Top albums - septembre 2022

Une bonne soixantaine de sorties remarquées puis recensées dans notre agenda en ce mois de rentrée, autant dire que l’on n’avait que l’embarras du choix pour ce retour au format mensuel des classements d’IRM. Ni Pixies ni Lambchop, pas même de Björk et encore moins de Death Cab For Cutie ou de Mars Volta dans ce bilan : on espère parfois trop de ses héros d’antan, d’autant plus lorsque leurs albums précédents étaient loin d’être anecdotiques... mais si vous vivez avec votre époque, vous ne serez pas surpris d’y retrouver quelques-uns de ces groupes qui nous font régulièrement vibrer en ce millénaire pas avare en génies mésestimés.




Nos albums préférés de septembre 2022



1. Nadja - Labyrinthine

Après le doom volatile (shoegazeux ?) de leur imposant Seemannsgarn de l’an passé et celui, particulièrement abrasif et larsenisant, de l’excellent Nalepa de février dernier, le duo canadien, jamais exactement là où on l’attend, en remet une couche dans le massif paradoxalement éthéré (et vice-versa) avec ce bien-nommé Labyrinthine édité en formats physiques par pas moins d’une dizaine de labels de par le monde. Si ce nouvel opus, par le biais des beuglantes malsaines de ses guests masculins Alan Dubin (Gnaw, Khanate) et Dylan Walker (Full of Hell) sur le morceau-titre et le final Necroausterity, renoue avec les influences "metal" plus marquées des débuts d’Aidan Baker et de Leah Buckareff (qui s’en sont depuis souvent éloignés, que ce soit en duo ou en solo pour le premier), les choses sont évidemment loin d’être aussi binaires puisque qu’entre-temps, ce sont Rachel Davies (Esben & The Witch) et Lane Shi Otayonii (Elizabeth Colour Wheel) qui viennent traîner leurs timbres tout aussi tourmentés mais autrement plus mélodiques sur le contrasté Rue au final écrasant et l’ultra-saturé Blurred aux guitares abrasives et liquéfiées, deux morceaux tutoyant eux aussi le hors-format (30 minutes à eux deux) qui évoquent davantage, s’il devait y avoir une comparaison capable de rendre justice à ce disque d’une intensité ahurissante, les élégies crépusculaires et mélangeuses de Wrekmeister Harmonies, autre projet entre deux chaises pour lequel le doom n’est qu’une influence parmi d’autres. À ne pas mettre entre toutes les oreilles bien sûr, mais celles qui sauront en percer le voile de prime abord inconfortable y découvriront probablement l’un des plus beaux joyaux musicaux de ce cru 2022.

(Rabbit)


2. The Bad Plus - The Bad Plus

Les The Bad Plus sont vraiment imprévisibles ! Autrefois, il s’agissait d’un trio de jazz (ou power-jazz tant ils avaient bâti leur réputation autour d’une section rythmique puissante et foutraque), basse-batterie-piano où ce dernier jouait un rôle central. Fertile, lunaire et iconoclaste, le groupe originaire de Minneapolis avait su se tailler une place unique sur la scène jazz. Il avait déjà créé la surprise en 2019 en annonçant le départ du pianiste historique Ethan Iverson, bien lancé dans sa carrière solo, remplacé par Orrin Evans pour deux albums où le groupe a continué à tracer son sillon personnel entre frisson et free jazz. Et voilà qu’en 2022 The Bad Plus réapparaît sous un format inédit. Exit Orrin Evans, bienvenue Ben Monder à la guitare et Chris Speed au saxophone. Un quatuor donc. Et le jazz n’est plus qu’un lointain réflexe. Ici, on flirte plus souvent avec le post-rock, la noise, ou l’indie rock. Mais il s’agit toujours de faire du jazz. Alors, on s’embarque dans des improvisations collectives (Sick Fire), on tourne autour d’un thème alambiqué (Sun Wall), on slalome sur une basse chaloupée (Motivations II). Et, nouvelle surprise, on ne s’amuse pas cette fois à transfigurer un tube de la pop culture. Tout est signé Dave King et Reid Anderson, respectivement batteur et contrebassiste, dont le compagnonnage confine à la fusion. Ce qui marque le plus dans cette nouvelle incarnation du groupe c’est, d’une part, la grande mélancolie qui se dégage, le souffle romantique, la beauté des thèmes, souvent joués à l’unisson saxophone et guitare, et d’autre part, l’impression d’entendre une jeune formation aux idées fraîches, qui donne tout sans pudeur, comme s’il fallait faire ses preuves. Les deux leaders ont pourtant déjà plus de vingt ans de carrière et une bonne quinzaine d’albums dont ils peuvent se sentir fiers (parmi lesquels une demi-douzaine de chefs-d’œuvre !). En voici un qui sonne comme un premier et qui se classe parmi les meilleurs !

