Marnitude - Death Of A Hedonist
C’est probablement pour des artistes tels que Marnitude que l’on prend encore plaisir, après toutes ces années, à consacrer du temps à l’écriture de chroniques qui seront, bien souvent et dans le meilleur des cas, seulement lues en diagonale. En effet, ces heures consacrées à noircir des pages virtuelles sont bien peu de choses en comparaison de la passion, du temps et du talent injectés dans un disque aussi essentiel que Death Of A Hedonist.
1. Places
2. Enter You Inside
3. Not Reassuring
4. Kali, Shoot Her
5. I’ll Be Waiting
6. Not Simulated
7. My Hope Stands A While
8. Liar
9. Death Of A Hedonist
Après l’indispensable EP éponyme publié en 2011, dire que nous attendions le prochain long format de l’artiste serait un bel euphémisme. En six titres, et sept ans après un premier disque quasiment introuvable aujourd’hui, Marnitude ne révolutionnait certes pas le folk-rock mais, imposant une véritable personnalité à mi-chemin entre Talk Talk et Smog, il va sans dire que de beaux jours s’annonçaient pour le combo mené par Jean-Rémy Papleux.
Et puis ? Pas grand-chose. Avant 2015, et un II dont l’accouchement fut particulièrement difficile, si bien que malgré l’évidente qualité intrinsèque de l’ensemble, ce ressenti pouvait gagner l’auditeur. De manière plus claire, Marnitude n’a jamais eu pour vocation de réaliser des contenus particulièrement guillerets mais si l’EP compensait par une impression d’espace, II s’avérait plus étroit. La démarche était probablement volontaire, en tout cas congruente avec l’état d’esprit des Français à ce moment, eux qui avaient dû repousser plusieurs fois la sortie du disque pour diverses raisons.
Si Death Of A Hedonist, de par son titre, ne semble pas s’adresser aux plus optimistes, il dégage quelque chose de plus apaisé que son prédécesseur. Et finalement, cela fait du bien. En termes d’inspiration musicale, il serait bien difficile de déterminer lequel de ces deux opus est le plus abouti – l’attrait de la nouveauté nous ferait peut-être pencher pour ce dernier, mais la différence est trop mince pour que l’on puisse arrêter un jugement définitif – mais la cuvée 2016 est probablement celle qui fait le plus de bien.
C’est en tout cas la plus paradoxale en ce sens que, en s’affirmant comme le parfait complément de l’EP éponyme, elle surprend moins que II, mais tient un propos plus ambivalent, ne choisissant jamais réellement entre l’apaisement et les tourments. Difficile de tirer un extrait de l’ensemble, mais I’ll Be Waiting est en ce sens assez représentatif de la ligne directrice de Death Of A Hedonist puisque la mélancolie downtempo apparente laisse petit à petit passer entre les mailles du filet qu’elle dresse habilement des éléments relevant de la force tranquille.
Surtout, Jean-Rémy Papleux fait étalage d’une voix plus claire et aérée que jamais, tandis que son compère Julien Doigny fait partie de ces bassistes qui, à l’instar de Colin Greenwood – on n’y va pas de main morte en termes de comparaison – savent trouver le savant dosage entre discrétion et talent pour mettre ce dernier au service de l’ensemble. Pour le reste, un organiste et une batteuse ont rejoint une formation renouvelée de moitié pour les besoins de ce disque.
La présence de cet orgue qui plane tel un spectre au-dessus des compositions de Marnitude aurait pu être remise en question avec le départ de Nils Méchin, mais le fait de poursuivre dans la même configuration avec de nouveaux individus est finalement assez révélateur du choix entrepris par le groupe qui, dans le débat entre rupture et continuité, semble adopter une position médiane bienvenue.
Financé suite à une campagne de crowdfunding, Death Of A Hedonist évoque parfois le Without You I’m Nothing de Placebo (My Hope Stands A While) voire Low, Robin Foster ou Marnitude (le sommet Enter You Inside est typiquement ce que l’on pouvait attendre de mieux du groupe). Car oui, Marnitude est déjà une référence. Un post-rock mâtiné de folk et de slowcore qui, l’air de rien, est relativement atypique dans le paysage musical actuel. Ce qui est rare est précieux, d’autant plus lorsque c’est si pleinement chargé en émotion et abouti artistiquement. En ce sens, cinq ans après, Death Of A Hedonist est le réel successeur de cet EP éponyme qui avait tant marqué les esprits.
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