Des Pies Chicaillent : "Tu l’emmènes au Mont-Saint-Michel et il en parle à ses copains"

Alors que la deuxième édition du Pies Pala Pop Festival se déroulera les samedi 9 et dimanche 10 juin prochains au Jardin Moderne à Rennes, nous choisissons aujourd’hui d’accorder la parole à Quentin, l’un des dirigeants de l’association Des Pies Chicaillent. A l’heure où le concept du Sulfure, cher à notre webzine, touche certaines limites en raison d’une offre éléphantesque de concerts en région parisienne, cette structure de passionnés bretons parvient à conjuguer programmation alléchante et intérêt du public.

- Bonjour, à quelques encablures de la deuxième édition du Pies Pala Pop Festival, pouvez-vous présenter votre association, qui organise des concerts à Rennes depuis 2016 ?

Des Pies Chicaillent c’est une association qui s’est effectivement créée pour commencer à faire des concerts en 2016 suite à un mail envoyé par Baptiste et Annoc à Jeffrey Lewis qui leur a répondu que : “oui, bien sûr, il serait super content de venir jouer à Rennes”. Du coup, derrière, il a fallu s’y mettre et apprendre petit à petit ce que ça implique d’organiser un concert : trouver un lieu, gérer l’accueil technique, trouver un ingé son, préparer des repas cool maison, un endroit où dormir, où entreposer le matériel des artistes de manière sécurisée etc… Petit à petit, ils ont dû demander des coups de main par ci par là et des bénévoles se sont rajoutés à l’association. Depuis deux ans, on est arrivé à une technicité d’organisation hors pair sans oublier l’humain et les chatons bien sûr. On a pu, grâce à la motivation de tou.te.s les bénévoles mais aussi de la formule Open Air clef en main du Jardin Moderne, organiser notre premier festival l’an dernier. On aime les trucs chiants folk, les artistes chatons, les gens qui chantent bien, les gens qui chantent pas bien bien et le baume au cœur.

Du coup ça donne qu’on a invité l’an dernier Lewsberg, Rouge Gorge, Claptrap, R.AGGS, Les Clopes, Junk Drawer, Belvoir et Deliluh. Et que cette année on invite Italia 90, Air Waves, Model/Actriz, Radical Kitten, Ribbon Stage, Selen Peacock, Jokari, Oruã, Comfort et What Are People For ?.

- Vous avez déjà accueilli des artistes aussi appréciés, dans nos colonnes, qu’Efrim Manuel Menuck, Laish, Pan American, Seabuckthorn, Gareth Dickson, Spirit Fest, Tenniscoats, Laëtitia Sheriff ou This Is The Kit. Comment s’y prend-on, quand on démarre, pour attirer de tels noms ?

Un coup de bol au début. Il faut en attraper un.e et ensuite, tu le/la nourris avec de la bonne bouffe maison, tu lui donnes un oreiller trop bien pour dormir, tu l’emmènes au Mont-Saint-Michel ou juste à Rennes découvrir ce qu’est une galette, tu lui proposes un endroit chouette pour jouer devant un public cool et après, ça fait effet boule de neige. Il en parle à ses copain.es et ils se passent le mot.

- On comprend la logique pour les artistes, mais comment noue-t-on des partenariats avec des salles ? Vous avez programmé des dates dans des salles telles que le Jardin Moderne, mais également à l’Institut Franco-Américain ou même dans une école élémentaire, sous un chouette soleil, pour une superbe date l’an dernier avec Spirit Fest et Tenniscoats. On sent une volonté de varier les plaisirs et d’offrir des concerts uniques en leur genre. C’est une volonté ou une nécessité pour abaisser les coûts ?

C’est à la fois une volonté parce que c’est bien de changer d’ambiance et qu’un lieu peut plus coller à la musique d’un groupe qu’un autre mais ça peut aussi devenir une nécessité pour des histoires de jauge notamment. Parfois, on sait qu’on invite un groupe qui va attirer plus de monde, donc on ne peut pas le faire jouer dans un bar. Parfois, c’est le cachet de l’artiste qui détermine le lieu. Suivant ce qu’il demande comme sous, on va plutôt le/la faire jouer ici ou là.

