2013 : les artistes font leur bilan - Part 6

Ils ont fait l’actu cette année sur IRM, à leur tour de nous parler de leur cru 2013 ! Jusqu’à l’heure des bilans et dans l’idéal sous forme d’un top 3 des albums, EPs, rééditions, concerts ou autres évènements qu’ils retiendront avant toute autre chose de ces 11, bientôt 12 derniers mois, les choix des artistes, patrons de labels et autres activistes des scènes indépendantes de tous horizons géographiques et musicaux nous mèneront de découvertes en confrontations de points de vue, l’occasion également de revenir en quelques mots sur leurs propres sorties qui ont toutes marqué à divers degrés l’équipe d’IRM cette année.


Stéphane Dupont

(Helium Horse Fly - France)

... tient la guitare schizophrénique et les claviers funestes du quatuor liégeois Helium Horse Fly, dont le post-hardcore baroque et tourmenté a brillamment passé le cap du long format après deux EPs impressionnants (on en parlait ici), alternant mieux que jamais sur cet éponyme au lyrisme vicié, crescendos cathartiques et malaise feutré.



Son bilan 2013 :

- 1 : Gorguts - Colored Sands

Mon disque de l’année, sans aucune hésitation. Une musique abstraite, mais qui reste néanmoins (relativement) accessible. Absorbant. Envoûtant. Complexe mais sans jamais être au service d’autre chose que du propos musical. Un monument.


- 2 : Kayo Dot - Hubardo

Album concept de plus d’une heure et demie, dont il est difficile de parler tellement l’expérience proposée est particulière. Une musique organique qui mélange ballades, growls démoniaques, musique contemporaine, blasts métal, jazz, chorale...


- 3 : Ventura - Ultima Necat

Délicieusement mélancolique, des passages épiques (le final d’Amputee...), un songwriting inspiré sur l’intégralité des titres : un des albums que j’ai le plus écoutés cette année, et la BO parfaite pour un dimanche pluvieux.



Thomas Herbst

(Karlrecords - Allemagne)

... nous a encore réservé de bien jolies surprises ces derniers mois sur Karlrecords, à commencer par les deux sorties successives du Laurent De Schepper Trio (cf. ici et ), formation allemande dont la mixture de darkjazz, de post-rock et d’électronique témoigne de la formidable ouverture du label hambourgeois des Ulna, Bill Laswell ou Cezary Gapik.



Son bilan 2013 :

- Prurient - Through The Window


-  Fire ! Orchestra - Exit !

- Svarte Greiner - Black Tie

And additional 2 as 5 is very short :

- Jerusalem In My Heart - Mo7it Al-Mo7it

- Black Heart Rebellion - Har Nevo



Tim Holland

(aka Sole, Mansbestfriend - US)

... est décidément plus actif que jamais depuis son départ d’Anticon, citons pour cette année le retour du side-project expérimental Mansbestfriend avec l’instrumental WHITENOISE : nomoredystopias donnant dans le collage subversif et l’activisme allégorique, et tout dernièrement Crimes Against Totality, final intense et percutant de la série trilogie alt-rap insurgée qu’avait entamée l’an dernier l’album A Ruthless Criticism Of Everything Existing.



Son bilan 2013 :

- 1) Andrew Jackson Jihad

These guys are some of my favorite song writers, their combination of humor, philosophy, and sympathetic approach to dealing with the human condition makes for amazing music and worldview.

Ces gars-là font partie de mes songwriters préférés, leur combinaison d’humour, de philosophie, et leur approche bienveillante de la condition humaine conduisent à une musique et une vision du monde assez incroyables.


- 2) Ramshackle Glory / Pat The Bunny

Straight up Pat The Bunny is the best song writer in the game right now. Whether its his solo stuff or the work of the band he’s a part of, he manages to take radical ideas and put them in a very plain, humane, and poetic way.

Franchement, Pat The Bunny est le meilleur songwriter actuel. Que ce soit ses trucs en solo ou le travail du groupe dont il fait partie, il parvient à exposer des idées radicales d’une manière très simple, humaine et poétique.


- 3) Busdriver

Busdrivers live performance changed the way I view a rap show, no one is doing shit like he is doing right now. 15 years into his career he is still a trendsetter and visionary making amazing music. Really the whole Hellfyre Club crew is killing shit right now.

Les performances live de Busdriver ont changé ma façon de voir un concert de rap, personne ne fait le genre de trucs qu’il fait actuellement. Après 15 ans de carrière, il est toujours cet avant-gardiste visionnaire faisant une musique incroyable. Vraiment toute l’équipe du Hellfyre Club fracasse tout en ce moment.



Eddie Palmer & Brett Zehner

(The Fucked Up Beat - US)

... sont malheureusement sur le point de lâcher l’affaire faute de soutien financier, mais The Fucked Up Beat vous réserve encore bien des pépites si vous avez aimé les atmosphères d’un autre temps du fabuleux A Bomb Shelter In Kansas chroniqué dans nos pages il y a quelques semaines, dernier né d’une douzaine d’albums en deux ans que le duo new-yorkais nous propose de télécharger à prix libre via sa page Bandcamp.