(Le Crapaud)


3. Mamaleek - Diner Coffee

Seulement deux ans après le fameux Come and See, le secret le mieux gardé des musiques extrêmes de ces dix dernières années quitte les quartiers sombres de Chicago pour ouvrir les portes d’un de ces fameux diners américains où règnent bonne odeur de café et enchantements familiaux. Seulement on parle ici de Mamaleek… et si la scène de début part d’une crise de rires, c’est dans le fracas des guitares façon diable au corps qu’elle se déroule et non dans un parfum de bonne humeur. C’est toute l’ironie de cet album, qui marque une rupture supplémentaire avec le pan black metal (et le passé du groupe de manière générale) mais s’évertue à sombrer de plus belle : brouiller les pistes dans un ensemble moins crasseux, plus propre sur lui en surface mais tout aussi, voire plus, dégénéré. L’image d’un entre-deux lynchéen entre Double R et Black Lodge qui se dessine rapidement ne ment pas. L’histoire, partagée entre douces rêveries d’un jazz tantôt cool tantôt free, entre groove rythmique et voix écorchée, présente une terre de contraste aux ambiances aussi sordides que rassurantes. L’angoisse, c’est bon… mais bien l’impression que je n’aurai jamais cette part de tarte à la cerise.

(Riton)


4. Esmerine - Everything Was Forever Until It Was No More

On l’écoute depuis mai et sa mise à disposition en digital mais on a attendu sa sortie physique pour affirmer noir sur blanc ce que l’on aurait très bien pu vous dire dès le départ : après presque 20 ans maintenant d’une discographie en tous points idéale, le groupe du percussionniste Bruce Cawdron (GY !BE) et de la violoncelliste Beckie Foon (A Silver Mt. Zion, Hrsta, Land Of Kush), tous deux membres par ailleurs des rares et précieux Set Fire to Flames, n’a aujourd’hui plus aucun concurrent sérieux pour challenger son titre de fleuron du label Constellation. Après les élégies orchestrales aux effluves ethniques de Dalmak, la chamber-folk polyrythmique et libertaire de La Lechuza, le post-rock de chambre nomade à la fois puissant et délicat de Lost Voices ou encore le sommet Mechanics Of Dominion qui synthétisait il y a 5 ans le meilleur de tout ça, Everything Was Forever Until It Was No More n’en finit plus d’impressionner par la subtilité avec laquelle il distille une nouvelle fois les multiples influences du groupe. Toujours au service de ces doux élans à la ferveur irrésistible mais jamais dégoulinante qu’on lui connaît, les arrangements se font ici particulièrement atmosphériques et épurés, au gré de morceaux flirtant plus que jamais, surtout en fin de disque, avec le classical ambient. Une petite merveille de plus à mettre au crédit du combo canadien.

