L’Overd00’s : 2000
Un bilan de la décennie écoulée c’est bien, mais c’est quand il y en a plusieurs que l’overdose frappe rapidement à la porte de tous les internautes. Un peu d’astuce, d’espièglerie et c’est toute la rédaction associée aux membres du Forum Indie Rock qui vous présentent 11 articles, 200 albums et à n’en pas douter quelques découvertes pour redonner ses lettres de noblesse aux années 00’s.
Nous voici enfin parvenus au terme de cette Overd00’s, 12 mois passés à remonter le temps en musique pour en arriver au bilan de cette année 2000 terminée il y a tout juste 10 ans. Une année charnière nettement plus marquée que celle que nous venons de vivre, avec son lot d’œuvres majeures par des artistes en passe de devenir fondamentaux pour leur époque, de révélations et de chants du cygne, mais aussi aussi bien sûr de grands disques maudits et d’albums un peu à part. Une année pleine en somme, marquante pour la majorité des votants du forum, l’idéal pour clore ce voyage que nous sommes ravis d’avoir effectué en votre compagnie, en espérant vous avoir donné quelques pistes pour découvrir ou redécouvrir chef-d’œuvres oubliés et autres perles plus obscures passées à l’époque entre les mailles du filet.
Air - The Virgin Suicides
Film culte de toute une génération, la BO de The Virgin Suicides, signée Air, n’a probablement pas été étrangère au succès de Sofia Coppola tant l’ambiance narrative du disque y joue un rôle important.
A l’exception de Playground Love (vidéo ci-dessous), chanté par Gordon Tracks aka Thomas Mars (Phoenix), l’ensemble des morceaux sont instrumentaux, contribuant à la tension du film jusqu’à son apogée, Underground Suicide, titre ultime sur lequel Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin remixent entre autres la voix du narrateur reprenant la chronologie du film en guise d’épilogue tragique.
Avec cette BO, Air prend un tournant moins électro et plus orchestral qui sera confirmé avec 10 000 Hz Legend et Talkie Walkie.
(spydermonkey)
At The Drive-In - Relationship Of Command
D’At The Drive-In on retient surtout aujourd’hui la trajectoire de ses membres, partis fonder Sparta ou The Mars Volta, avec une sympathie toute particulière pour son guitariste Omar Rodríguez-López auteur ces dernières années du parcours de stakhanoviste que l’on sait, en solo, en groupe ou en collaboration avec Money Mark, Zach Hill, Lydia Lunch, John Frusciante, etc...
Et pourtant, s’il demeure naturel d’apprécier ce Relationship Of Command pour sa formidable efficacité rythmique et ses mélodies en montagnes russes, on oublie trop souvent à quel point ce troisième et dernier opus du combo texan sut se révéler essentiel au tournant de la décennie pour toute une génération de groupes adolescents, leur démontrant qu’il était encore possible en plein revival garage d’allier sensibilité pop et violence post-hardcore, ambition artistique et succès public, esthétique rock et poésie opaque aux allusions politiques, touchant même au dub sans céder encore aux sirènes du prog rock à l’image de The Mars Volta né l’année suivante des cendres du groupe sous l’impulsion de Rodríguez-López et du chanteur Cedric Bixler-Zavala.
Un univers contrasté qui aura accouché du meilleur comme du pire mais nous aura au moins préservés de la mainmise sur les Myspace lycéens d’un rock tiède et calibré FM.
(RabbitInYourHeadlights)
Badly Drawn Boy - The Hour Of Bewilderbeast
Revenu après la parenthèse du trop classique Born In The UK en honnête artisan d’une pop impressionniste et feutrée avec l’élégant It’s What I’m Thinking Pt. 1 en octobre dernier, Damon Gough à ses débuts montrait une toute autre ambition : laisser libre cours à ses envies de songwriter sans autre barrière que celles de l’imagination, à la façon de Nilsson à l’époque d’ Aerial Ballet ou Pandemonium Shadow Show et à l’image de ses contemporains du Beta Band ou dans un autre univers d’UNKLE qui l’avait révélé au chant deux ans plus tôt sur le génial Psyence Fiction.