Le bilan 2013 d’Eddie :

- Broadcast - Berberian Sound Studio

Cryptic caves, strange lights, human experiments, telepathics, imminent tragedy, remote viewers in a white room, erratic radio waves, railroad floods, teeth clatter against bridges.

Grottes cryptique, lumières étranges, expérimentations sur l’humain, télépathie, tragédie imminente, vision à distance dans une salle blanche, ondes radio erratiques, chemins de fer inondés, des dents fracassées contre des ponts.

- Iamamiwhoami - Bounty

Mysterious cults hidden in the trees fearful of the sun, preyed upon by wolves, solitary creatures looking for a home, winter shelter by the tides.

Des cultes mystérieux cachés dans les arbres par peur du soleil, être la proie des loups, des créatures solitaires à la recherche d’une maison, un abri d’hiver au bord des marées.

- Shigeto - No Better Time Than Now

Commuting with strangers, no waves only panic, a city apart, barrage of machines, highways and highways, seldom to see no lights, crumbling american metropolis eats itself alive, money pits of capitalism.

Faire la navette avec des étrangers, pas de vagues juste la panique, une ville en morceaux, un barrage de machines, routes et autoroutes, rare de ne voir aucune lumière, une métrople américaine en plein effritement se dévore vivante, gouffres financiers du capitalisme.



Le bilan 2013 de Brett :

- Dead Ghosts - Cant Get No

This is all about triumph. A happy critique. A sad revolt. Weird how listenable this album is.

Il n’est question que de triomphe. Une critique joyeuse. Une triste révolte. Bizarre à quel point cet album s’avère écoutable.


- Night Beats - Sonic Bloom

A continuum that anyone can plug into play the same riff and get a completely different emotion... a cry against death and sadness. A triumph really with whiskey... just wish it had more of a feminist push... like K Records etc.

Un continuum sur lequel n’importe qui peut se brancher, jouer le même riff et obtenir une émotion totalement différente... un cri contre la mort et la tristesse. Un vrai triomphe, avec du whisky... j’aurais juste souhaité qu’il ait davantage une poussée féministe... un peu comme K Records etc.

- Godspeed You ! Black Emperor - ’Allelujah ! Don’t Bend ! Ascend !

A war on capitalism using sound and visuals as symbolic fire bombs.

Une guerre contre le capitalisme utilisant le son et les visuels comme des bombes incendiaires symboliques.



Nebulo

(France)

... a construit cette année sur les racines rétro-futuristes de son EP Basements l’album le plus inclassable de sa discographie, quelque part entre techno vintage et séismes texturés.



Son bilan 2013 :

- Holden - The Inheritors  :

Je ne connaissais James Holden que de nom, mais n’avais jamais écouté. Le premier extrait Gone Feral est sorti quelques mois avant l’album.
Ce morceau m’a complètement fasciné et charmé dans son entêtement, sa folie répétitive avec l’arpeggio, le charme d’une production avec de magnifiques saturations.
Le second extrait Renata a achevé de me convaincre. Lui aussi joue sur un thème entêtant, sur un crescendo qui me parle énormément.
Et c’est donc tout excité que j’ai écouté l’album dès sa sortie.
Et j’ai eu la sensation d’un souffle nouveau, franchement.
Ambitieux, assumé, affirmé, libre, vivant, joué et joueur, et surtout hors carcan stylistique.
De la musique, au delà d’une musique dite électronique.
Très beau et libérateur.
Le morceau The Inheritors est une pure pépite (parmi d’autres).



- Empytset - Recur  :

Je n’ai pas encore pu l’écouter beaucoup de fois.
Première écoute partagée entre le plaisir jubilatoire d’entendre de nouveaux morceaux et la déception de reconnaître "trop" bien la marque de fabrique du groupe.
Le travail d’Empytset me parle pour des raisons assez opposées à celles évoquées par rapport à Holden ci-dessus.
Le travail de contrainte, de cadre, de chirurgie contrôlée, de jusqu’au-boutisme.
Le minimalisme du processus versus le maximalisme de la production sonore.
Ou comment inventer des grooves martiaux sans éléments percussifs.
Les hachures, le silence, le travail de distortion, le jeu d’harmoniques et de la compression sont brillants.
Musique de processus.

Les écoutes du moment :

- Rashad Becker : inspirant, donne envie d’y revenir. Recherches sonores hyper intéressantes. Musique de processus là aussi.
A creuser car pas simple d’accès de prime abord.

- Basic House : beauté poussiéreuse envoûtante et lancinante.

- Dopplereffekt : Gene Silencing sur le dernier EP TetraHymena. Je ne connaissais pas ce groupe, seulement de nom. Ce morceau est addictif. Le côté obscur de Kraftwerk.


- Rezett / EP : sorte de friandise post-techno super crade et rabâcheuse. Travelling pulsation.

- Bruma / Architect Method EP  : premier EP ultra réussi.
Faux minimalisme. Plasticité sonore. Précision et hypnose.
Ça sonne magnifiquement bien. Ecouter City Night Lines.


- VNDL : son EP sur Kvitnu est super réussi. Recherche sonore. Textures étincelantes. Maîtriser le chaos.



Photo : Sole.
Propos recueillis par Rabbit et Spoutnik.


Articles - 04.12.2013 par RabbitInYourHeadlights