Top : Les meilleures montures de 2019 (2/2)

Une nouvelle décennie vient de débuter. Nous aurons bien le temps de revenir sur la précédente mais, dans la mesure du possible, faisons les choses dans l’ordre. Priorité au court terme. L’année musicale ayant été vécue avec un peu moins de passion qu’à l’accoutumée, ce top s’appuie essentiellement sur les compositions de valeurs sûres.

Le temps permettra probablement de défricher davantage les sentiers isolés pour découvrir des pépites dissimulées aux pieds d’un cèdre ou d’un hêtre. En attendant, les dix EPs et trente LPs qui composent ce top m’ont accompagné durant ces douze derniers mois et deviendront à coup sûr, pour la majorité, des disques de chevet.

20. Com Truise - Persuasion System

Toujours influencé par les pionniers Warpiens que sont Boards of Canada et Aphex Twin, Com Truise ajoute un nouveau chapitre à une discographie trop méconnue, et les nappes cotonneuses qui jalonnent ce disque sauront transporter l’auditeur vers un ailleurs onirico-hanté.

Lire la chronique complète


19. Es-K - Continuance

Associé à onze autres beatmakers, Robert Ronci coordonne admirablement les forces en présence et, dans la veine d’un Rob Viktum, propose un condensé de hip-hop instrumental brut et cérébral à la fois. Stimulant.

Lire la chronique complète


18. Some Became Hollow Tubes - In 1988 I Thought This Shit Would Never Change

En tout début d’année, la sortie de In 1988 I Thought This Shit Would Never Change résonnait tel un uppercut adressé au visage d’auditeurs pas encore tout à fait remis des festivités du nouvel an. Le nouveau projet d’Aidan Girt de Godspeed You ! Black Emperor et d’un Eric Quach plus connu sous le pseudonyme de thisquietarmy révélait un post-rock saturé à la fois étouffant et enivrant. Brillant.

Lire le tir groupé


17. Quentin Sirjacq - Companion

A la fois mélodique et expérimental, Companion permet à Quentin Sirjacq d’explorer essentiellement avec son piano les textures sonores aussi bien que la manière dont celles-ci peuvent s’ajuster, s’assembler et même s’opposer, dans un registre proche d’un Bruno Bavota ou d’un Nils Frahm. Sans avoir besoin de recourir au contre-pied pour surprendre, il se dégage une osmose surprenante de chaque juxtaposition d’éléments figurant sur ce disque onirique et transcendant.

Lire la chronique complète


16. Dolàn Xakò - Deep Inside

Avec Deep Inside, Dolàn Xakò ne se réinvente pas en profondeur, mais l’inspiration est toujours au rendez-vous et le Français parvient à stimuler l’auditeur avec la même intensité que d’habitude. Si les beats sont légèrement moins prononcés qu’à l’accoutumée, ils sont tout aussi efficaces, rassurez-vous. Les nappes éthérées et hantées qui s’y lovent sont délicieuses, si bien que ce trip-hop 2.0 aux arrangements délicats semble n’avoir aucune date de péremption.

Lire la chronique complète


15. Aphant - Dive Response

Si l’ancien Beajn a toujours été attiré par des sonorités qui, bien qu’elles ne puissent être qualifiées de fondamentalement easy-listening, conjuguent une accessibilité chillesque avec des brumes plus audacieuses, ses derniers travaux en tant que Aphant l’amenaient à expérimenter davantage. Avec Dive Response, l’Américain renoue avec une forme d’accessibilité plus évidente, tout en maintenant une exigence certaine, se situant ainsi à mi-chemin entre ses derniers travaux et ceux qui nous avaient permis de le découvrir il y a déjà plus de sept ans. Alternant odes opaques et variations faussement flegmatiques dans une atmosphère oscillant entre ambient, trip-hop et « piano on the beat » mélancolique, Dive Response constitue une odyssée courte mais fascinante.

