Pour son sixième album en 5 ans sur le label allemand Denovali, Brian Pyle joue d’emblée la carte d’un minimalisme gothique aux entournures mais pas dénué de ferveur. Les arpeggiators modulés et nappes de synthés vaporeuses du méditatif Music Is Life avec l’invité Alexander Molero aux machines ou les lamentations d’une guitare ultra-saturée sur un I See You (Three Crosses), Part 1 aux claquements de boîte à rythme rachitiques suffisent ainsi à instaurer, dans un clair-obscur de fin des temps, une atmosphère de recueillement que le Californien viendra défendre dans le cadre cosy du Vent Se Lève le 31 octobre prochain au côté du New-Yorkais Jeremiah Cymerman, à l’occasion du tout premier concert organisé par IRM.

Cet équilibre entre dissonance et mélancolie, théâtralité et romantisme viscéral culmine notamment sur le plaintif et bourdonnant I See You (Three Crosses), Part 2 ou le tendre et strident Breathing Your Secret Language tous synthés dehors, faisant écho à l’inspiration première de ce disque qui devait d’abord porter le nom peut-être un peu trop évident de Music Saves Lives  : le tragique incendie du Ghost Ship, salle de concert d’Oakland, il y a deux ans et les réactions disproportionnées de la presse et des politiques vis-à-vis des artistes underground californiens, injustement stigmatisés pour leur irresponsabilité.

Un évènement auquel le final Blue Hour, transcendé par les chœurs élégiaques des sœurs Nixon du duo néo-zélandais Purple Pilgrims sur fond de beats presque dubstep et de distorsions lancinantes, adresse une vibrante liturgie. Gageons que l’acoustique idéale de la salle du 19e arrondissement de Paris saura rendre justice à cette mixture plus inclassable et introspective que jamais du Californien, entre rêveries cosmiques, requiems synthétiques, cantiques syncopés et drone vampirique.