You’re not lost or broken yet...

La nouvelle est tombée au début de l’été, un peu dans l’indifférence générale. Noyée dans les annonces de personnalités musicales ou cinématographiques ayant passé l’arme à gauche dans un climat de droite délétère, une info inattendue allait apporter un peu de lumière dans un été gris pâle : Peter Milton-Walsh reforme The Apartments, le temps de quelques concerts en Australie. Pas de nouvel album à promouvoir, pas de best-of, pas de rééditions d’albums mythiques devenus pourtant introuvables. Non une reformation sans effet d’annonce tape à l’oeil, sans arrière pensée mercantile, sans attente inconsidérée non plus, une reformation juste pour le plaisir d’une poignée de fans possédant un rapport intime et fascinant avec la musique de The Apartments. Il suffit de parcourir le net à la recherche de quelques chroniques enflammées pour se rendre compte à quel point les chansons de Peter Milton-Walsh peuvent bouleverser, provoquer des émotions impalpables et tout simplement, changer des vies.
Il faut dire que The Apartments a tout du groupe maudit. Fondé en Australie au début des années 78, le groupe splittera une première fois en 1979 immédiatement après la parution de leur premier EP Return Of The Hypnotist sur le label de Grant Mc Lennan des Go-Betweens. Peter Milton-Walsh participera à plusieurs formations obscures avant de s’exiler à Londres où il sera signé sur le label Rough Trade qui publiera en 1985 The Evening Visits... And Stays For Years, le premier album de The Apartments qui sous une pochette sépia, distille une pop ligne claire alors en vogue à l’époque, mais une pop angoissée, perclue de doutes et de souffrances. Après une tournée en Europe où le groupe bénéficiera d’une relative reconnaissance notamment en France, terre d’asile bien connue des artistes incompris sur leurs propres terres, Peter Milton-Walsh et The Apartments disparaitront de la circulation pendant près de huit ans. Désillusions, retour en Australie, drogues, alcools, dépression, échecs amoureux, le lot commun et presque banal de l’artiste torturé. Jusqu’au jour où au cours d’un repas, une amie en larme lui confiera à quel point sa musique avait bouleversé sa vie et le suppliera de reprendre la musique.
Il en résultera Drift, sommet discographique et chef d’oeuvre absolu de romantisme noir. Peter Milton-Walsh joue ici cartes sur table. Les rythmiques sont lourdes, les guitares tranchantes, les mots à fleur de peau et puis surtout il y a cette voix, mal assurée dont on sait qu’elle ne triche pas, qu’elle ne ment pas. Drift est un immense disque de frustrations évacuées, d’émotions refoulées pendant tant d’années. Le désenracinement (The Goodbye Train), le désespoir (Mad Cow), la compassion (All His Stupid Friends), la fuite de l’oppression urbaine (Could I Hide Here), autant de sentiments qui s’évaporent de Drift , autant de chansons bouleversantes qui touchent en plein coeur et laissent exsangue. Deux ans après, The Apartments sortiront A Life Full Of Farewells, plus apaisé et superbement produit, pedal-steel, cordes et cuivres venant embellir les compositions magnifiques de ce songwriter de génie dont She Sings To Forget You, une reprise piano/voix de The Goodbye Train proprement déchirante. Le groupe publiera ensuite deux autres disques, Fête Foraine et Apart avant que Peter Milton-Walsh ne disparaisse à nouveau en 1997 pour se consacrer à son fils gravement malade.
Dix ans après, impossible de dire ce qui le pousse à remonter sur scène, à rejouer ces chansons d’une tristesse insondable, si ce n’est la prise de conscience que celles-ci représentent des balises éclairées indispensables et rassurantes pour une poignée de fans.

Une page myspace a été créée suite à la reformation du groupe. On peut y lire une interview de Peter Milton-Walsh, ainsi que des reviews des concerts australiens, en priant pour une venue prochaine en France, terre d’adoption du groupe...


Blog - 27.08.2007 par Aurelien
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