Lire le tir groupé


14. Segue - The Island

Cinq ans après son chef-d’oeuvre The Here And Now signé chez SEM, feu le label d’Alexandre Navarro, Segue nous revient avec un The Island à la fraîcheur rare. Il s’agit surtout d’une nouvelle pièce majuscule preuve d’une justesse impressionnante, parvenant à faire entrer l’auditeur dans un état quasi hypnotique sans jamais ajouter d’éléments inutiles. Les modulations des synthétiseurs et les boucles de beats sont d’une justesse folle et constituent rien de moins qu’un chef-d’oeuvre combinant ambient, electronica et techno-dub.

Lire le tir groupé


13. Bruno Bavota - Get Lost

Hissant de nouveau le piano comme l’élément central de ses compositions sans rechigner à les complexifier avec quelques abstractions ambient, Bruno Bavota semble avoir trouvé avec Get Lost l’équilibre parfait. Comme d’habitude, le pianiste italien nous gratifie d’hymnes souterrains et mélancoliques incontournables. Peut-être bien son chef-d’oeuvre, et probablement son meilleur cru depuis 2013 et l’exceptionnel The Secret of The Sea.

Lire la chronique complète


12. Alexandre Navarro - Les Liens Magnétiques

Déjà présent dans le classement des meilleurs EPs de l’année - sur la plus haute marche avec Pneuma - Alexandre Navarro est en double-file. Il faut dire que le Parisien a été inspiré cette année. Est-ce le fait de s’être affranchi de ses responsabilités de patron de label - pas rassasié, il est néanmoins à la tête du collectif Hep - ou tout simplement l’expression d’une créativité débordante qui lui permet d’accoucher de si franches réussites ? Quoi qu’il en soit, Les Liens Magnétiques est aussi inspiré qu’efficace sur le plan technique, en témoignent ces modulations d’une pureté assez incroyable, y compris en live. Il s’agit là d’un (nouveau) chef-d’oeuvre ambient à mettre à l’actif d’Alexandre Navarro.

Lire le tir groupé


11. Froth - Duress

Je n’aime pas particulièrement le terme de "grower", utilisé à tort et à travers par certains chroniqueurs au cours de la décennie et déjà passé de mode. Ceci étant, le concept conviendrait assez à ce Duress, qui m’a d’abord déçu par son aspect légèrement "propret". Mais les compositions de ce disque sont suffisamment bien agencées et l’identité sonore de Froth - un indie-rock vaporeux et flegmatique lorgnant vers le slowcore - diablement efficace, si bien que je me suis retrouvé hypnotisé et capturé par cet excellent disque.

Lire le tir groupé


10. Nick Cave & The Bad Seeds - Ghosteen

Certains ont trouvé ce disque profondément soporifique quand d’autres y ont vu une nouvelle preuve incontestable du talent de Nick Cave. Si j’admets volontiers quelques longueurs sur ce Ghosteen, je me range clairement dans cette dernière catégorie, d’autant plus que, contrairement à bon nombre d’aficionados de l’Australien, je ne parviens pas à dire si je préfère la partie dédiée aux enfants ou celle consacrée aux parents sur ce disque construit en deux chapitres. J’aime la totalité de ce disque douloureux, possiblement cathartique - espérons-le - où la dramaturgie accompagne des instrumentations mélanco-mélodiques avec, encore et toujours, la voix du crooner comme point de repère. Qui peut se targuer de construire de tels disques après tant d’années ?

Lire la chronique complète


9. Dog Bless You – La Science Du Langage

Alors qu’il avait imaginé mettre un terme au projet Dog Bless You, Samuel Ricciuti a finalement donné un successeur à Ghosts & Friends, numéro un de mon top en 2012. Sans se presser, il a pris le temps de polir un nouveau disque protéiforme essentiel, où basses, synthétiseurs, cuivres et beats s’enlacent, s’emboîtent, se repoussent et se complètent. C’est un véritable labyrinthe sonore que l’auditeur attentionné découvrira avec cette electro analogique et hypnotique. Fascinant, à tel point qu’il faudra être bien inspiré pour déterminer avec certitude le sommet de la discographie de l’artiste...

