Jucifer, « heavy à 95 % »

Avec Throned In Blood, nouvel album brutal, le duo américain veut rectifier une image trop pop dans laquelle il ne se reconnaît pas.

Depuis le début des années 90, Jucifer navigue avec aisance entre heavy metal, sludge, doom, pop, punk et country. Mais Throned In Blood, leur cinquième album, marque clairement le retour de Gazelle Amber Valentine (guitare, chant) et Edgar Livengood (batterie) à leurs racines métal. Il constitue aussi la première parution de leur label tout neuf, Nomadic Fortress. Alors, rupture dans la continuité ? La parole est à Amber...

Indie Rock Mag : Vous publiez Throned In Blood sur le label que vous venez de créer, Nomadic Fortress. Qu’est-ce qui vous a poussé à faire cela ? Vous n’étiez pas heureux chez Relapse ?

Jucifer (Gazelle Amber Valentine) : Nous avons toujours voulu créer notre propre label et le moment propice a fini par arriver. Nous adorons Relapse et nous étions vraiment heureux qu’ils acceptent de changer de rôle pour devenir notre distributeur exclusif ! Nous connaissons déjà leur grand professionnalisme et bien sûr, nous sommes complètement dévoués à notre nouveau label. Nomadic Fortress est donc entre de bonnes mains.

Pour ce qui est de Throned In Blood, Relapse distribuera le CD et Alternative Tentacles la version vinyle. Si les fans ne trouvent pas l’album chez leur vendeur habituel, celui-ci peut le commander sans problème chez Relapse. Et les futures sorties de Nomadic Fortress seront aussi disitribuées par Relapse.

Avez-vous créé Nomadic Fortress uniquement pour publier vos propres disques, ou comptez-vous travailler avec d’autres groupes à l’avenir ?

Nous démarrons avec nos propres disques, jusqu’à ce que le label commence à être un peu mieux connu. Mais travailler avec d’autres groupes nous intéresse beaucoup, c’est aussi pour ça que nous avons voulu créer notre label. Notre premier projet de ce genre sera sans doute un split entre Jucifer et un autre groupe.

Une dernière chose à propos de Nomadic Fortress : j’adore le nom. En fait, je trouve qu’il décrit très bien le groupe. Comment l’avez-vous choisi ?

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Jucifer par Todd Zimmer

Merci ! J’ai réfléchi à pas mal de noms et cette expression m’est venue à l’esprit. J’ai fait des recherches sur le web pour vérifier que personne d’autre ne l’utilisait, ce qui était le cas, au moins dans un contexte musical. Et puis les significations que l’on trouve en faisant une recherche rapide sont vraiment intéressantes et collent bien à ce que je voulais... L’une d’entre elles décrit les "forteresses nomades" comme des lieux où les anciennes cultures nomades faisaient étape au cours de leurs déplacements. J’ai aussi trouvé une espèce de concept nébuleux à propos d’une frontière globale dans un univers à six dimensions, gardée par des patrouilles de différents pays.

Ces mots sont très chargés de significations qui décrivent bien notre label tel que nous le voyons : une citadelle itinérante depuis laquelle nous pouvons contrôler notre propre petit royaume.

Nomades, vous l’êtes vous-même, au point d’être pratiquement déracinés : vous demander "d’où vous êtes" n’a plus de sens depuis quelques années. D’ailleurs, sur votre profil MySpace, cette mention a été remplacée par "Nomads 4ever". Ça ne vous manque jamais d’avoir un endroit vers lequel retourner ?

Bizarrement, non ! Nous nous sentons liés à tous les endroits que nous visitons, et nous avons littéralement l’impression d’"être" de chacun d’entre eux. Rien ne décrit mieux ce sentiment que cette citation d’un chef kiowa nommé Santana : « On me dit que vous avez l’intention de nous installer dans une réserve près des montagnes. Je ne veux pas m’installer. J’aime parcourir les prairies. C’est là que je me sens libre et heureux, mais quand nous nous installons quelque part, nous devenons pâles et nous mourons. » Nous ne voulons pas nous installer !

Deux des particularités de Jucifer sont d’être un duo et d’être en permanence sur la route. Quand les choses tournent mal, et j’imagine que cela arrive de temps en temps, on n’a que l’autre pour passer sa mauvaise humeur. Est-ce que cela ne finit pas par nuire à votre relation ? Comment faites-vous pour tenir ?

Je crois que c’est le genre de situation qui renforce une relation ou au contraire la détruit. La nôtre est belle et forte et vraie, ce qui nous permet d’affronter le stress ensemble. Chacun de nous est le meilleur allié de l’autre. C’est parfois très dur, mais nous avons des bases vraiment solides. Et après toutes ces années, nous savons ce qui compte vraiment : nous.

