Violoncelliste ambient atypique, ça n’est pas du côté du néo-classique mais bien d’un drone mystique et ténébreux dans la mouvance d’une Marielle V Jakobsons en plus lo-fi et déstructuré qu’officie la Californienne Shanna Sordahl, précédemment instrumentiste pour le patron du label Full Spectrum - qui publie ce premier album - au sein de son Andrew Weathers Ensemble.

La Bay Area californienne n’est en effet pas le seul point commun entre l’auteure de Glass Canyon ou Star Core et Shanna, elle-même adepte sur cet album, dédié à la pérennité de la mémoire, d’un souffle quasi mythologique à la lenteur consommée, où les cordes capiteuses se fondent dans un background ésotérique et intrigant de pulsations organiques, d’oscillations synthétiques et de basses bourdonnantes (Tortoise Lives Long & with Purpose). Parfois, comme chez Marielle, quelques lignes vocales s’extirpent de l’abîme des souvenirs enfouis, si ce n’est qu’elles viennent plutôt ici en renforcer le sentiment d’angoisse sourde et radiante (Everyday). Ailleurs, le violoncelle prend un court instant les devants dans un dénuement extrêmement minimaliste et fait dissoner le folklore très personnel de sa propre mélancolie (Everything Between, The Strength of Blue), pour mieux disparaître ensuite dans les tréfonds d’un dark ambient minéral et suintant (In the Body).

Mais le plus surprenant sur ce Radiate Don’t Fear The Quietus, c’est cette tendance intermittente à la déconstruction, comme sur le bien-nommé Shapeshifters où le violoncelle amplifié chuinte sur fond de drones glitchés aux hachures promptes à désorienter, donnant l’impression que le disque "saute". Pas facile d’accès mais une fois entré pour de bon dans ce sommet de l’œuvre il prend finalement tout son sens, évoquant la lancinante érosion des souvenirs endeuillés qui s’ils échappent peu à peu à notre portée consciente, continuent néanmoins d’imposer leur présence physique sur notre état d’esprit et notre humeur au quotidien.