Lire la chronique complète


8. Espen T. Hangård - Elementær

Bien belle découverte que cet Elementær, deuxième disque partagé par le Norvégien Espen T. Hangård. Si les fans d’Aphex Twin ne seront pas dépaysés par les abstractions qui jalonnent tous les recoins de l’album, les amateurs de synthétiseurs modulaires déstructurés autour de motifs alambiqués y trouveront également leur compte. Toujours prompt à expérimenter, le hipster s’autorise donc des passages plus oniriques voire solaires rappelant en ce sens Kraftwerk ou même Mr.Oizo lorsque l’ensemble s’accompagne d’un soupçon de fantaisie. Entre pads lumineux, basses acides et rythmiques syncopées, Espen T. Hangård propose donc une braindance refusant la complexité gratuite. Acides, les compositions ne se départissent cependant jamais de lignes mélodiques stimulantes et peuvent même convoquer une voilure aussi suave que jouissive. Ambitieux et immersif.

Lire la chronique complète


7. Swordplay - Paperwork

En matière de hip-hop, rien ne m’a autant fasciné cette année que ce Paperwork. Rafraîchissant par sa fougue, le disque n’en sent pas moins le soufre. Un savoureux flow révolté se pavane au-dessus d’instrumentations subtiles et hétérogènes s’orientant aussi volontiers vers l’électro, le rock ou l’acid. Polymorphe, Paperwork n’est pas sans rappeler les territoires arpentés par Mongrel sur Better Than Heavy. De l’autre côté du spectre, on n’est parfois pas si loin d’un Dälek qui aurait choisi d’atténuer les saturations instrumentales pour mettre en avant et éclaircir le flow. Rempli d’idées et de chemins de traverse, Paperwork s’appuie donc surtout sur une identité forte et cohérente faisant de ces trente-cinq minutes un voyage intense et presque trop concis.

Lire le tir groupé


6. Ô Lake – Refuge

En solo, Sylvain Texier avait déjà partagé deux albums signés sous le pseudonyme de The Last Morning Soundtrack. Se présentant désormais sous l’alias Ô Lake, le Français n’a pas changé de nom par hasard, celui-ci accompagnant une évolution notable dans les sonorités de ses compositions. Et si ’artiste se rapproche plus que jamais du néoclassique de Nils Frahm et surtout Ólafur Arnalds, la sensibilité reste la même. A fleur de peau, en permanence sur le fil, les élégantes instrumentations trouvent leur équilibre entre atmosphères mélanco-glaciales et ritournelles mélodieuses au piano, s’appuyant également sur un trio de cordes assurant les parties de violoncelle, violon et alto pour décupler la force contemplative de morceaux alors sublimés. Tantôt aérien, sous-marin ou polaire, le périple interne prend forme autour d’éléments divers articulés autour d’une grâce commune. Époustouflant.

Lire la chronique complète


5. L’Epée – Diabolique

Si l’on connaît toutes les limites d’un "super-groupe", la perspective d’entendre Emmanuelle Seigner à la narration d’un disque douze ans après sa collaboration avec Ultra Orange suffisait pour générer une attente certaine. Auprès des Limiñanas et d’un Anton Newcombe en forme, la Française manifeste la même assurance sensuelle qu’à l’époque et s’appuie sur des compositions percutantes et formidablement troussées qui s’inscrivent entre shoegaze psychédélique et rock post-beatnik. L’ambiance souterraine qui se dégage est aussi délicieuse que vénéneuse et, bien au-dessus de la moyenne, Diabolique permettra à ses auteurs de sabrer le champagne tant cette tentative est tout sauf un coup d’épée dans l’eau.