En parlant de tourner, y a-t-il des endroits dans le monde où vous n’avez pas encore joué et où vous aimeriez aller ?

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G.A. Valentine par Jana Miller - gato-ranch.com

Plein ! Nous aimerions voir tous les pays un jour. Mais cela coûte très cher. Et puis, bien sûr, nous ne voudrions pas atterrir au milieu d’un conflit, ou dans un pays qui ne tolère pas les femmes indépendantes. Parfois nous regardons la carte et nous nous disons : « Si on va en Grèce, après tout la Russie n’est pas si loin... » Et à partir de là, il paraît si facile de pousser jusqu’à la Chine, l’Indonésie, le Japon... Mais dans la réalité, c’est très lourd à organiser. Cela dit, nous avons toujours l’intention d’y parvenir un jour !

Vous devez connaître les USA comme votre poche aujourd’hui, mais vous avez aussi pas mal tourné en Europe, où vous reviendrez d’ailleurs cette année (les dates à jour sont sur le MySpace). Avez-vous des endroits préférés sur le continent ? D’autres dont vous gardez un mauvais souvenir ?

J’adore la côte nord du Portugal. Ça me fait toujours quelque chose quand je suis là-bas, comme si j’y avais vécu dans une vie antérieure. Ce qui est plutôt marrant, parce que je ne parle pas portugais et qu’en tant que végétalienne, je meurs quasiment de faim chaque fois que j’y vais !

Comme nous adorons tous les deux la montagne, les Alpes sont un de nos endroits préférés. Mais la Méditerranée est fantastique aussi !

Pour ce qui est des concerts, nous avons connu de bons moments partout. Mon espagnol est meilleur que mon français, ce qui fait que je me sens toujours bien en Espagne... mais j’adore la langue et la culture françaises. Les Italiens sont incroyablement accueillants. Nous aimons jouer en Pologne, en Slovaquie, en Hongrie et en Croatie : on y trouve certains de nos fans les plus dingues. Pour moi, les plus belles villes sont Prague et Rome, mais c’est peut-être parce que je n’ai pas encore vu grand-chose de Paris !

Cette année, nous allons jouer en Suisse pour la première fois, c’est excitant. En général, nous aimons découvrir de nouveaux endroits, ça nous fait plaisir d’être là, même si ce sont des lieux sans grand intérêt pour des touristes classiques.

Vous êtes un groupe difficile à classer. On vous qualifie généralement de "sludge metal", parce que votre son est lourd et fort, mais votre musique comporte aussi des éléments pop, voire punk. Est-ce que ça vous rend difficiles à vendre ? Qui sont vos fans ?

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Jucifer par Brian Daniloski, 2008

Ha ha !... Oui, nous avons toujours été difficiles à vendre. Ou bien nous avons été vendus à des gens qui n’aimaient qu’un aspect de notre son. Nos chansons qui ont reçu la meilleure promo ont toujours été celles qui tiraient vers le côté pop. Beaucoup de gens qui pourraient aimer l’un de ces singles nous détesteraient en concert, et vice-versa.

Le côté pop n’est pas vraiment représentatif de notre son. Cet aspect est issu d’expérimentations en studio, ça ne correspond pas à ce que nous sommes sur scène. Du coup, cette façon de nous promouvoir a peut-être été une gêne. Mais on ne peut pas en vouloir aux labels d’espérer faire un hit avec une de ces chansons accrocheuses. C’est leur job après tout.

Une des raisons qui nous ont poussés à créer notre propre label était justement de mieux contrôler l’image de notre groupe. Nous voulons que le public nous voie tels que nous sommes réellement, pas pour faire de l’argent (ce qui n’est généralement pas le cas pour les groupes les plus heavy !), mais pour attirer des gens qui aimeront vraiment ce que nous leur donnerons.

Nous donnons plusieurs centaines de concerts chaque année et c’est ça qui nous représente et nous fait vivre, bien plus qu’un album de temps en temps. Nous voulons que les gens sachent à quoi s’attendre. C’est toujours dommage de voir quelqu’un qui vient à un concert en espérant entendre Hero Worship ou Fleur De Lis se faire brutaliser contre sa volonté, tout comme il est dommage que les fans de nos concerts ne puissent pas apprécier nos albums. Donc, pour le moment, nous nous concentrons sur le côté heavy qui a toujours été au cœur de notre musique. Ça représente 95 % de ce que nous jouons, il est temps que le public le sache !