Jonglant ainsi entre orchestrations majestueuses et arrangements plus légers voire jazzy, évidence mélodique et subtiles influences électroniques, simplicité lo-fi et densité de production, candeur désarmante et traits d’ironie mordants, le futur auteur du merveilleux One + One Is One flirtait même avec le hip-hop ou le disco sur ce chef-d’oeuvre inaugural gargantuesque et généreux, précis de pop moderne aussi spirituel que groovesque qui fit connaître au passage le producteur Andy Votel, co-fondateur avec le barbu au bonnet du label Twisted Nerve, et les Doves en backing band de luxe.
Une bible inépuisable dont peu de formations malheureusement ont su depuis tirer les enseignements, on citera Field Music et son récent Measure ou pourquoi pas Paul Mosley avec le superbe Fear mais sans qu’aucun ne soit véritablement parvenu à renouer avec ce formidable souffle d’inventivité et de liberté.
(RabbitInYourHeadlights)
The Baptist Generals - Dog
La première fois que j’ai posé une oreille sur ce Dog sorti de nulle part, ça a été un véritable choc esthétique. Pourtant, des disques lo-fi, j’en avais déjà écouté un paquet. Mais celui-ci, c’était un peu le dernier maillon de la chaîne, l’espèce la plus évoluée dans la maîtrise du néant technique, un son de vieille K7 poussiéreuse et usée, oubliée un peu trop longtemps au soleil même s’il s’agissait là d’un CD. D’ailleurs la pochette ne trompait pas : sans doute la photocopie d’une photocopie de ce qui semble bien être la photographie d’un chien sur une fenêtre (mais ce n’est pas sûr). À ce niveau d’épure technique, on peut parler de manifeste.
Par la suite, il a donc fallu se renseigner : Dog, premier album craché par les Baptist Generals, duo formé par Chris Flemmons et Steve Hill, venait tout droit de Denton, Texas. Et c’est vrai qu’à l’écoute de cette alt-country barbelée et furibarde, complètement dégénérée, on pouvait un peu s’en douter. Chris Flemmons, en plus d’avoir la voix d’un grand-père centenaire brisé par la vie (alors qu’il devait avoir tout au plus une trentaine d’années quand il a enregistré Dog), préfère balancer des pains aux cordes de sa guitare plutôt que de les pincer délicatement. Son compagnon de bruit, Steve Hill, s’occupe lui des proto-percussions (pas de cymbales, hein, trop technique !).
Il en résulte quatorze morceaux qui font penser plus d’une fois à un Violent Femmes moins véloce mais vraiment possédé. Quatorze morceaux habités, souvent incantatoires et parfois même dangereux, vaguement country, vaguement folk, jamais jolis mais toujours beaux, assez punk dans l’esprit et portés par une voix grinçante et narquoise qui aime aussi hululer ou s’essayer au yodel et finit, sur la longueur, par vraiment inquiéter.
Des morceaux qui, enfin, sidèrent. Et sidèrent toujours dix années après.
(leoluce)
Cinerama - Disco Volante
David Gedge restera toujours un mystère pour moi. Vocalement jamais au top, musicalement toujours à la sauce The Wedding Present, j’ai fini un jour par l’adorer, le vénérer. La faute à ses 20 ans de carrière, à une ligne de conduite irréprochable, à des Peel Sessions comme s’il en pleuvait ? Ou tout simplement par la grâce de cette escapade sous la bannière Cinerama, un tantinet plus pop, histoire de lever les dernières réticences sur ses capacités à trousser des pop-songs en pagaille (Lollobridgida, Après Ski, Superman, Wow, 146 Degrees et les autres) ? Il y aurait mille et une façons de vous faire aimer David Gedge et sa bande, sa jeunesse éternelle et ses guitares, ce Disco Volante n’en est qu’un essai convaincant, pas le seul.
(indie)
The Dandy Warhols - Thirteen Tales From Urban Bohemia
Le coup de génie des glandeurs de Portland : treize chroniques emboîtées du petit monde de la rue qu’ils venaient tout juste de quitter, grand melting-pop empruntant au folklore mariachi ou au gospel comme au hip-hop ou même au métal, et dont la production démentielle d’un Courtney Taylor par ailleurs au sommet de son talent de songwriter vaudra aux Dandy Warhols d’être approchés par Massive Attack pour un projet de collaboration heureusement resté sans suite au regard de la disco ultérieure du groupe.