(Rabbit)


5. Oren Ambarchi - Shebang

Épaulé par une véritable all-star team des musiques expérimentales, du pianiste Chris Abrahams (pilier du génial trio The Necks) au bon copain Jim O’Rourke aux synthés en passant par le compagnon de jeu récurrent Johan Berthling à la basse acoustique ou encore Joe Talia à la batterie, Oren Ambarchi s’inscrit avec Shebang dans la continuité électronique et pulsée d’un Quixotism, une électronique jouée avec de vrais instruments mais à distance et accommodée par l’Australien avec une dynamique constante sur 4 longs serpentins emboîtés lorgnant tour à tour sur l’electronica séquencée au scalpel de Matmos ou Mouse of Mars (I), sur un groove libertaire et martien à la Tortoise période Standards (II), sur un jazz métamorphe agrémenté de synthés rétro-futuristes (III) et enfin sur une étrange forme de krautrock maximaliste mi-acoustique/mi-synthétique prêt à décoller pour le firmament d’un ailleurs incertain. Aussi lyrique qu’abstrait, aussi mathématique que vibrant, ce nouvel album est assurément l’une des plus belles réussites du guitariste touche-à-tout de mémoire récente - c’est dire, puisqu’on continue régulièrement de le retrouver, seul ou accompagné, dans nos bilans de fin d’année - et partage quelques atomes crochus avec l’étonnante relecture de Terry Riley par The Young Gods sortie à quelques semaines d’écart, laquelle méritait bien ne serait-ce qu’une mention furtive dans ce classement.

(Rabbit)


5. Haunted Days & Monsieur Saï - Points de suture

3ème sortie de Monsieur Saï sur son propre micro-label, Mauvais Sang et deuxième sortie cette année. Après Mitron Skovronski pour un très court mais excellent EP Tank, c’est le Rennais Haunted Days qui, en se détachant de la nostalgie filmique de son The Ballroom Tape (2019) et de la douceur de ses instrus pour l’Australien Thorts (Hanky Man, sorti plus tôt dans l’année) vient sublimer la verve du MC via une série de 21 beats lo-fi particulièrement sublimes et entêtants. L’album idéal pour accompagner son petit déjeuner disait-il… du moins si l’envie de manquer de céréales et de remplacer le lait par sueur et sang pointe son nez. Autant dire que ce n’est pas la joie et que beaucoup en prennent pour leur grade : ça balance pas mal au Mans… patronat, politique, religion, morosité ambiante malmenée à coup de mots bien envoyés dans les parties. Entre la Vilaine et la Sarthe aussi il ne pleut que sur les cons !

(Riton)


7. Dominique A - Le Monde Réel

Après 10 années de disette à regarder de loin notre ancien héros de la "chanson rock" frayer avec une "variété rock" calibrée pour les radios au gré d’albums de moins en moins intéressants, on aurait presque pu passer à côté de ce Monde Réel. Heureusement, Vie étrange, dans la foulée du plus épuré et presque écoutable La fragilité, était venu en 2020 nous réconcilier doucement avec le bonhomme, un album cotonneux d’une grande délicatesse, très atmosphérique, presque ambient par moments, témoignant d’une envie de retour au bercail créatif. Pour autant, rien ne nous avait vraiment préparé à l’état de grâce du 16e opus qui nous occupe ici, et que l’on jurerait, en le découvrant à l’aveugle, produit à nouveau par le collectif Gekko tant la luxuriance impressionniste, savante et capiteuse des arrangements, quelque part entre Mark Hollis et le Bashung de L’imprudence, vient rappeler d’emblée celle du chef-d’oeuvre mal-aimé que fut Tout sera comme avant (2004), mis en musique à l’époque par Jean Lamoot et ses compères. En réalité il n’en est rien, mais on ne perd pas vraiment au change : c’est en effet un certain Yann Arnaud qui est aux manettes, croisé du côté des albums de Sébastien Schuller et Syd Matters et ça s’entend. Ainsi, du crescendo lyrique et mouvant du merveilleux Dernier appel de la forêt à la langueur bucolique du final Au bord de la mer sous la pluie en passant par les envolées orchestrales de Nouvelles du monde lointain, les sinuosités mélodiques du superbe Les roches entre clair-obscur et mélancolie, les sensations d’éternité du single Désaccord des éléments ou les éruptions anxiogènes d’un morceau-titre qui n’est pas sans évoquer John Barry, le ballet presque cosmogonique des instruments (flûte traversière, harpe, glockenspiel, piano, cuivres et cordes notamment) fait merveille en écrin de ces allégories d’un monde qui s’éteint, inquiètes quant à l’avenir sans être dénuées d’espoir. Le plus bel album de mister Ané depuis L’horizon, au moins.

