charlotte Gainsbourg l’été dernier. Mais là où le naturel et l’interprétation à fleur de peau de l’actrice/chanteuse insufflaient une chaleur touchante dans chacune des chansons d’un album dont l’écrin sonore vibrait à l’unisson de cette intensité, il n’y a rien pour contrebalancer la beauté froide cultivée ici par le duo versaillais jusque dans les participations vocales certes également intenses mais volontairement atonales, presque abstraites de Jarvis Cocker (Pulp) et Neil Hannon (The Divine Comedy), respectivement sur One Hell Of A Party et Somewhere Between Walking And Sleeping. Déjà côtoyés à l’écriture de 5:55 , les deux hommes n’en sont pas moins parfaits dans ce registre, de même que Jean-Benoît Dunckel, moitié de Air échappé l’an dernier sous le pseudo de Darkel dont le chant plus irréel que jamais habite six des dix autres morceaux de l’album.

Ainsi, tel les statues translucides de Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin plantées au milieu du living classieux de la pochette, Pocket Symphony est aussi parfait esthétiquement que parfaitement lissé. Et si par rapport à leurs précédents albums la musique de Air a encore gagné en ampleur sonore et en maîtrise instrumentale, elle a perdu bien davantage en inventivité et en étrangeté. Toutefois, la magie demeure, surtout lorsque surgissent koto et shamisen, instruments à cordes traditionnels du folklore japonais dont l’association féerique, qui fait penser par moments au jeu de harpe du Vespertine de Björk, fait merveille sur One Hell Of A Party. Sans doute la chanson la plus touchante de l’album avec Left Bank, dont la mélodie et le jeu de guitare acoustique rendent ouvertement hommage à Nick Drake.

On savait déjà Air fasciné par la culture du Pays du Soleil Levant depuis leur collaboration avec le trio électro japonais Buffalo Daughter pour l’indépassable Sex Born Poison sur 10 000 Hz Legend , puis le morceau Alone In Kyoto sur Talkie Walkie , entendu dans le film Lost In Translation de Sofia Coppola. Mais cette fois l’influence nippone s’avère générale, et le dépaysement total, appuyé par de splendides arrangements d’instruments à vent. Dans la continuité de 5:55 , les percussions ont également gagné en importance, prenant même ici le pas sur les basses... la faute à Tony Allen ? En effet, le célèbre musicien d’origine africaine, compagnon de Fela Kuti et batteur de The Good, The Bad And The Queen, a participé à la réalisation de l’album (on l’entrevoit d’ailleurs dans le clip du premier single Once Upon A Time).

Cette chronique touche à sa fin, et vous ne savez toujours pas si elle reflète fascination ou déception ? Normal, je n’en suis pas bien sûr moi-même... disons sans doute un peu des deux. Il est vrai qu’on pouvait s’attendre à davantage d’étonnement de la part d’un groupe aussi passionnant que Air. Pour autant, à défaut sans doute de tenir la comparaison face à un 10 000 Hz Legend toujours aussi riche en recoins inexplorés et fascinant d’avance sur son temps, Pocket Symphony ne devrait guère s’éloigner de ma platine cette année.

Chroniques - 12.03.2007 par RabbitInYourHeadlights
 


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