Demeurent néanmoins ce modèle de limpidité (quelle construction, quels enchaînements !) et de modernité dont le rock à guitares des années 2000 n’aura malheureusement pas su s’inspirer, et un paquet de tubes en puissance parmi lesquels Get Off ou ce majestueux Godless, ouverture parfaite aux arrangements langoureux :
(RabbitInYourHeadlights)
The Delgados - The Great Eastern
Si la formation écossaise n’existe plus en tant que telle, on constate aujourd’hui qu’elle est incontestablement à l’origine d’une certaine ferveur musicale née sur place il y a quelques années. A l’époque, Paul Savage, celui qui s’apprêtait à produire tout ce qui se fera de mieux localement (Mogwai, Franz Ferdinand, King Creosote, Arab Strap et plus récemment The Phantom Band), n’était que le batteur de cette formation pop aux multiples talents. The Delgados avait alors eu la bonne idée de baser son répertoire sur l’alliance des chants délicieux d’Alun Woodward (actuel Lord Cut-Glass) et d’Emma Pollock (qui évolue à présent sous son propre nom), à une certaine électricité au contraste saisissant.
The Great Eastern constitue un sommet dans la discographie du groupe, jouant sans cesse de cette alternance de chaud et de froid, et donnant naissance à quelques-unes des plus remarquables compositions de leurs auteurs. Aujourd’hui encore, écouter l’enchaînement de morceaux allant de Thirteen Gliding Principles à Witness reste une expérience qui remue les tripes. L’album n’a certes pas suffisamment fait de bruit il y a dix ans, mais son écho se fait entendre aujourd’hui encore au travers des différents succès qui se dessinent autour de ses trois protagonistes.
(Pol)
Sidsel Endresen - Undertow
Que de chemin parcouru depuis le célébré Exile de 1994 et son jazz impressionniste déjà tenté par l’atonalité et une certaine poésie primitiviste mais toujours ancré dans une tradition instrumentale aux mélodies épurées. Devenue depuis l’une des figures de proue du label Jazzland fondé dans la foulée par son fidèle collaborateur le claviériste Bugge Wesseltoft, c’est ainsi à tout un pan de la musque scandinave que Sidsel Endresen allait ouvrir la voie avec Undertow, manifeste fondamental au même titre que les premiers travaux de Supersilent pour cet ambient-jazz à la fois organique et abstrait qui trouve sans doute ici sa forme la plus habitée.
Car outre l’instrumentation tâtonnante, privilégiant guitares feutrées au jeu minimaliste et nappes impressionnistes plus ou moins ténébreuses ou éthérées pour façonner ces atmosphères en clair-obscur et aux contours mouvants, il y a bien sûr cette voix unique au timbre évoquant les cavernes de glace, maîtrisant l’espace et le temps comme seuls Scott Walker ou David Sylvian avaient su le faire avant elle, et dont les incantations confiantes sont capables de se muer l’instant d’après en babillages angoissés empreints d’une poésie opaque.
Une voix que l’on retrouvait cette année plus erratique et fascinante que jamais au côté des trompettistes Arve Enriksen (de Supersilent) et Nils Petter Molvær (croisé sur Undertow ) ou encore du guitariste Eivind Aarset sur le fabuleux ... And Poppies From Kandahar d’un autre visionnaire du cru, Jan Bang fondateur notamment du festival Punkt et dont ce premier album en solo sorti justement sur le label de David Sylvian peut témoigner mieux qu’aucun autre d’une influence qui se mesure à l’aune de celles d’Anne Clark, Björk ou encore Stina Nordenstam depuis cet Undertow proprement abyssal, qui fut alors à l’ambient-jazz ce que Blemish serait trois ans plus tard à son pendant plus "pop" : un sommet d’épure aussi majestueux qu’irréductible.
