Powerdove - Do You Burn ?

C’est en 2007 que débute l’aventure Powerdove, menée en solo par Annie Lewandowski. Elle fonde ce projet après avoir fondé ailleurs le groupe The Curtains, pour y insuffler l’air aqueux de son Minnesota. Powerdove prend déjà la forme d’un trio en 2009, pour l’album Be Mine et redevient le fruit d’une solitude en 2010 avec le EP autoproduit Live From The Maybeck House. Écrit entre Hampshire (Angleterre) et New-York, son nouvel album continue de révéler une personnalité touchante et sensible, toujours encline à s’émouvoir des vibrations du réel. Pour les incorporer dans ses chansons, elle s’est cette fois-ci entourée de deux expérimentateurs adeptes des entreprises improvisées, les (entre autres) guitaristes John Dietrich (Deerhoof) et Thomas Bonvalet (L’Ocelle Mare). À eux trois , ils ont produit ce Do You Burn ? encore incandescent, lors d’un enregistrement live, brut et halluciné. 31 minutes dans un rêve orange...

1. Fellow
2. Under Awnings
3. Do You Burn ?
4. Alder Tree I
5. Love Walked In
6. California
7. Flapping Wings
8. Red Can of Paint
9. All Along the Eaves
10. Out on the Water
11. Out of the Rain
12. Wandering Jew
13. Alder Tree II

date de sortie : 11-03-2013 Label : Murailles Music

Cela commence avec une salve de larsens formant une harmonie confuse. Les sons aigüs et stridents n’ont pas cessé de se chevaucher quand un arpège étrange vient se décomposer, ouvrant la voie au chant fantomatique de Lewandowski. La contemplation commence. Une expérience mystique vous attend...




Les chansons de Powerdove sont des enquêtes. Elles cherchent parmi le réel les indices d’une beauté laissée là, comme un jouet oublié et poli par l’écoulement du temps et de la pluie. L’objet de leur quête réside là où elle s’achève, et une fois révélé, il disparaît. À la fois simples et riches, les airs de Powerdove ne se gagnent pas facilement. Il faut attendre qu’ils s’installent, qu’ils osent se donner. Par exemple, Under Awnings ne trouve son « refrain » qu’au moment de se conclure. L’ambiance y est tendue, suspendue entre les interventions ponctuelles d’un piano (on suppose qu’il s’agît d’un piano...), utilisé d’une manière que lui-même ne croyait pas possible. Les éléments rythmiques sont presque toujours détournés de leur régularité ordinaire pour former des continuités indécises. Quelques percussions corporelles et des chocs d’objets, sinon rien. Que les chapelets de notes, distribuées au compte-goutte. Voilà pour ce qui concerne l’occupation du temps.

Avec ses titres dépouillés, Powerdove invente une folk déracinée et psychédélique. Ses chansons sont composées d’une voix aérienne sur une structure fragile comme une libellule agile longeant les fils d’une toile d’araignée. Il n’y a pas toujours de mélodie qui se distingue. C’est flottant. Cela provoque parfois comme une réminiscence de Nico sur une musique de John Cale...




Avec Love Walked In, le trio se prête pour la première fois à l’exécution d’une vague forme de chanson. Deux accords de guitare, consonance et régularité rythmique, quelque chose d’indéterminé se déploie et se résout, encore une fois, en se terminant. Cette structure compositionnelle se retrouve encore sur California mais avec des harmonies complexes, comme si l’on tournait lentement la manivelle d’une boite à musique à la mécanique déglinguée.




Le dépouillement est à son paroxysme sur Red Can of Paint. Quelques notes piquées sur un banjo. Le chant spectral de Lewandowski qui avance tremblotant puis se dédouble pour un contre-champ vaporeux. Le songwriting se fait plus sensible pour la berceuse All Along The Eaves, où la mélodie fonctionne comme une comptine nostalgique.

Quelque chose de plus rythmé intervient ponctuellement sur l’air morne de Out on the Water, colorant ses eaux d’un arpège andalou. C’est la plus flagrante rupture dans le déroulement homogène de l’album.




Out of the Rain est dans les nuages et observe les gouttes tomber. On n’en finit pas de planer.

Wandering Jew est la plus entêtante, qui porte le poids de l’errance par delà les vibrations. Le refrain s’incruste et creuse sa marque quelque part en nous.




Cela se termine dans le calme. Ça n’en était pas vraiment sorti. On atterrit en douceur, encore un peu perché. La réalité reparaît peu à peu.

Si je te jette dans le feu, est-ce que tu brûles ? L’expérience est tentante. Mais la question reste en attente. En suspend.

L’album est court, modeste et pudique. On voudrait le garder pour soi, comme une mauvaise conscience, pour des moments d’ascèse, détachés de tout. Pour renouveler à loisir ces 31 minutes dans un rêve étrange.

Chroniques - 30.03.2013 par Le Crapaud
 


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