Pour son troisième album - on lui doit également un EP et deux 7’’ - le Canadien Warren Hildebrand a su s’entourer d’artistes brillants, à commencer par le New-Yorkais Ansel Cohen au violoncelle et surtout le génial Owen Pallett dont le violon illumine quatre des sept compositions que compte ce disque.

Si la présence de l’auteur d’In Conflict décuplera forcément l’attente de l’auditeur lambda, elle ne pourra faire passer les vessies pour des lanternes en ce sens qu’elle n’est pas suffisante pour transcender des compositions médiocres. Non, le sieur Pallett ne peut donner toute la dimension de son talent que lorsque l’on touche à quelque chose d’intrinsèquement beau.

En plus d’avoir, violon placé sous le menton, un doigté habile, Owen Pallett a le nez fin. C’est ainsi qu’il a repéré en Warren Hildebrand un compositeur de talent au côté duquel il pourrait explorer de nouveaux terrains de jeux plus contemplatifs. Que ceux qui sont allergiques au côté précieux du violoniste (mais est-ce toujours possible après son dernier opus ?) se rassurent, il n’a pas la main-mise sur le disque et ses apparitions sont plus discrètes qu’à l’accoutumée.

Warren Hildebrand, tête pensante du projet, reste donc le seul maître du navire. Pas une mince affaire. Et si ce dernier, accessoirement fondateur du label Orchid Tapes - on retrouve dans son catalogue des artistes tels que Arrange, Alex G ou Ricky Eat Acid - compose, c’est avant tout une question de besoin. Après la mort de son frère il y a quelques années, le Torontois a totalement réétudié la manière et les raisons pour lesquelles il faisait de la musique. Ainsi lui est apparue comme évidente l’idée de s’adonner à une "healing pop" susceptible d’enrober et d’apaiser les douleurs qui peuvent être celles de l’auditeur.

Mêlant une base (dream-)pop à des éléments plus ambient, shoegazy ou plus variés encore - on pense parfois à Grizzly Bear ou même à Sigur Rós sur l’interlude Amanda -, Foxes In Fiction construit ici un album très cohérent, dont on déroule le fil de manière presque naturelle. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à entendre la formidable transition entre Into The Fields, titre à tendance dream-pop, et Glow (v079), résolument ambient qui résonnent et communient à merveille.

Disque cathartique, Ontario Gothic devrait permettre à son auteur d’avancer fort de quelques certitudes quant à ses capacités créatives. Comment ne pas en avoir après avoir accouché de titres aussi évidents et majestueux que Shadow’s Song ou Into The Fields ? Sur le plan musical, le futur du Canadien risque donc d’être semé de moins d’embûches que les épreuves qu’il a traversées dans sa vie jusqu’alors. Est-ce l’essentiel ? Sans doute pas, mais la diseuse de bonne aventure avait finalement raison.