Les deux meilleurs albums électro de ce mois d’avril partagent l’affiche de notre streaming d’aujourd’hui. Points communs ? Leurs auteurs sont latins et nous offrent le fruit de leur labeur en téléchargement à prix choisi.

D’un côté un album attendu, celui du Turinois Monade dont le précédent opus Pt#9 nous avait particulièrement impressionnés l’an dernier tant pour la profondeur de champ de ses compositions cyber-organiques que pour sa capacité à les couler dans un ensemble cohérent en perpétuelle construction. Cinq références plus tard, le label belge Xtraplex est passé d’espoir à valeur sûre pour les amateurs d’électro atmosphérique et texturée, et bien que la progression narrative s’efface aujourd’hui au profit des diverses humeurs tantôt anxieuses (Lograph), rêveuses (Ji Will) ou mélancoliques (Far From Home) qu’explore tour à tour le beatmaker italien, Own Your Ghost en est sûrement déjà l’un des plus beaux fleurons, enchaînant les sommets à la fois mélodiques et déstructurés sans pour autant omettre de ménager une ligne directrice digne de ce nom à cette collection d’instrumentaux finalement plus élégante que véritablement hantée. Ce thème en filigrane, c’est celui des blessures dont les cicatrices deviennent peu à peu nos confidents, des regrets que l’on finit par accepter comme partie intégrante de ce que l’on est devenu, ces "fantômes" du titre dont les manifestations caressent ou lancinent nos sens, qu’elle soient cristallines (Veil, transcendé par la délicatesse du piano et des idiophones) ou rampantes (Muriel, extrait de notre compilation Ashes ), privilégiant les synthés oniriques (Both As Infinate As The Universe), les pulsations distordues (Yvb) ou les beats plus frontaux (Errol) :

Quant à Fernando Visockis, dont les abstractions impressionnistes empruntant au glitch comme à l’acoustique de chambre ou au drone ont finalement quelques atomes crochus supplémentaires avec Monade, son tout premier album vient nous rappeler aux vertus de l’errance sur Bandcamp par tags interposés. Après quelques recherches infructueuses sur la Toile qui l’a vu naître, Textures In Sight donne effectivement l’impression de sortir de nulle part, si ce n’est de l’esprit affuté de ce Brésilien totalement inconnu au bataillon mais dont la maturité en impose d’emblée à l’écoute de ces compos à la croisée du pointillisme algébrique de Ryoji Ikeda (Town Of Cats, (l)in_ear), des pulsations avant-gardistes de Mark Fell (AcisuM MusicA, Just Another Cheesy Love Song), des radiations solaires de Chris Weeks (Crashes & Weird Looseness) et du microsound sous perfusion néo-classique de la paire Alva Noto/Sakamoto (Sealed Treats). Une dimension acoustique qui n’aura pourtant pas longtemps vocation d’’apaiser les stridences des parasites analogiques et se fera même nettement plus atonale et hantée en fin d’album, notamment sur les perturbants A Gravidade e a Graça et Logum Umd Nancarrowvs :