La plupart de nos fans ont l’esprit plus ouvert que la moyenne. D’autres viennent chercher chez nous ce qui leur plaît et ignorent le reste... ce qui nous convient parfaitement ! Beaucoup de nos plus grands fans sont eux-mêmes musiciens, ce qui nous touche particulièrement, parce qu’ils comprennent ce que nous faisons au niveau technique. Enfin, aussi surprenant que cela paraisse, nous avons beaucoup de fans qui disent aimer toutes nos chansons, ce qui prouve que nous ne sommes pas les seuls à avoir des goûts qui partent dans tous les sens !

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Nomades pour toujours : Gazelle Amber Valentine et Edgar Livengood

Avez-vous déjà eu des contacts avec des majors ? Je les imagine bien essayant de comprendre quelque chose à votre musique et vous disant que vous devriez essayer de sonner plus comme [insérer le nom d’un groupe de métal populaire]...

Ouais, elles ont été nombreuses à nous tourner autour à la fin des années 90 et nous avons fini par signer avec l’une d’entre elles. Nous avons eu de la chance, parce qu’ils nous respectaient suffisamment pour nous laisser agir à peu près à notre guise. Mais oui, je me souviens de conversations où des groupes comme Kittie et Drain STH ont été mentionnés.

En fait, ce que les labels semblaient toujours vouloir, c’était qu’on ne sonne pas du tout métal. Je suppose que ce qu’ils voyaient, c’était notre capacité à écrire des chansons pop, et qu’ils pensaient que nous gâchions cela en jouant du métal. Mais être dans un groupe pop ne correspond pas à notre personnalité. Ce qui nous motive, c’est d’entendre quelqu’un dire que nous sommes le groupe le plus heavy qu’il ait jamais entendu. Nous jouons trop fort, trop vite, trop lentement. Et nous aimons partir du métal et fabriquer des chansons qui le font évoluer dans de nouvelles directions. Même si nous aimons les autres genres de musique, et bien que nous sommes capables d’écrire et d’enregistrer dans d’autres styles, nos racines sont dans le métal. C’est le genre avec lequel nous nous sentons à l’aise au quotidien.

J’ai l’impression que vous vous êtes bien adaptés au nouvel état de la musique. On dit qu’il n’y a plus d’argent à faire dans les ventes de disques, qu’il faut tourner et s’efforcer d’établir un lien plus direct avec les fans. Or vous tournez sans arrêt et vous vous êtes approprié les technologies qui vous permettent de rester en contact avec votre public, de MySpace à Twitter. Vous semble-t-il plus facile ou plus dur d’être un musicien aujourd’hui ?

C’est plus dur financièrement. À une époque, les labels gagnaient beaucoup d’argent et en partageaient un peu. Un nouveau groupe pouvait dépenser 200 000 dollars sur son premier album sans que personne n’y trouve à redire. Ce n’est plus possible aujourd’hui.

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Edgar Livengood, 2006 par Mike White - Deadlydesigns.com

Heureusement, les attentes du public en termes de production ont changé. La plupart des gens écoutent la musique sur du matériel numérique, ce qui signifie qu’un enregistrement à 2 000 dollars peut sonner aussi bien, sinon mieux, qu’une session à 200 000, voire 2 millions de dollars.

Les tournées ont toujours été la principale source de revenus des groupes, et ça reste vrai aujourd’hui. Mais beaucoup de fans et de groupes débutants ne se rendent pas compte de ce que ça coûte. Donc, encore une fois, il est plus difficile que jamais de s’en sortir financièrement. Même des tournées avec des places à 55 euros ne sont pas forcément rentables. Il faut toujours rapporter ça au coût de l’organisation de la tournée.

Pour ce qui est du contact avec les fans, c’est vrai que c’est plus facile que jamais. Et nous adorons ça. Tout comme nous apprécions les différents endroits que nous visitons, nous apprécions les gens différents qui aiment notre musique. Et cette omniprésence des technologies de la communication est une des raisons pour lesquelles nous avons jugé que c’était le bon moment pour lancer notre label.

Certaines personnes jouent dans des groupes pour satisfaire leur fantasme d’être une rock star. Le reste d’entre nous comprend, voire aime l’autonomie et la proximité avec le public que permet l’underground. Tout cela est aujourd’hui renforcé par les technologies disponibles.

