Sufjan Stevens reste sans voix

Certains se souviennent peut-être d’ Enjoy Your Rabbit et de ses titres inspirés des signes du zodiaque chinois, curieuse incursion de Sufjan Stevens du côté d’une électronica expérimentale et dissonante à ranger quelque part entre les Residents et Fenn O’Berg, et qu’on imagine volontiers être restée en rade dans les bacs des disquaires jusqu’à la promotion du songwriter de Detroit en chef d’orchestre des anges pour une ballade é(x)tatique à travers l’Amérique dont on ne sait toujours pas quelle sera la prochaine étape.

Une disque de jeunesse pour le moins poussif dont le musicien ne semble pas avoir gardé une meilleure impression que ses fans l’ayant découvert sur le tard, à en juger du moins par l’idée, soufflée il y a quelques années par l’ami Bryce Dessner de The National, d’en confier la réinterprétation au quatuor Osso entendu aux orchestrations de cordes d’ Illinoise ou encore du Bring Me The Workhorse de My Brightest Diamond.

Quatre jeunes compositeurs new-yorkais - dont Nico Muhly, disciple de Philip Glass croisé récemment du côté de Grizzy Bear ou Antony & The Johnsons et auteur notamment de la bande originale de The Reader - furent alors chargés des nouveaux arrangements et voilà l’album définitivement échappé des mains de son auteur d’origine, d’où sans doute ce nouvel intitulé de Run Rabbit Run. Si le résultat à découvrir dès demain via le label Asthmatic Kitty Records co-fondé par l’américain promet d’être aussi peu mélodique que la version de 2001, l’exercice devrait néanmoins s’avérer intéressant et peut-être même, à l’image du premier extrait Enjoy Your Rabbit, s’attirer les faveurs des amateurs du Kronos Quartet.

De quoi nous faire patienter en tout cas jusqu’à la sortie le 20 octobre d’un autre projet également privé de chant mais plus orchestral celui-ici : The BQE, ainsi nommé en référence au Brooklyn-Queens Expressway, voie d’autoroute d’une vingtaine de kilomètres reliant ces deux quartiers de New York, est né d’un concert commandé à Stevens par la Brooklyn Academy Of Music pour le 25ème anniversaire du Next Wave Festival et dirigé par l’américain lui-même au Howard Gilman Opera House fin 2007, en accompagnement de son documentaire en 16mm du même nom, projeté en triptyque.

Deux ans plus tard, cette "bande originale" teintée d’électro warpienne et annoncée comme un grand écart improbable entre le minimalisme avant-gardiste d’un Terry Riley (influence majeure de Philip Glass et de tout un pan de la musique contemporaine) et un maximalisme plus "hollywoodien" paraîtra donc au sein d’un coffret l’associant au DVD du film, à un livret de 40 pages constitué de notes et de photos ainsi qu’à 7 images 3D stéréoscopiques pour autant de perspectives de l’autoroute en question, en accord avec les 7 mouvements de l’oeuvre - dont le sixième, intitulé Isorhythmic Night Dance With Interchanges, nous est offert par le label au chat asthmatique. Une édition limitée comprendra également une BD de 40 pages écrite par Stevens et mettant en scène les Hooper Heroes, trio local de hula hoop qui participait au concert d’origine et auquel le trailer ci-dessous rend ouvertement hommage :

News - 05.10.2009 par RabbitInYourHeadlights
 


Le streaming du jour #1745 : Sufjan Stevens - 'Tonya Harding EP'

Sufjan Stevens s’invitait déjà dans cette rubrique il y a moins de deux semaines avec The Greatest Gift. Il peut donc paraître étonnant de le voir de nouveau à l’honneur, d’autant plus qu’il n’a publié qu’un simple single, là où nous relayons habituellement des sorties plus conséquentes dans le cadre de nos "streamings du jour". Mais qu’importe, (...)



Chroniques // 29 mars 2015
Sufjan Stevens

Oh, bien sûr, il ne nous avait pas totalement abandonnés, participant à quelques side projects. Pour autant, Sufjan Stevens ne nous avait plus pondu de véritable album depuis cinq ans. Et un sevrage de cinq ans, lorsqu’il s’agit d’un tel génie, c’est long.