(RabbitInYourHeadlights)
Flying Saucer Attack - Mirror
Le chant du cygne du génial Dave Pearce avec FSA, qui livrait là son album le plus frontal et accessible. Mais une production plus léchée qu’à l’accoutumée et l’utilisation parcimonieuse de beats électro, indus ou même hip-hop ne chamboulent pas pour autant l’essentiel, ces vagues soniques certes bien moins abrasives que ce à quoi le Bristolien nous avait habitués avec ses New Lands, Further et autre éponyme durant la décennie précédente mais toujours aussi mélancoliques et planantes (avec un soupçon de psychédélisme inédit), entre shoegaze et ambient folk, contemplation et appel de l’abîme.
Quant à Pearce, il reviendrait trois plus tard au côté de la grande Jessica Bailiff (croisée au chant chez Odd Nosdam justement fan de FSA, et via quatre albums chez Kranky) pour l’unique réalisation de leur projet Clear Horizon, tout aussi indispensable voire même encore davantage.
(RabbitInYourHeadlights)
The For Carnation - The For Carnation
Formé sur les cendres de Slint, The For Carnation vit d’abord son frontman Brian McMahan en faire revivre les plus beaux restes déconstruits sur EP, alternant pics d’électricité et tension aride au côté des guitariste et batteur historiques du groupe précurseur du post-rock David Pajo et Britt Walford, avant de reprendre le projet à son compte, invitant notamment la section rythmique de Tortoise (Doug McCombs et John Herndon) sur le mini LP Marshmallows le temps d’un épique I Wear The Gold à la production distordue et foisonnante.
Toutefois, c’est avec l’appui de John McEntire des même Tortoise aux machines que le natif de Louisville, Kentucky allait perpétuer quatre ans plus tard son génie visionnaire avec cet unique véritable album, chef-d’oeuvre de rock atmosphérique aux guitares feutrées et aux arrangements épurés rivalisant avec les plus belles réussites de Labradford en plus hanté, cf. les interférences du fabuleux Tales (Live From The Crypt) au son nettement plus dense et introduit par la voix modifiée de Kim Deal (cotoyée par Walford sur le Pod des Breeders mais plus ici, le batteur ayant cédé sa place derrière les fûts à un certain Steve Goodfriend, futur Radar Bros.) :
Entre l’apesanteur des accords mélancoliques ou plus angoissés, une section rythmique parfois plus percutante et des traînées ambient souterraines à la tension glaçante parcourue de zébrures cosmiques, on retrouve également Petra Haden (l’une des trois soeurs du fameux Josh de Spain dont le premier album a plus d’un point commun avec des titres tels que Winter Lair ou Salo sur le Marshmallows précédement cité ou Emp. Man’s Blues et Moonbeams ici-même) pour accompagner en toute discrétion sur Snoother le chant introspectif et majestueusement posé de McMahan. Le résultat, époustoufflant de maturité et de retenue, doit autant autant au jazz qu’au krautrock : le minimum de moyen pour le maximum d’effet.
(RabbitInYourHeadlights)
Godspeed You ! Black Emperor - Lift Your Skinny Fists Like Antennas To Heaven
- Godspeed You ! Black Emperor - Lift Your Skinny Fists Like Antennas To Heaven disponible sur Amazon.fr
Un an après Slow Riot For New Zero Canada, Godspeed You ! Black Emperor nous convie pour un voyage de près de quatre-vingt dix minutes réparties sur quatre pistes et deux disques. Et pour cet opus, la bande d’Efrim Menuck a encore franchi un palier en terme de maîtrise technique et de composition, avec notamment une utilisation extrêmement subtile des cordes. Les morceaux de Lift Your Skinny Fists Like Antennas To Heaven alternent entre des périodes de calme et d’autres extrêmement énergiques. Les canadiens se permettent même d’intégrer quelques samples de dialogues qui ne sont pas sans rappeler ceux régulièrement utilisés par les écossais de Boards of Canada.
Les musiciens montréalais jouent ainsi avec nos émotions et, telles des montagnes russes, nous emmènent dans des ambiances apaisantes pour mieux nous dérouter avec un décor menaçant dans les instants qui suivent...
Deux ans après ce chef-d’oeuvre, Godspeed You ! Black Emperor confirmera avec Yanqui UXO que son génie n’avait rien de ponctuel. Autant dire qu’il serait dommage de bouder cet album qui inspirera par la suite de nombreux sommets du post-rock.
