Encore un détour par le Portugal, nouvelle destination de prédilection des amoureux de dream-pop instrumentale à la sauce électronique (chillwave ?) avec ces deux projets solo du même João de Almeida, l’un des piliers du collectif et netlabel MPD qu’on avait découvert il y a quelques mois à l’occasion de la sortie du charmant premier EP des Brésiliens de Take Your Love.

Derrière cet acronyme se cache l’idée d’un mouvement de "musiciens pop au chômage" (Música Pop Desempregada) originaires pour la plupart des abords de la cité de Coimbra ou reliés de près ou de loin à sa scène musicale en pleine effervescence et néanmoins toujours confidentielle là-bas comme ici. On est donc loin du "multiple personality disorder" tant les univers des musiciens du collectif font preuve au contraire d’une cohérence à toute épreuve, jusque dans leur rejet du marketing ("le design c’est quelque chose qu’on utilise pour transformer les mauvais disques en bon produits", avancent-ils), cf. leurs artworks qui semblent bidouillés à la va-vite sur un logiciel de type Paint avec pour seule et unique police autorisée le bête "courier", en hommage avoué au bon vieux temps où Jim Courier était numéro 1 au classement ATP (véridique).

Et c’est là qu’on en arrive à l’essence de la musique du label, non pas le sport bien que l’on compte dans ses rangs les très bons Sensible Soccers mais bien la nostalgie. Nostalgie dans les sentiments plutôt que dans la musique cependant puisque celle de João de Almeida ne pourrait sonner plus actuelle à l’heure du succès des Washed Out, Memory Tapes et autre Warm Ghost. Toutefois, loin de suivre benoîtement le mouvement de ces obsessionnels compulsifs des 80’s bercés par un certain psychédélisme béat, Elite Athlete et The Love Making Of à la façon de Sun Glitters ou Toro Y Moi prennent le pas de musiciens nettement plus aventureux tels que Clubroot ou Boards Of Canada, entre autres emprunts au glitch-hop, à l’ambient synthétique ou au UK Garage. Et puis, surtout, ça ne chante pas... ce qui dans ce genre d’univers est plutôt une bonne nouvelle.

Une orientation peut-être plus sombre et stellaire pour le nouvel EP du premier en libre téléchargement depuis cet été après un précédent essai lo-fi plus uptempo et saturé toute batterie en avant, tandis que la toute récente entrée en matière du second (également offerte via Bandcamp) s’aventure du côté d’une mélancolie plus romantique... mais dans les deux cas un certain minimalisme cinématique domine, The Love Making Of multipliant notamment les samples de voix évocateurs, qu’il s’agisse de dialogues de films (Trust, qui fait référence au film éponyme de Hal Hartley renommé Trust Me en français) ou de documentaires sociaux (Chicanos, cf. ci-dessous) voire carrément de chansons soul ou indie à l’image de There’s A Hole In The Sky dont on reconnaîtra le clin d’œil au single des Pixies Monkey Gone To Heaven par le biais d’un échantillonnage vocal ralenti à l’extrême.

L’occasion au regard de ces belles réussites d’explorer plus amplement le catalogue du label fort d’une trentaine de sorties déjà en moins de deux années d’activité, à commencer par la dernière en date due au mystérieux duo Apall dans une veine électro ambient plus proche de la techno stellaire d’un Rone.