Lire la chronique complète


4. Kishi Bashi - Omoiyari

De manière étonnante, je n’ai pas pris le temps de parler de Kishi Bashi cette année. Omoiyari est pourtant l’un des albums qui m’a le plus marqué au cours des douze derniers mois, et il constitue sans doute la plus belle surprise de ce cru, les trois artistes placés sur le podium étant déjà habitués à de tels positionnements dans mes bilans annuels.

L’Américain basé dans l’état de Georgie en est déjà à son quatrième album, mais c’est avec celui-ci que j’ai découvert son univers. Celui qui a accompagné Of Montreal ou Sondre Lerche sur scène dévoile des sonorités à la fois entraînantes et mélancoliques, rappelant le lyrisme de Sufjan Stevens mais surtout la sensibilité d’Owen Pallett, partageant avec ce dernier un attrait certain pour les structures de cordes galopantes aux formes multiples. Mélodique, entêtant et entraînant.


3. Jay-Jay Johanson – Kings Cross

Près d’un quart de siècle de carrière, et Jay-Jay Johanson partage ce qui constitue peut-être son plus bel album. Il faut dire que le Suédois était déjà inspiré ces derniers temps, les sorties dOpium et Bury The Hatchet en témoignant. Ce patchwork de compositions solaires et martiales, oscillant entre downtempo, piano groovy et lounge-jazz, évidemment porté par des mélodies inspirées (Heard Somebody Whistle figure parmi les grands titres de l’année), des instrumentations riches, un lyrisme jamais léthargique et une capacité au-dessus de la moyenne à partager ses sensibilités, constitue assurément l’une des sorties incontournables du cru 2019. Petit plus, ce disque caméléon pourra s’écouter en toute circonstance, s’adaptant aux humeurs de l’auditeur.

Lire la chronique complète


2. Thom Yorke – ANIMA

Si seulement ANIMA avait été conçu par un autre auteur, il aurait été plus aisé de partager ce coup de cœur. En effet, que valent les louanges d’un fan de Radiohead devant l’éternel concernant le disque solo du leader du quintet ? Sans doute pas grand-chose. Et puis, chacun de nos lecteurs a déjà son avis sur Thom Yorke, selon qu’ils se rangent parmi les adorateurs de l’oeuvre de l’Anglais, les déçus du virage post- Kid A ou les sceptiques de la première heure.

Il est donc quasiment impossible - en tout cas, ma plume atteint clairement ses limites face à cette besogne - de convaincre quelqu’un d’écouter le dernier album solo de Thom Yorke. Ou bien il le fera de lui-même, ou il ne le fera pas. Et c’est dommage, car l’Anglais signe ici son effort solitaire le plus impressionnant depuis 2006 et la sortie de The Eraser, sommet discographique qu’il égale avec un patchwork d’idées où les pièces se combinent admirablement.

Sur ANIMA se croisent l’exigence et la richesse de The King of Limbs et une forme d’évidence mélodique, ou peut-être plutôt d’accessibilité mélancolique, croisée sur A Moon Shaped Pool, tout en accumulant une montagne de détails sonores soigneusement dissimulés. Essentiel.

Lire la chronique complète


1. Cigarettes After Sex - Cry

Après seulement deux albums, Cigarettes After Sex décline toujours la même recette. Vis-à-vis d’un autre groupe, cette affirmation serait assurément le signe d’une insupportable redondance. Mais le combo mené par Gregory Gonzalez possède un supplément d’âme rare. Et si la recette est toujours la même, elle est si délicieuse qu’elle ne provoque jamais l’écœurement. Avec Cigarettes After Sex, c’est simple : certains trouvent cet univers soporifique au possible (une bonne partie de la rédaction se range d’ailleurs dans cette catégorie), tandis que d’autres sont envoûtés par cette ambiance vaporo-Lynchienne (votre serviteur lève évidemment le doigt). Enivrant et brumeux, Cry établit encore un peu plus l’identité d’un groupe aussi bien capable de fulgurances immédiates (Heavenly, Falling In Love) que d’odes délicieuses (Touch, Pure). Obsédant.

Lire la chronique complète


Articles - 11.01.2020 par Elnorton