(Elnorton)
Goldfrapp - Felt Mountain
Quand le velours candide d’Alison Goldfrapp et son revers morbide dévoilé chez Tricky ou Add N To (X) rencontre le lyrisme malade et les arrangements métissés de Will Gregory, ancien instrumentiste de Portishead marqué par le jazz ou les musiques de films de John Barry, Lalo Schifrin ou Morricone, on obtient la plus belle des BO imaginaires dont David Lynch eût jamais pu rêver.
Dernière pièce maîtresse du non-genre qu’était encore le trip-hop avant de se réincarner en fantasme de néo-jazz vocal pour bobos en mal de langueur lounge, Felt Mountain en incarnait alors mieux qu’aucun autre album ait jamais su le faire toute l’ambivalence aussi bien musicale que vocale, oscillant entre l’ampleur gracile ou parfois plus épique des orchestrations et un malaise insidieux fait de dissonances inquiétantes et de subtils dérèglements électroniques évoquant en creux les traumas mystérieux d’une Alison Goldfrapp capable de gravir les octaves telle une cantatrice pop à la voix d’exception pour mieux explorer l’instant d’après les sombres tréfonds d’un inconscient malmené.
Un coup d’essai en forme de coup de maître, inégalé malheureusement par le duo anglais malgré le beau Seventh Tree de 2008 qui aura toujours eu le mérite de redresser, pour un temps du moins, la barre d’un vaisseau définitivement coulé par Alison et ses envie d’italo-disco à la Georgio Moroder sur le piètre Head First paru en mars dernier.
(RabbitInYourHeadlights)
Grandaddy - The Sophtware Slump
On ne présente plus ce recueil d’odes cosmiques à la solitude des inadaptés, chef-oeuvre de pop lo-fi aux envolées électro-acoustiques cotonneuses savamment bricolé par les barbus de Modesto, capables de vous faire sourire béatement pour mieux vous tirer des larmes la minute d’après. Allégorie du spleen de ces adolescents dans l’âme confrontés à la nécessité de grandir pour affronter les turpitudes de la société, The Sophtware Slump choisit l’angle du concept album avec l’histoire de Jed l’Humanoïde confronté à la récession de son univers technologique face à la nature qui reprend ses droits.
Plus lyriques et touchants que jamais, Jason Lytle et sa bande de faux mormons étaient alors à leur sommet, gardant tout de même de beaux restes pour un Sumday encore plus mélancolique et aérien avant d’en terminer paresseusement sur un Fambly Cat nettement plus dispensable qu’aura heureusement fait oublier le nouveau projet monté par l’Américain et son batteur Aaron Burtch avec le duo Earlimart, un certain Admiral Radley.
(RabbitInYourHeadlights)
PJ Harvey - Stories From The City, Stories From The Sea
Ambassadrice de premier ordre du rock à guitares dans les années 90, PJ Harvey était attendue avec ce cinquième opus (hors collaboration avec John Parish) et signait là un sans-faute discographique après quatre albums (presque) aussi bons les uns que les autres. Stories From The City, Stories From The Sea est en effet un bijou rock où l’accent néanmoins est mis sur la mélodie (Horses In My Dreams, We Float), annonçant déjà le virage à 180° opéré sept ans plus tard sur White Chalk après un anecdotique Uh Huh Her.
On retrouve également Thom Yorke - ayant sorti Kid A mais également collaboré avec Björk sur un titre de SelmaSongs la BO de Dancer in the Dark en cette même année 2000 - aux backing vocals sur One Line et Beautiful Feeling et en duo sur This Mess We’re In, participant de ses choeurs fantomatiques à l’atmosphère feutrée et pesante de certains titres, qui alternent avec quelques perles plus frontales à l’image de ce Big Exit :
(spydermonkey)
Radiohead - Kid A
Il faut se rappeler en l’an 2k combien l’attente d’un nouvel album de Radiohead était grande, avec cet espoir d’entendre une suite dans la droite lignée d’ Ok Computer sorti trois ans auparavant et plébiscité par la critique et le public comme rarement. La tournée européenne qui précédait et préparait la sortie de ce Kid A, dans de superbes lieux antiques et inattendus, montrait le nouveau visage d’un groupe qui n’avait évidemment pas oublié son passé mais qui avait principalement les yeux tournés vers l’avenir et la modernité avec une orientation musicale imprévisible et déconcertante.