Cela dit, je voudrais aussi rappeler aux fans que s’ils aiment un groupe, ils ne peuvent le soutenir qu’avec leur argent. Quel que soit son label, je peux garantir qu’il le paie très peu voire pas du tout. Le seul moyen pour un groupe de continuer à exister, c’est d’être capable de financer son matériel, son véhicule et ses enregistrements. Tout cela coûte beaucoup plus cher que ne l’imaginent les non-musiciens. Dans l’industrie musicale telle qu’elle est aujourd’hui, ce rapport direct entre les fans et la musique finira par déboucher sur la mort des groupes, à moins que les fans ne se rappellent qu’il faut aussi payer. N’importe quel album ou presque est disponible gratuitement, alors essayez avant d’acheter. Mais si ça vous plaît, allez l’acheter. Ou achetez un T-shirt. Sinon, les groupes que vous aimez finiront par disparaître.

Votre précédent album, L’Autrichienne, était un album-concept sur la Révolution française. Throned In Blood se présente aussi comme une espèce d’album-concept sur la guerre et la lutte pour le pouvoir. Avez-vous besoin d’un thème central pour écrire, ou est-ce que cela vous vient naturellement ? Un album devrait-il toujours être lié par un même thème, ou peut-il aussi s’agir d’une collection de chansons qui n’ont en commun que d’avoir été enregistrées à la même époque ?

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Amber en 2006, CC flavorflanks @ Flickr

Tous nos albums sont construits autour d’un concept. Nous aimons tous les deux beaucoup lire et voir des films, donc j’imagine que raconter une histoire avec chaque album est très naturel pour nous. L’autre approche, qui consisterait à simplement rassembler quelques chansons, nous semblerait paresseuse et nous laisserait un goût d’inachevé. Je suis sûre qu’il y a de grands albums qui ne reposent sur aucun concept, mais nous nous sentons plus à l’aise en travaillant autour d’un thème.

Dites-nous en plus sur les idées qui ont inspiré Throned In Blood. Pensiez-vous aux guerres dans lesquelles votre pays est actuellement engagé ? Qu’avez-vous pensé de l’attribution du prix Nobel de la Paix à Obama ?

Nous avons été inspirés par toute l’histoire humaine, y compris le présent. La guerre a toujours existé. En ce qui concerne les guerres actuelles, nous pensons tous les deux que notre pays a mal agi et que ses citoyens ont été trompés.

Je pense que l’attribution du prix Nobel de la Paix à Obama était peut-être prématurée. Je ne suis toujours pas décidée à son sujet. En tant que symbole de la rupture avec une tradition fondée sur l’ethnocentrisme et l’exclusion, j’aime ce qu’il représente. Mais comme personne et comme dirigeant ? Je ne sais pas encore.

Qu’on le veuille ou non, la guerre et la paix sont des sujets hautement politiques. Vous considérez-vous comme un groupe "politique" ?

Non. Mais en même temps, je ne suis pas sûre que nous puissions éviter de l’être. Même si nous choisissions de ne parler que de sujets anodins, ce serait une sorte de prise de position politique. Tous nos choix moraux et philosophiques sont des actes politiques... comme tu dis, qu’on le veuille ou non.

Vous avez dit à smnnews.com que Throned In Blood était né du désir de faire un disque que vous puissiez jouer live. Pourquoi ?

En passant en revue notre discographie, nous nous sommes rendu compte du nombre de chansons que nous avions enregistrées et que nous ne voudrions jamais jouer sur scène. Et au fil des années, nous avons toujours joué en concert des chansons qui ne sont jamais apparues sur nos disques. Nous pensons simplement que le moment est venu de réconcilier ces deux aspects de notre groupe.

Logiquement, la prochaine question est : pourquoi n’avez-vous jamais sorti d’album live, et en avez-vous l’intention ?

L’une des raisons est qu’il très difficile d’enregistrer les voix en concert. Nous jouons si fort qu’il est impossible d’augmenter le volume de la voix sans aussi (involontairement) monter la guitare. Du coup, c’est très difficile à mixer.

Sur les albums, nos parties de guitare et de batterie ont toujours été enregistrées ensemble et dans les conditions du live, ce qui rend d’une certaine manière un album live superflu. En concert, obtenir le meilleur son pour les micros d’enregistrement est très difficile. Un album live risquerait de n’être au bout du compte qu’un enregistrement de qualité inférieure.

Pas d’album live, donc, mais vous avez publié deux DVD, A Partridge in a Pear Tree en 2004 et Veterans of Volume : Live With Eight Cameras l’an dernier. Est-ce parce que vous pensez que les images sont nécessaires pour traduire fidèlement ce que peut être Jucifer sur scène ?

Oui, je crois que l’aspect visuel aide vraiment à se faire une meilleure idée.
Cela dit, rien ne vaut le fait d’être là au milieu du bruit et du chaos. Mais ces deux DVD sont un bon début.

Revenons à Throned In Blood. D’où vient l’illustration de la pochette ?

