Vous est-il déjà arrivé de ne rien comprendre à un film mais d’en avoir pourtant apprécié le contenu ? C’est un peu le genre de paradoxe auquel on doit s’attendre avant de se lancer dans le premier album de la formation naissante Fôl Chen.

Des américains pleins de mystères, qui se présentent faces cachées et qui nous offrent sur leur myspace, en guise d’unique introduction à leur projet, un texte non moins énigmatique que l’on croirait extrait d’un roman. Une démarche collective qui refuse visiblement de s’inscrire dans les standards des créations musicales actuelles et qui éveille notre curiosité.
Et de l’interrogation il en est toujours question à l’écoute de cet album, les morceaux s’enchaînent et offrent un contraste quasi permanent avec ce qui les précède. Ainsi d’entrée de jeu se succèdent un tableau inquiétant, un épisode lumineux et dansant, et un moment apaisé qui vire en pleine noirceur. Fôl Chen se joue de nos émotions et réussit finalement sans unité aucune, à nous faire apprécier ce patchwork totalement perturbant. Et même si l’intention a de quoi laisser perplexe, y a-t-il par exemple de meilleures sensations que celles de passer des larmes au rire, du stress au soulagement ou de la fatigue au repos ? C’est probablement le genre de pensée qui a pu habiter cette troupe schizophrène à l’enregistrement de ce premier effort et on en arrive assez facilement à se prendre à leur petit jeu. Il faut dire que lorsque le groupe est animé d’une volonté, celle-ci s’illustre avec efficacité et donne naissance à des compositions de qualité, qu’elles prennent la forme d’une pop joviale ou d’un refroidissement instrumental. Les basses utilisées sont bondissantes, les percussions éclatantes, les ambiances particulièrement saisissantes. Ce savoir-faire très large a été jugé bon d’être exploité dans toute son ampleur. La démonstration trouve alors presque obligatoirement en cours de chemin l’occasion d’aller captiver au moins une fois les oreilles qui s’y aventureront et est tout aussi capable de séduire dans sa globalité.

Aucun catalogage n’est permis avec Fôl Chen, il est difficile d’oser tenter le moindre rapprochement avec d’autres projets existants. Une seule chose à faire pour y voir plus clair et qui montre quelque part l’avantage de leur démarche, c’est de l’essayer. Après cela, peut-être vous surprendrez-vous, vous aussi, à guetter avec intérêt la suite, d’ores et déjà annoncée de par son intitulé, de ce facétieux Part 1 : John Shade, Your Fortune’s Made .