(Rabbit)


8. Wintermute - Rubber

On ne va pas se priver de paraphraser le dossier de presse car il s’agit, en toute transparence, de la dernière sortie de notre petite structure-maison IRM Netlabel, conjointement avec Lotophagus et Foolish Records, labels des deux musiciens à l’oeuvre ici, j’ai nommé Innocent But Guilty et Wolf City. Guitares noisy ou post-rock, beats aiguisés aux influences tribales (cf. notamment Solid Gold ou le superbe River Ganges avec leur compère JD Roberts au saxophone dronesque), hip-hop (Rubber) ou même dub (sur le très magnétique Spongieux, peut-être le sommet du disque) et atmosphères froides et ténébreuses faites de drones et de synthés : les deux Français ont tiré le meilleur de leurs univers respectifs pour donner naissance à ce nouveau projet et à ces 9 instrus particulièrement évocateurs, qui devraient rappeler d’excellents souvenirs aux admirateurs des regrettés Picore, Lab° ou 2kilos &More, voire pourquoi pas de Scorn pour le downtempo profond et ténébreux ou encore des grandes heures de 65daysofstatic, du temps où le groupe britannique mêlait encore post-rock fébrile et structures électroniques plus abstraites. C’est dire que si nous avons décidé de contribuer à distribuer l’engin, ça n’est évidemment pas pour rien, on ne peut donc que vous engager à aller y jeter à une oreille, d’autant que l’album est comme de coutume proposé au téléchargement "prix libre" !

(Rabbit)


Notre classement des EPs du mois


1. aloeight - Arachnid

En dépit de l’excellence glauque de Toadmilk il y a quelques années, collaboration avec notre chouchou de l’underground rap du caveau Jakprogresso, on avait quelque peu omis d’explorer l’univers du producteur aloeight aka Fredo Dela Cruz, ex Granola dans une veine électronica/ambient tout à fait recommandable. Évidemment, mal nous en a pris mais comme il n’est jamais trop tard pour bien faire, c’est à l’occasion de sa meilleure sortie à ce jour que l’on renoue avec le Californien, un Arachnid conviant nombre de rappeurs appréciés dans ces pages, des plus obscurs (Jakprogresso donc, mais aussi Mickey Diamond et Pro Dillinger, pensionnaires du label I Had An Accident) aux plus connus et reconnus (Kool Keith, Planet Asia, eLZhi) en passant par ces noms qui montent mais pas encore assez chez nous (Ill Conscious, dont on vous causait par ici il y a une paire d’années). C’est tendu, tantôt crépusculaire ou soulful, lofi bien comme il faut et porté sur le genre de samples horrifiques chers à Boxguts ou Progresso (du genre même à sampler les soundtracks de Fulci, cf. l’intro du morceau-titre), avec des MCs en feu et une esthétique de la grisaille et de l’anxiété joliment déjouée ici et là par les élans plus lyriques de Filtered Soul ou Goat Talk, entre deux incursions carrément flipantes (Big Umbrella, The Pelican Brief).

(Rabbit)



2. Fawn Limbs - Oleum

Depuis Harm Remissions il y a trois ans déjà, les Fawn Limbs sonnent moins sec, moins mathématique, un peu moins grind aussi mais ils n’ont rien perdu de leur sauvagerie. Entretemps, le plus atmosphérique et texturé Darwin Falls aux élans cinématographiques était passé par là et en avait surpris plus d’un, un album très évocateur dont le désormais trio américano-finnois, privé de son bassiste Samuel Smith, a su conserver pour cet Oleum aussi impressionnant que vite expédié (euphémisme... 4 titres pour 5 minutes et 22 secondes de musique !) une certaine profondeur de champ qui lui donne assurément de la substance, malgré l’ultraviolence de ces missives à la fois virtuoses et régressives qui filent à 100 à l’heure tout en sachant temporiser quand il faut.