Il faut donc se souvenir combien la surprise et la stupeur de découvrir ce Kid A furent grandes, on pourrait presque l’oublier aujourd’hui, habitué désormais à l’univers expérimental et mutant du quintette d’Oxford. Cet album était en quelque sorte l’enfant qui allait marquer ce changement de millénaire en voyant l’électronique prendre notamment le pas sur les guitares, l’émergence d’une musique fluctuante et mouvante aux influences difficilement associables et pourtant étrangement évidentes. Il s’agissait là d’une oeuvre qui n’hésitait pas à éprouver et charmer l’auditeur par ses rythmiques impressionnantes et hypnotisantes ou encore ses mélodies glaciales et mélancoliques. Le groupe avait assurément pris de grands risques en livrant un album difficile et peu commercial (aucun single ne sortira d’ailleurs à sa demande, chaque titre étant depuis devenu un classique) confortant cette direction avec son frère jumeau et indissociable Amnesiac.
Finalement, avec cette nouvelle direction moins immédiate que par le passé, le groupe s’assura une reconnaissance et une crédibilité encore plus grandes, aussi bien professionnellement que du côté du public, marquant à jamais ce millénaire dès son ouverture (et par la suite), en témoigne cette belle première place.
(darko)
Sigur Rós - Ágætis Byrjun
En français, Ágætis Byrjun signifie "bon début" et on peut dire qu’avec ce deuxième opus, les Islandais commençaient bien cette nouvelle décennie - même si la date de sortie officielle du disque a fait polémique. Et s’il a aujourd’hui atteint le cercle fermé des groupes cultes, Sigur Rós, parrainé par Radiohead et Godspeed You ! Black Emperor - excusez du peu - le doit grandement à ce deuxième album.
L’atmosphère plombée de Von laisse la place a une ambiance, certes toujours pas joyeuse, mais nettement plus aérienne. Le groupe se forge dès lors un son qui lui est propre, créant une atmosphère très identifiable, qu’ils conserveront jusqu’à Takk... (et la compilation Hvarf / Heim ). La popularité de l’album croît, au point de voir certains titres composer les BO de Vanilla Sky (Ágætis Byrjun, Svefn-g-englar) ou encore d’ Immortel (Hjartað Hamast).
Comme dans nombre de leurs clips, la violence présente dans la vidéo de Viðrar Vel Til Loftárása - "Temps idéal pour raids aériens" en français - tranche avec la musique poétique du quatuor.
(spydermonkey)
Elliott Smith - Figure 8
Que voulez-vous qu’on vous dise sur ce cinquième et dernier album d’un songwriter d’exception ? Oui, n’en déplaise à sa famille et aux gens qui œuvrent pour perpétuer physiquement la mémoire d’Elliott Smith, on ne saura jamais pourquoi il est mort, on ne saura jamais ce qu’il aurait pu encore nous livrer comme albums d’anthologie. Il ne nous reste que des symboles, la cover de ce Figure 8 en tête, une photo d’Elliott Smith dos au mur prise par Autumn de Wilde à Los Angeles sur Sunset Boulevard ; depuis, l’endroit est bien évidemment devenu lieu de pélerinage et mémorial pour tous les fans. Il ne nous reste que ses chansons, cet album tout comme le reste de sa discographie recélant des merveilles dont on ne se lassera jamais. Il ne nous reste que des larmes, toujours plus nombreuses à chaque fois qu’un artiste de cette trempe s’en va. Et il nous reste aussi un "fils spirituel", Julien Pras (Calc), seul capable de nous consoler, mais ça c’est une autre histoire.
(indie)
Smog - Dongs Of Sevotion
Pourquoi ce Dongs Of Sevotion plutôt que les sommets de songwriting que pouvaient constituer Supper en 2003 ou dans une veine plus dépouillée le magnifique A River Ain’t Too Much To Love, dernier opus enregistré par Bill Callahan sous son pseudo de Smog ? C’est tout simple : quitte à faire entorse aux règles fixées au sein de la rédaction (pas plus d’un album par artiste) après avoir déjà mentionné Sometimes I Wish We Were An Eagle en ouverture de cette overd00se, autant le faire avec l’album le plus singulier de la discographie de l’Américain. Car tout n’est pas question de songwriting chez Smog, loin s’en faut.
