Échappé de Ventura, Philippe Henchoz lâche quelque peu les décibels et la fougue du fameux trio post-hardcore pour focaliser sa tension électrique en tant que The Sinaï Divers sur un songwriting à l’intensité plus feutrée et souvent touchant de vulnérabilité sous-jacente (le chant aidant), entre lo-fi sursaturée (I Let You Speak My Name, Company), shoegaze massif (Please Take That Smile Off Your Face, It’s Worth An Arm) et post-rock introspectif (I Know What’s Wrong With This World, Can We Escape Madness ?).

Rompu aux débuts scéniques du projet à toutes sortes de reprises indé, nul doute que le Suisse a su tirer les leçons des chansons à combustion lente de Low ou de l’intensité décharnée des grandes heures de Smog pour enregistrer ce premier album au spleen dévastateur. Seule cover cette fois si l’on excepte la relecture unplugged et d’autant plus touchante du fulgurant 24’000 People extrait de We Recruit (dernier album en date de Ventura sorti en 2010 chez Africantape), un doomesque Me And The Devil qui doit moins ici au blues des origines de son géniteur Robert Johnson qu’aux évocations crépusculaires et downtempo de l’ultime chef-d’œuvre de Gil Scott-Heron dont cet aveu de part d’ombre demeure l’un des sommets.

Quant au picking acoustique de The Rumours Are True, il vient témoigner d’un talent plus acéré que jamais pour les atmosphères troublantes, culminant plus loin sur les dissonances épileptiques du fragile A Little Prayer Might Leak aux allures de valse de fin de monde.