(Rabbit)



2. Ka - Languish Arts

Ka, le rappeur new-yorkais, ne se contente pas de sortir un nouvel EP, il en sort deux coup sur coup ! Languish Arts donc, ainsi que Woeful Studies, tous deux accompagnés d’une pochette sombre, où les salles de classe d’une école sont semblables aux ateliers désordonnés d’une usine désaffectée. Les titres qui se succèdent sur ces disques ne brillent pas moins de la même noirceur. La voix du MC, monocorde et désincarnée, se pose sur des instrumentations dépouillées. Ici un simple arpège de guitare en boucle, là un air de piano, une basse. Très peu de beats viennent rythmer ces ambiances hypnotiques. C’est au flot de parole fluide, aux syllabes bien placées, aux phrases soigneusement découpées qu’on doit la cadence. Ka assure sans forcer qu’il est un patron dans le game. Avec peu de moyens, il impose le respect.

(Le Crapaud)



4. Henry Franklin, Adrian Younge & Ali Shaheed Muhammad - Jazz Is Dead 014

Pour cette 14e référence d’une série d’EPs que nos lecteurs fidèles doivent désormais bien connaître, Adrian Younge et Ali Shaheed Muhammad se sont associés au contrebassiste octogénaire Henry Franklin, figure du label Black Jazz Records et croisé au fil des années au côté d’Ornette Coleman, Archie Shepp, Roy Ayers, Sonny Rollins ou encore feu Pharoah Sanders qui nous a quittés il y a quelques semaines, et plus récemment au sein du groupe 3 More Sound. Un choix peu surprenant sachant que c’est la basse du bonhomme que l’on entend samplée sur ce titre de A Tribe Called Quest, dont Ali Shaheed Muhammad tenait les platines jusqu’à il y a encore quelques années. Bénéficiant notamment de la guitare libertaire de Jeff Parker de Tortoise et de la trompette chaleureuse de Clinton Patterson, le résultat est solaire et de toute beauté, pour les amateurs d’un jazz fusion atmosphérique et luxuriant d’une élégance à toute épreuve, capable de passer des élans post-bop de The Griot au romantisme désarmant typiquement 70s de Memories Lost, de la tension électrique très blaxploitation de Feedback à la décontraction latine de Café Negro avec le même brio.

(Rabbit)



5. BEAK> - Kosmik Musik

Associé plus tôt dans l’année à son fidèle collaborateur Ben Salisbury pour la BO intrigante et plutôt réussie, entre synthés dystopiques, dark ambient et choeurs liturgiques, du film Men d’Alex Garland, allégorie néofem que l’on ne vous conseille pas forcément de vous infliger à moins d’avoir un faible pour les films d’horreur métaphysiques bien boursouflés, Geoff Barrow (Portishead) n’en oublie pas son projet le plus actif de ces dernières années, le trio BEAK> dont on n’est jamais déçu du krautrock mâtiné d’électronique. Ce ne sera vraisemblablement toujours pas le cas avec ce bien-nommé Kosmik Musik, suite où se télescopent sans temps mort crescendos d’arpeggiators, guitares psyché, batterie motorik et nappes ambient, dans un contrepied constant de tension hypnotique et de phases ascensionnelles plus oniriques.

