Sole And The Skyrider Band - Sole And The Skyrider Band

Entouré d’un producteur dub inventif, d’un multi-instrumentiste virtuose et d’un batteur inspiré, le chef de file du label Anticon livre un nouveau chef-d’oeuvre hybride et inclassable, quelque part entre électronica angoissée, hip-hop urgent, folk luxuriant et rock désespéré.

1. A Sad Day For Investors
2. Ghost, Assassinating Other Ghosts
3. Nothing Is Free
4. The Bridges, Let Us Down
5. A Hundred Light Years And Running
6. The Shipwreckers
7. Sound Of Head On Concrete
8. Magnum
9. The Bones Of My Pets
10. In Paradise
11. One Egg Short Of The Omelette
12. On Cavalry
13. Stupid Things Implode On Themselves

date de sortie : 23-10-2007 Label : Anticon

On ne reviendra pas sur la genèse de ce cross-over entre les univers musicaux du génial co-fondateur d’Anticon, déjà auteur en 2007 du formidable album instrumental Poly.sci.187 sous son pseudonyme Mansbestfriend, et de la bande à Bud Berning, car elle pourrait constituer à elle seule l’objet de cet article. Et puis ça n’est pas non plus comme si on n’en avait jamais parlé (c’était même ici). Par contre, si vous aimez les albums capables d’abolir en beauté toute notion de frontière musicale sans avoir l’air d’y toucher, et si toutefois vous n’êtes pas allergique au hip-hop (mais peut-on seulement dire encore que c’en est ?) du moment qu’on n’y cause pas de grosses bagnoles, de flingues et de "bitches", on ne saurait trop vous conseiller d’y jeter une oreille ou même les deux, à celui-là. Car on avait beau l’attendre au tournant, ce projet collectif au casting de rêve, rien ne nous avait pour autant préparé à recevoir un tel choc émotionnel et esthétique dès la première écoute, bien au-delà - et pourtant c’eût déjà été considérable - de la "simple" somme des talents concernés.

Pourtant ça n’est pas faute de savoir assez précisément qui fait quoi sur l’album : Sole crache son venin, sa colère, son désespoir présent et son angoisse de l’avenir avec le lyrisme, la verve allégorique, le sens de la métaphore et ce regard aiguisé sur la folie du monde qu’on lui connaît depuis Bottle Of Humans , et guide l’auditeur au fil de ces douze morceaux labyrinthiques qui doivent également beaucoup à son art consommé de la rupture et du contrepied, alors même que le multi-instrumentiste William Ryan Fritch tente de nous perdre dans le dédale de ses lignes mouvantes de guitares et d’instruments à cordes, triturées par la production abyssale de Bud Berning, quelque part entre électronica impressionniste et dub hypnotique. Ainsi, l’habillage sonore prend des allures du Dntel de Life Is Full Of Possibilities quand tourbillonnent ces enivrantes réminiscences de violons déconstruits au laptop au milieu des programmations évanescentes du maître d’oeuvre de Skyrider, une fascinante instabilité encore transcendée par le mixage idéalement spacieux d’Alias, lequel retrouve son ami Sole quatre ans après le cultissime Selling Live Water , qu’il avait produit, et six ans après leur passionnante aventure commune sous le nom de So-Called Artists, Paint By Number Songs .

De la puissance saturée d’A Sad Day For Investors, morceau d’ouverture au mur du son dévastateur, jusqu’au lyrisme baroque du tempétueux Stupid Things Implode On Themselves, qui clôt l’album dans un déluge funèbre assez dérangeant, en passant par un Ghost, Assassinating Other Ghosts anxiogène et vibrant, le mélodica mélancolique de Nothing Is Free surgissant d’un dub sombre et menaçant, le crescendo de folk morriconien et le refrain à fleur de peau de l’intense A Hundred Light Years And Running, les choeurs irréels sur cordes japonisantes de Sound Of Head On Concrete, l’électro affolée de Magnum, le schizophrène The Bones Of My Pets dont l’urgence panique naît d’abord de la déconstruction tourmentée d’un sample du thème de L’affaire Thomas Crown (le spleenétique The Windmills Of Your Mind) signé Michel Legrand - compositeur d’inoubliables comptines jazzy et cinématiques déjà célébré indirectement cette année par Alpha et son superbe The Sky Is Mine  -, la batterie métronomique et le riff de guitare saturé d’In Paradise et la mélancolie synthétique de l’élégiaque On Cavalry, Sole et sa bande font de chaque chanson de l’album un véritable morceau d’anthologie, une aventure à part entière se suffisant à elle-même et dans le même temps une pièce indispensable à la compréhension globale de ce grand puzzle baroque, qui restera à n’en pas douter l’une des expériences les plus chavirantes, fascinantes et passionnantes de l’année 2007.

La vidéo de Stupid Things Implode On Themselves, réalisée par Ravi Zupa

Trois extraits de l’album sont en écoute sur myspace. A lire également : notre live report du concert de Sole & The Skyrider Band au Ground Zero (Lyon) le 3 décembre dernier, en compagnie de The John Venture.

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Chroniques // 8 octobre 2007
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