Jerusalem In My Heart - Mo7it Al-Mo7it

Nous vous en parlions il y a quelques semaines, Jerusalem In My Heart, le projet pluridisciplinaire du Montréalais Radwan Ghazi Moumneh se trouve enfin figé dans une forme définie en la structure sonore qu’est l’album Mo7it Al-Mo7it en écoute jusqu’à mardi sur le site de la radio canadienne CBC Music. Après l’énorme succès du retour de Godspeed You ! Black Emperor, la langoureuse beauté du dernier Tindersticks et les nouvelles expérimentations d’Eric Chenaux, encore un O.V.N.I. tout droit venu de la firme Constellation.

1. Koll lil-mali7ati fi al-khimar al-aswadi (Speak of the Woman in the Black Robe)
2. 3andalib al-furat (Nightingale of the Euphrates)
3. Yudaghdegh al-ra3ey wala al-ghanam (He titillates the shepherd, but not the sheep…)
4. 3anzah jarbanah (Sick, Diseased Goat)
5. Ya dam3et el-ein 3 (Oh Tear of the Eye 3)
6. Ko7l el-ein, 3oumian el-ein (Eyeliner of the Eye, Blindness of the Eye)
7. Amanem (Amanem)

date de sortie : 19-03-2013 Label : Constellation

Les différentes métamorphoses de JIMH depuis 2005 ne permettaient pas d’envisager l’esthétique d’un enregistrement studio. Le groupe, à géométrie variable (de Moumneh en solo à 35 participants, selon les prestations !) se trouve finalement être un trio composé du libano-canadien précité, du producteur français Jérémie Regnier (à ne pas confondre avec son homonyme belge qui se prend pour Cloclo !) et d’une artiste vidéaste chilienne, Malena Szlam Salazar. C’est donc d’une formation cosmopolite que provient cet album qui, par ses morceaux sans structure, tente de transmettre le caractère unique et éphémère de leurs performances.

Étonnamment, le visuel de l’album, œuvre de la vidéaste qui évoque le passage du temps par la multiplication des séquences lunaires captées par une caméra 16mm, nous rappelle une autre pochette d’album, sorti l’an dernier, celle du All We Love We Leave Behind de Converge. Évidemment, musicalement, rien de comparable parmi eux, mais la ressemblance de ces deux graphismes est troublante...




Au programme de cet « Océan des Océans », 7 titres à l’ésotérisme assumé et au ton expérimentalo-mystique prééminent. Les sonorités orientales du buzuq côtoient les gazouillis de rossignols sur de longues plages transcendantales où le field recording offre un cadre paisible et naturel aux improvisations contemplatives du musicien (3andalib al-furat (Nightingale of the Euphrates)). La voix, toujours habitée, souvent trafiquée, psalmodie ou chante en arabe des lignes qui se fondent, avec la grâce et la ferveur de la passion, au drone ambient de l’instrumentation (comme sur les deux morceaux qui ouvrent et ferment l’opus).




La dimension électronique du groupe a été modestement exploitée, mais transparaît tout de même avec ce Yudaghdegh al-ra3ey wala al-ghanam (He titillates the shepherd, but not the sheep…) qui se développe autour d’une boucle répétitive rappellant le minimalisme saxophonique du collègue Colin Stetson. Ici Moumneh ose un vocoder qui, bien loin d’imiter les innombrables utilisations de l’effet dans la soupe médiatique, apporte une étrangeté fascinante à son chant inspiré. On regrette presque que ce titre qui sort du lot ne fusse pas étendu davantage tant la spirituelle beauté de ses itérations nous envoûte.




Tous les titres, difficilement prononçables (selon la volonté de Moumneh) sont rédigés en langage texto. Une façon de rappeler le rôle primordial qu’ont joué les technologies contemporaines de communication pour la révolte des peuples arabes et d’inscrire ainsi cette œuvre dans une époque déterminée, justement marquée par les révolutions (politiques et communicationnelles). Un ensemble exotique et déroutant qui peut laisser perplexe mais non pas indifférent.

Chroniques - 16.03.2013 par Le Crapaud
 


Jerusalem In My Heart, à venir chez Constellation

À mi-parcours entre installation visuelle, performance et concert électro-progressif-oriental, fortement immersif, Jerusalem In My Heart est un projet mené par le libano-canadien Radwan Ghazi Moumneh, figure locale de la communauté indé montréalaise, berceau du label Constellation Records (qui signe aussi A Silver Mt. Zion et Godspeed You ! Black (...)