Le 31 octobre, alors que Cannibal Ox lâchait dans l’indifférence générale un nouveau morceau léger mais plutôt bien troussé aux accents cosmiques évidents (en même temps, avec un producteur du nom de Bill Cosmiq...) et Planet Asia en featuring, gratifié d’à peine quelques centaines de vues à ce jour sur le Tube, un autre génie devenu discret de la galaxie Def Jux repointait également le bout de son nez, sans plus de succès à en juger par la poignée de téléchargements qui orne le tableau de chasse de l’ex Company Flow sur Bandcamp : rien de moins que Bigg Jus, associé au rappeur new-jersien Fatboi Sharif et au beatmaker Justoleum Kingspitter pour un EP 4-titres libertaire et noisy comme à la grande époque de Machines That Make Civilization Fun (11 ans déjà).

Avec l’Américain, on sait à quoi s’en tenir en termes de radicalité et avec ses beats déstructurés et autres drones lancinants, Insomniac Missile Launcher ne déroge pas à la règle. De l’étouffant morceau-titre sans la moindre respiration, sur lequel le flow d’ogre de Fatboi Sharif fait tout autant merveille que celui, atonal et à contretemps, de Bigg Jus, on passe ainsi à un Grimy Squadron Grow A Garden complètement extratrerrestre qui semble télescoper musique caribéenne et hip-hop dystopique puis à un Ghost Story aux beats étouffés, où les deux compères rappent sur une ambient papier-de-verre aux harmonies de purgatoire, évoquant les limbes chorales d’un soundtrack de Kenji Kawai période Ghost in the Shell passé au filtre saturé. Quant à l’hypnotique final God, avec ses samples cinématographiques séquencés au scalpel pour en faire une sorte d’hymne martial et désespéré, il s’avère tout aussi singulier, dans la continuité presque glitch de l’album sus-nommé... autant dire qu’arrivé au bout de ce petit quart d’heure de musique, on est aussi emballé que frustré par l’envie irrépressible d’en entendre davantage !