L’exercice de la reprise est monnaie courante de nos jours, on a ainsi pu voir bon nombre de récents albums y être consacrés entièrement, et ce ne sont pas les dernières créations de Chan Marshall qui nous ferons dire le contraire. Et si collecter des valeurs sûres et les réarranger soi-même peut faire croire à une certaine forme de paresse, à mieux y regarder il peut en être tout autrement. Rares sont ceux qui s’en sortent avec les honneurs, pourtant Adem, artiste britannique et ancien bassiste de Fridge, s’en sort haut la main. Revisitant des créations extraites sur une période allant de 1991 à 2001 et allant piocher dans le répertoire d’artistes aussi reconnus que The Breeders, Björk, PJ Harvey ou Yo la Tengo pour ne citer qu’eux, Takes apparaît sur le papier comme une entreprise à la fois ambitieuse et profondément risquée. Et c’est là où beaucoup auraient mangé la poussière, que cet artiste folk électro-acoustique parvient malgré la variété des originaux choisis, à imposer une belle cohérence et une constante identité d’ensemble. Armé d’une guitare et d’un xylophone omniprésents, les interprétations frappent par une délicatesse digne d’un Andrew Bird et une légèreté permanente.

L’entame de ce disque est marquée par de belles ballades apaisées comme le Bedside table de Bedhead ou Hotellounge de dEUS, où quelques envolées lyriques et acoustiques viennent s’ajouter et magnifier ces relectures. Adem manifeste avec ce troisième album son amour de la mélodie et des arrangements soignés dont une voix poignante et le travail de la guitare par picking sont les plus beaux outils. On atteint même un sommet d’élégance avec To Cure A Weakling Child + Boy/Girl Song d’ Aphex Twin mené par une introduction subtile et un chant se répétant vers un infini qu’on croit pouvoir atteindre le temps que la confusion de notre esprit provoqué par le charme fort de ce titre persiste. S’ensuit une petite baisse de régime avec quelques longueurs ressenties sur des titres où l’inspiration des réarrangements semble avoir légèrement fait défaut, malgré la présence appréciable du Gamera de Tortoise et une reprise honorable de Unravel de Björk où la harpe vient subitement s’inviter à la fête.

Et c’est finalement par le biais de toute cette clique dont la notoriété n’est plus à faire, qu’Adem parvient curieusement à nous faire la plus belle démonstration de son univers dont l’identité est à la fois forte et séduisante.