Le concert de Spirit Fest et Tenniscoats, par exemple, combine un peu tous les cas de figure en même temps. C’est à la fois cool de les faire jouer dans une cour d’école arborée en été parce qu’ils proposent une musique douce qui nous ramène à la nature, et les faire jouer un dimanche dans cette cour d’école nous a permis d’avoir des subventions qui nous ont permis de payer quasi entièrement le cachet des artistes. Et quand on n’a pas besoin de payer les artistes, on peut proposer le concert en accès libre et gratuit aux gens, ce qui permet d’attirer des personnes qui n’ont pas forcément l’habitude de venir à nos concerts, comme les enfants. C’est un cas classique Win-Win-Win-Win. D’ailleurs, je parlais avant de l’effet boule de neige/bouche à oreille. Et bien, on va sans doute programmer en septembre un groupe culte qui a vu qu’on avait fait jouer Tenniscoats et j’ai l’impression que ça a galvanisé encore plus son enthousiasme pour venir jouer à Rennes.

- Pour revenir à cette deuxième édition du Pies Pala Pop Festival, qui aura lieu les 9 et 10 juin prochains au Jardin Moderne à Rennes, pouvez-vous nous présenter plus précisément cet événement et les artistes programmés ? S’il y a plein de découvertes en perspective, je reconnais de jolis coups de cœur pour la noise pop de Ribbon Stage, le psychédélisme krautrock d’Oruã, ou même le post-punk d’Italia90.

On a effectivement du post-punk avec Italia 90 qui a sorti un des meilleurs disques de ce genre des dernières années. On ne s’ennuie pas, ce n’est pas que du post-punk, il y a aussi des refrains catchy assez pop, des trucs plus noise, un tube bien punk 77 et surtout, surtout, des paroles qui disent quelque chose, et ça c’est super important. Dans ce registre post-punk/noise, on a aussi Model/Actriz qui est à classer plutôt du côté dance de la force, c’est une espèce de Gilla Band en mode Club Technoise. Et on a aussi de la douceur et de l’émotion avec les chansons bien prenantes d’Air Waves. On peut aussi citer la délégation toulousaine avec le yin et le yang de la musique de la ville rose, à savoir la pop bricolée décalée de Jokari et le noise rock de Radical Kitten.

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Sinon, il y a Cute, pas prise de tête, des gens qui sont cool. Et entre les deux, il y a effectivement Ribbon Stage, pour tous les amateurs de Beat Happening, The Pastels ou encore The Gerbils. Et puis, on a aussi le moment brut de pomme avec Comfort et des moments ovnis avec le psyché d’Oruã et de Selen Peacock. Ensuite, les inclassables What Are People For ?, à la croisée de The Slits, du Tom Tom Club et des Pussy Riot pour le côté performance scénique.
Et bien sûr des moments de pure joie entre chaque concert avec les DJs Pouss Disk, Esteban Smith et Lady Jaja ainsi que les Majorennes (spectacle de majorettes).

- Les prochains événements Des Pies Chicaillent se préparent, on l’imagine. A quoi peut-on s’attendre ?

Du gros gros gros gros lourd, on va faire jouer un de mes groupes préférés le 8 novembre à la salle de la cité. Ça c’est sûr, on l’annonce la semaine prochaine (ndlr : Deerhoof en l’occurrence) et il y aura aussi, peut-être, un autre groupe culte (celui qui aime Tenniscoats) en septembre. Je peux te dire qu’on est un peu des fifous là dessus et que heureusement qu’on a la bonne bouffe à leur proposer !

Sinon on est sur d’autres artistes tout aussi cool mais moins connus et peut-être plus raisonnables, mais rien n’est calé pour le moment.

- Et enfin, pourquoi Des Pies Chicaillent ?

Attention les vegans/végés, ce qui suit n’est pas pour vous. En fait, c’est la grand-mère d’Annoc (une des deux fondatrices de l’asso) qui avait l’habitude de découper de la viande avec une paire de ciseaux. Je ne sais plus si c’était pour faire à manger ou si c’était des "déchets" pour d’autres animaux. Bref, elle disait que c’était "des pi chikaï", ce qui se traduit peut-être comme "des p’tits chicailles", des petits bouts de viande faciles à manger, selon mon interprétation. Ce qui est sûr, c’est que Annoc et Baptiste (les fondateurices) ont trouvé l’expression rigolote et l’ont transformée. En vrai, on est pas des viandards absolus, on fait largement plus de repas végés pour nos bénévoles et nos artistes que des pi chikaï.


Interviews - 01.06.2023 par Elnorton