En témoigne donc mieux qu’aucun autre ce huitième opus, un disque dyslexique à l’image de son titre, premier enregistré sans Jim O’Rourke depuis Julius Caesar en 93 mais tirant le meilleur de la production épurée et minimaliste ou des embardées électriques plus rêches de Knock Knock (mais définitivement loin du son lo-fi et de l’univers foutraque des débuts) aussi bien que de la tonalité crépusculaire du célébré The Doctor Came At Down tout en renouant avec le côté détraqué, épique et un peu hanté de Wildlove. Un album-somme donc, particulièrement consistant et abouti, mais un album qui voit aussi plus loin, des riffs dissonants sur boîte à rythme de Justice Aversion et The Hard Road aux arrangements soul sur Strayed ou Cold Discovery en passant par les réminiscences de folklore indien de l’épopée western Bloodflow.
Car avec John McEntire aux fûts et Jeff Parker à la guitare, c’est également Tortoise qui s’invite une fois de plus dans cette overd00se, de quoi compenser l’absence du visionnaire Standards dans notre bilan 2001 et donner aux chansons plus inspirées et habitées que jamais d’un Callahan au sommet de sa forme musicale un cachet aventureux jusque dans les arrangements (cf. les claviers fantomatiques de Devotion) ou les détails d’une production qui culmine sur la tension orageuse du formidable Distance :
(RabbitInYourHeadlights)
The Third Eye Foundation - Little Lost Soul
Album de transition à plus d’un titre pour le Bristolien, Little Lost Soul voyait Matt Elliott s’extirper du cauchemar autiste de ses trois premiers opus, culminant deux ans plus tôt sur un You Guys Kill Me déjà moins noisy et chaotique mais d’autant plus désespéré et malaisant, pour laisser errer sa mélancolie dans des limbes certes tout sauf joyeuses mais néanmoins plus accueillantes.
S’ouvrant plus largement à la voix humaine, en l’occurrence celles de fantômes du passé piégés dans un purgatoire fourmillant de drones et autres arrangements éthérés, à défaut de la sienne propre qui viendrait bientôt habiter et hanter autant d’albums enregistrés sous son véritable patronyme, cette quatrième réalisation laisse ainsi transparaître l’influence de la musique classique contemporaine, de la folk et de ces choeurs issus des folklores yiddish ou balkanique en passe de devenir prépondérante chez le musicien jusqu’à son retour même en tant que Third Eye Foundation en novembre dernier avec l’ambitieux The Dark, mais aussi un certain goût pour le jazz dont les rythmiques feutrées prennent peu à peu le pas ici sur une drum’n’bass épurée à l’extrême.
Soit un album fascinant, comme en flottement entre deux mondes, la conscience et le rêve peut-être à moins qu’il ne s’agisse tout bonnement de l’enfer et du paradis.
(RabbitInYourHeadlights)
Shannon Wright - Maps Of Tacit
Pourquoi choisir de parler de Shannon Wright seulement maintenant ? Pourquoi Maps Of Tacit alors que tant d’autres albums de l’Américaine semble s’imposer dans son impeccable discographie ? Tout simplement parce que ce deuxième album post Crowsdell est à mon humble avis la quintessence de ce que Shannon Wright est capable de nous livrer. C’est sur cet album qu’est apparu, avec le concours de Steve Albini aux manettes et Brian Teasley à la batterie, ce son sec et indispensable (Within The Quilt Of Demand). C’est sur Maps Of Tacit qu’on découvre cette voix crêve-coeur, douce et déchirante (Fences Of Pales, Dirty Facade). C’est sur cette merveille qu’on découvre Shannon Wright à l’état brut (Flask Welder, Pay No Mind), et en version acoustique (Absentee, Noise), le genre d’exploit qu’on rêverait de la voir rééditer. De Maps Of Tacit tout est né, certainement le meilleur est arrivé par la suite mais un retour aux sources restera pour moi le rêve absolu.
(indie)
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