Derrière cet alias inédit se cache le Britannique Oliver Stummer, actif depuis une vingtaine d’années en tant que Tomoroh Hidari dans une musique électronique aux sonorités glitch et dub (l’excellent Chiisana Yumetachi chez Mahorka en 2020, c’était lui), cette dernière influence irrigant par ailleurs plus frontalement le side project The Dubnihilist, pourvoyeur depuis peu d’une dub techno élégante, aussi profonde qu’évanescente quoique un peu moins texturée.

Depuis l’inaugural The Necrophonicon en 2004, on savait le bonhomme inspiré par l’ésotérisme (références lovecratiennes à l’appui) et c’est probablement sur ce premier opus de Death Librarian, pour lequel il se présente en gardien des livres des morts mais aussi de ceux de la vie, que cette fascination s’exprime le plus ouvertement. Sans surprise, il y est question d’ectoplasmes rémanents et de littérature gothique, mais au regard de ses enregistrements habituellement plus maximalistes on ne s’attendait pas forcément à de tels monuments d’austérité hantée, à l’image du solennel First Seance sur lequel quelques interjections vocales samplées et de chiches percussions d’outre-tombe sont seuls à contraster avec les synthés inquiétants et autres basses fréquences insidieuses évoluant sournoisement sur près de 10 minutes.

Avec Ghost Elegies, c’est ainsi à un dark ambient canal historique aux accents fortement cinématographiques que s’adonne le musicien, célébrant l’avènement des spectres sur 12 minutes de crescendo dronesque incantatoire et caverneux (The Future Belongs To Ghosts), ou accompagnant pas-à-pas un narrateur invisible dans les tréfonds d’une crypte de possédés (A Failure A Defeat) pour y déterrer à la lampe à huile les os noircis de quelque antéchrist oublié (Black Bones). Plus loin (ou plus avant dans le profondeurs infernales qui sait ?), sur le troublant Spectral Fadeaway, les suppliques d’une voix féminine refusant de perdre son enveloppe charnelle parviennent à extirper d’une obscurité carnassière quelques harmonies de synthés auréolées d’une lueur d’espoir, tandis que le bien-nommé Reverberations From The Past convoque le souffle d’esprits vengeurs symboles d’une mémoire tourmentée.

Répondant à l’introduction, Last Seance viendra finalement le confirmer, au son de la voix du même protagoniste toujours aussi perdu mais confronté cette fois à une horde de damnées autrement plus menaçants : rien n’est résolu, les fantômes demeurent, moteurs probablement pour Oliver Stummer d’une créativité qu’on lui souhaite éternelle... dans cette vie comme dans la prochaine !