(Rabbit)




Les bonus des membres de l’équipe


- Le choix de Rabbit : rand - Peripherie

Révélés par une paire d’EPs remarquables que nous chroniquions dans ces pages il y a deux ans (le premier ici, le second ), les Berlinois Frank Bogdanowitz (musicien électronique sous le pseudo Dr.Nojoke) et Jan Gerdes (pianiste de formation classique) ont pris leur temps pour parfaire ce premier long-format évoquant toujours l’épure de la paire Sakamoto/Alva Noto, les rythmiques faites de glitchs hypnotiques et rehaussées de blips impressionnistes aidant dès l’introductif Hoola. Avec Peripherie toutefois, on est plus souvent du côté obscur de l’électronique post-classique, avec des crescendos pulsés terrassants de tension (Drangsal), des méditations troublantes aux drones entêtants (Siegfried 2.0) voire caverneux (Blood Moon), une kosmische musik claustrophobe (San Gimignano) et autres rouleaux-compresseurs paradoxalement délicats devant autant au classical ambient qu’à la techno minimale d’outre-Rhin (Future is Certain). Quant au touché de Gerdes, il continue de flirter régulièrement avec le jazz, louvoyant par exemple du côté de certains projets de John Zorn sur le superbe Permanent Green. Un petit bijou finalement unique en son genre, à découvrir de toute urgence !



- Le choix de leoluce : Dead Rabbits - A Different Place

"Il y a un je-ne-sais-quoi là-dedans qui pousse à réitérer l’écoute, un côté vraiment très bien foutu où les mélodies ne faiblissent pas devant les échardes soniques qui elles-mêmes restent toujours acérées.
C’est crade mais pas trop mais c’est crade quand même. C’est accueillant mais pas non plus totalement accorte. C’est un chouette entre-deux où plein de choses se passent alors qu’en détaillant les morceaux, ils frappent finalement par leur belle simplicité et, rien à faire, on passe toujours un très bon moment avec A Different Place. La faute sans doute au côté exténué qui bataille sans cesse avec des arrangements véloces, à la noirceur non feinte qui se cache au cœur de chaque morceau, au mur du son sculpté avec délicatesse qui laisse le spleen s’exprimer.
Ça commence d’emblée plutôt fort avec Slowdown et surtout Mexico : carillon tintinnabulant, échos chargés, petites notes de synthé virevoltantes, voix scandée et mid-tempo hésitant entre volupté et arrachage. La fuzz calcinée le dispute aux arpèges fortement réverbérés sans noyer le côté pop qui maintient les mélodies sur le devant mais le mur de guitares ne s’éloigne jamais trop longtemps et les nappes tournoient vers le bas. Une chouette entame et un vrai petit tube pour Mexico. Le reste alterne entre ballades exténuées, morceaux plus alertes, mille-feuilles psyché et amalgame tout ça sur le charmant When The Sun Goes Down qui achève le tout.
On connait Dead Rabbits, on sait à quoi s’attendre mais tout sonne comme si on ne l’avait jamais entendu avant et A Different Place s’insinue sans faire de bruit peut-être mais incontestablement. "

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Les tops des rédacteurs


- Le Crapaud :

1. Enablers - Some Gift
2. The Bad Plus - The Bad Plus
3. Mamaleek - Diner Coffee
4. Haunted Days & Monsieur Saï - Points de suture
5. Oren Ambarchi - Shebang
6. Lent - Au Galop
7. Esmerine - Everything Was Forever Until It Was No More
8. Dominique A - Le Monde Réel
9. Modern Rituals - Cracking Of The Bulk
10. Makaya McCraven - In These Times

- Rabbit :

1. Nadja - Labyrinthine
2. rand - Peripherie
3. Esmerine - Everything Was Forever Until It Was No More
4. Mathias Delplanque - Ô Seuil
5. DJ Preservation - 1974
6. Beth Orton - Weather Alive
7. Lawrence English - Approach
8. Oren Ambarchi - Shebang
9. Marc Richter - Diode, Triode
10. Wintermute - Rubber

- Riton :

1. Nadja - Labyrinthine
2. The Bad Plus - The Bad Plus
3. Mamaleek - Diner Coffee
4. billy woods x Messiah Musik - Church
5. Vermin Womb - Retaliation
6. KEN mode - NULL
7. Jacaszek, Romke Kleefstra & Jan Kleefstra - It Deel I
8. Dominique A - Le Monde Réel
9. Haunted Days & Monsieur Saï - Points de suture
10. Wintermute - Rubber