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C’est une très vieille gravure qui représente Alexandre découvrant le corps de son ennemi Darius. Ils s’étaient affrontés pendant des années et Alexandre avait toujours voulu détruire Darius, mais à la vue de son cadavre, il a eu des remords et lui a accordé des funérailles royales. Nous avons trouvé que cela collait parfaitement au thème de l’album, et c’est aussi une très belle œuvre d’art.

Le titre de l’album sonne très "métal". Le clin d’œil à Slayer est-il intentionnel ? Vous considérez-vous comme un groupe de métal ?

Nous n’avons pas voulu faire référence à Slayer, mais quand nous avons décidé du titre, nous nous sommes rendu compte que les gens feraient ce rapprochement. Comme nous sommes de grands fans de Slayer et de Reign In Blood, ça ne nous gêne pas du tout que ce soit interprété comme un hommage.

Nous sommes tous les deux très individualistes et nous n’aimons pas être catalogués. Mais s’il fallait choisir une catégorie dans laquelle, en tant que musiciens, nous nous sentons à l’aise, ce serait le métal. Il n’y a pas d’autre genre dont nous nous sentons aussi proches.

Comment avez-vous atterri sur Falling Down II ? Vous sentez-vous proches des autres groupes présents sur la compilation ? Quand avez-vous enregistré Marianas, la chanson qui s’y trouve ?

C’est eux qui nous ont contactés, et nous étions ravis d’y participer. Nous venons tout juste de recevoir notre exemplaire de la compilation et je suis impatiente de l’écouter. Marianas est une chanson que nous avons écrite en 1993, mais nous ne l’avons enregistrée qu’en décembre 2009 !

De quels groupes vous sentez-vous proches ? Avez-vous des recommandations à nous faire ?

Certains des groupes dont nous nous sentons proches sont ceux avec lesquels nous avons partagé la scène : Melvins, Melt-Banana, High On Fire, Mastodon, Today Is The Day, Buried Inside, et des groupes moins connus mais qui mériteraient de l’être, comme White Mice et Salome. Il y a aussi d’autres groupes du sud [Jucifer est originaire de l’État de Géorgie - NDLR] comme Torche, Kylesa, Baroness, Rwake, The Roller.
Enfin, il y a des groupes que nous apprécions sans avoir jamais joué avec eux : Dropdead, Pig Destroyer, Brutal Truth et Cattle Decapitation, et d’autres que nous croisons de temps en temps sur la route, comme Saviours et 3 Inches Of Blood.

Nous ne jouons pas souvent avec des groupes hors métal, parce que les publics sont différents, mais nous avons des amis très talentueux comme Of Montreal et Shannon Wright. Nous nous sentons proches de ces musiciens par l’esprit, sinon musicalement, quoique je sois sûre que nous nous rejoignons parfois sur ce point-là aussi.

J’ai vu dans votre bio que vous aviez aussi joué avec Vic Chesnutt. Quand était-ce ? Quels sont vos souvenirs de Vic ?

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Vic Chesnutt en 2007. CC vhf/Victor Felder

Vic était un des plus extraordinaires paroliers qui aient existé et avait la voix masculine la plus poignante que je connaisse. Je suis vraiment très triste qu’il nous ait quittés. Nous avons donné un concert ensemble vers 1996 ou 97, il me semble. C’est au cours de ce concert que notre chanson Medicated (qui figure sur If Thine Enemy Hunger ) a été jouée live pour la première et unique fois. J’ai écrit cette chanson en pensant un peu à Vic et un peu à Fleetwood Mac... Vic l’a remarquée et a dit qu’il l’aimait. Ça, c’était cool.

Quand on nous a proposé de signer sur une major, j’ai demandé conseil à Vic. Il m’a dit : « Ça ne vous fera peut-être pas de bien, mais ça ne vous fera probablement pas de mal. » Il avait raison.

J’ai toujours été en admiration devant Vic et son talent très particulier. Il avait une telle présence, comme une aura, alors qu’il était juste assis là dans son fauteuil roulant, à fumer des cigarettes sur le trottoir. Un grand génie imparfait, une icône.


Photo en début d’article par Scott Kinkade.


Interviews - 19.04.2010 par jediroller, leoluce


Le streaming du jour #1255 : Jucifer - 'District Of Dystopia'

On aime Jucifer pour sa persévérance, sa grande variété et son intransigeance. On l’aime aussi parce que ses disques sont toujours différents tout en restant complètement les mêmes.



Chroniques // 10 avril 2010
Jucifer

Habitué à naviguer entre sludge et pop, le duo nomade du rock retourne à l’état sauvage sur cet album brutal.